En raison du changement climatique, la période d'activité du moustique tigre s'allonge et son aire de répartition s'étend.
© Shyamli Kashyap/Pixabay
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Des moustiques pour sauver l’été, c’est le pari de cette start-up

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Pour lutter contre la prolifération du moustique tigre, la start-up Terratis produit et relâche dans la nature des millions de mâles stérilisés. Un procédé respectueux de l’environnement connu sous le nom de TIS : technique de l’insecte stérile. 

Des milliers de moustiques tigres lâchés dans les rues de Brive-la-Gaillarde le 13 mai dernier. Un scénario catastrophe ? Non, une expérimentation pour lutter contre la prolifération de ces insectes vecteurs de maladies, telles que la dengue et le chikungunya. Chaque semaine pendant six mois, ce sont près de 400 000 mâles stériles qui seront relâchés dans la commune corrézienne. Soit un total d’environ 11 millions d’individus. 

Cette opération étonnante est orchestrée par Terratis, une start-up originaire de Montpellier qui utilise la technologie TIS, ou “technique de l’insecte stérile”. La promesse de l’entreprise : jusqu’à 80 % de piqûres en moins, le tout sans aucun insecticide.  

Une méthode efficace et respectueuse de l’environnement 

Le procédé TIS repose sur un mécanisme simple : les mâles sont stérilisés par rayonnement avant d’être relâchés dans la nature pour s’accoupler avec les femelles. Celles-ci, qui ne peuvent s’accoupler qu’une fois dans leur vie, pondent ensuite des œufs non fécondés. Mécaniquement, les populations sont ainsi réduites.  

“Nous diminuons les populations dans les zones que nous protégeons avec un impact positif sur l'environnement, la santé, la société et l’économie”, résume l’entreprise sur son site internet

Grâce à des subventions et des bourses accordées par la région Occitanie et Bpifrance, Terratis a pu rapidement développer sa ferme à insectes. “Le site est organisé en quatre salles principales, qui suivent les étapes du cycle de vie du moustique”, explique dans les colonnes de la Gazette du Midi Clélia Olivia, co-fondatrice et présidente de la start-up.  

“D’abord, la salle de culture des larves, ensuite la chambre dédiée au tri des nymphes, dans laquelle nous séparons les femelles des mâles. La troisième étape se passe dans la salle d’élevage adulte, où nous stérilisons les moustiques masculins en les exposant à des rayonnements ionisants de type rayons X, semblables à ceux utilisés pour stériliser des produits sensibles comme le sang destiné aux transfusions. La dernière étape se passe dans la chambre de tri où nous constituons des lots de moustiques tigres stériles”.  

Le fruit de 15 ans de recherches 

La méthode TIS appliquée au moustique tigre est le résultat de plus de 15 ans de recherches : elle est développée depuis 2009 par l’Institut de recherche pour le développement (IRD) et ses partenaires à La Réunion, un territoire où le moustique tigre prolifère depuis longtemps. C’est d’ailleurs là-bas que Clélia Olivia, alors doctorante, a découvert ce procédé. 

Arrivé dans le sud de la France métropolitaine en 2004, le moustique tigre est désormais présent sur la quasi-totalité du territoire : au 1er janvier 2025, 81 départements sur 96 étaient colonisés. Une progression vers le Nord favorisée par le changement climatique

© Ministère du travail, de la santé, des solidarités et des familles

Si la technologie TIS ne permettra pas de stopper complètement la prolifération du moustique, les chercheurs estiment néanmoins qu’elle représente un moyen de lutte efficace. “Les travaux effectués sur la TIS à La Réunion nous invitent à considérer cette technique comme un ajout complémentaire décisif à une boîte à outils devenue incontournable pour le contrôle des moustiques responsables de la transmission des agents pathogènes responsables de la dengue ou du chikungunya”, souligne dans un communiqué Dr. Louis Clément Gouagna, entomologiste médical à l’IRD et coordonnateur du programme TIS à La Réunion. 

À Brive, où l’expérimentation doit se poursuivre jusqu’à la fin du mois d’octobre, la municipalité appellent également les habitants à ne pas compter uniquement sur cette technique et recommande de continuer à respecter les gestes de précaution complémentaires.