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Environnement

Déconfinement : voiture ou vélo comme alternative aux transports en commun ?

À l'aube d'un déconfinement progressif du pays, nombre de citadins dépendants des transports en commun ont de quoi s'inquiéter quant à leurs futurs déplacements. Si l'exécutif abat ses cartes sur la solution "vélo", la levée du confinement pourrait aussi bien profiter à la voiture.

Si l'heure du déconfinement approche, les gestes barrières restent de mise. Alors que la distanciation sociale est jugée indispensable par les experts pour éviter la propagation du virus Covid-19, les Français devraient bouder les transports en commun. Métros, bus, RER, tramways bondés aux heures de pointe, favorisant la promiscuité des uns et des autres, représentent un véritable danger quant à une possible deuxième vague d'épidémie. Les Français s'en inquiètent, le gouvernement aussi.

Ce lundi, l'écologiste Pierre Serne, ex-numéro deux aux transports de la région Île-de-France, s'est vu confier une mission spéciale par la ministre de la Transition écologique : Elisabeth Borne lui a commandé un plan d'élaboration destiné à favoriser les déplacements à vélo lorsque les mesures de confinement seront levées.

Une solution privilégiée à l'étranger

Chez nos voisins, l'alternative vélo est déjà adoptée. À l'image de Bogotá qui a misé sur des aménagements temporaires en remplaçant quelque 35 kilomètres de routes par des pistes cyclables. Ou de Berlin, qui a doublé la largeur de ses voies pour désengorger le trafic cycliste et veiller au respect des distances de sécurité. 

Mais pour l'heure dans l'Hexagone, on réfléchit toujours à la réponse à apporter d'ici le 11 mai, date avancée d'une possible levée de confinement. Quelques premières municipalités imitent l'exemple étranger et commencent à actionner des leviers : à commencer par Montpellier où le maire Philippe Saurel a annoncé le 13 avril le lancement d'un dispositif de création de pistes cyclables supplémentaires provisoires dans la ville. Grenoble devrait lui emboîter le pas, comme signalé par son maire Eric Piolle le lendemain.

Des mesures de protection dans les transports en commun ?

Outre l'option vélo, les transports en commun ne pourront toutefois pas être bannis pour l'ensemble des Français. Indispensables au demeurant, ils devront s'adapter pour assurer une certaine sécurité sanitaire aux usagers. Mais dans l'attente d'une feuille de route gouvernementale sur le sujet, auprès de France Inter, la RATP pour Paris, Ilévia pour Lille ou encore les transports lyonnais TLC considèrent qu'il est pour l'instant "trop tôt" pour se prononcer. À Paris, la présidente de la région Valérie Pécresse, bien que favorable au plan vélo, estime qu'il "ne résoudra pas le problème des cinq millions qui prennent les transports en commun tous les jours". De son côté, le maire adjoint en charge des Transports Christophe Najdovski a indiqué sur Twitter que Paris travaillait "en concertation avec les associations d'usagers à la réalisation de nouveaux aménagements cyclables inspirés de l'urbanisme tactique, simples et rapides à mettre en œuvre, pour accompagner la demande de déplacements à vélo post-confinement".

Pour Joël Hazan, expert au Boston Consulting Group (BCG), il faudra trouver "une manière de rétablir la confiance pour les transports en commun", explique-t-il auprès de l'AFP : "Dans une ville comme Paris, on n'arrivera pas à se passer des transports publics. On n'a pas le choix !". "Quelles que soient les mesures qu'il faut mettre en place, s'il faut mettre du gel hydroalcoolique accroché à chaque siège, s'il faut désinfecter les barres dix fois dans la journée, s'il faut distribuer des masques à l'entrée... Tout ça vaudra toujours la peine, par rapport à une division par deux ou trois de la fréquentation des transports en commun qui serait une catastrophe", plaide-t-il. 

Et si la capitale a repris goût à la pratique cycliste durant les grèves de décembre dernier, la voiture était également largement plébiscitée. 

Vers un boom de la voiture ? 

Avec la crainte des transports en commun, on craint aussi un rebond de l'usage de la voiture dans les villes. Usage qui ne serait pas sans conséquence sur la qualité de l'air, à l'heure où la corrélation entre pollution et mortalité du Covid-19 a été à nouveau affirmée par une étude de l'université d'Harvard. En Chine dans la ville de Wuhan notamment, foyer de l'épidémie, les ventes de voitures neuves sont reparties à la hausse avec le déconfinement et ce, malgré une augmentation conséquente de l'utilisation des vélos en libre-service.

Alors qu'en Île-de-France, la moitié des déplacements automobiles sont inférieurs à trois kilomètres - et donc plus polluants que les longs trajets -, qui peut affirmer que le pays ne suivra pas la trajectoire chinoise ?

Et pour Joël Hazan, le rebond des voitures, au-delà de représenter une "catastrophe d'embouteillage et de pollution", "renchérirait massivement le coût des transports pour le budget des ménages".

Quels moyens mis en œuvre pour privilégier le vélo en ville ?

Miser sur le vélo, certes. Mais encore faudra-t-il s'en donner les moyens, à l'heure où nombre de Français le boudent encore en raison notamment du manque de sécurité des aménagements urbains dans certaines villes, pensées pour le "tout voiture".

Aides financières, meilleur accès aux offres de libre-service, déploiement de pistes supplémentaires, élargissement des voies déjà existantes... Les solutions avancées sont nombreuses mais l'heure n'est pas encore au passage à l'acte.

Une étude belgo-hollandaise publiée la semaine dernière a réévalué les distances minimales de sécurité à respecter dans la rue pour éviter toute propagation du virus. Elle conclut qu'il est préférable de se tenir à au moins dix mètres de distance d'un cycliste pour éviter toute projection, appuyant d'autant plus la nécessité d'élargir les voies cyclables, sur l'exemple berlinois.

En priorité, les autorités souhaitent donc déployer des pistes cyclables temporaires : "L’idée est de tester ces solutions avec tous ceux qui travaillent actuellement en période de confinement pour voir si elles fonctionnent et sont adaptées. Et éventuellement les ajuster", a indiqué Pierre Serne dans les colonnes du Parisien. Une stratégie visant donc à mettre en place de nouveaux aménagements provisoires, pour répondre aux besoins actuels : cité par Monsieur Najdovski, c'est ce que l'on appelle l'urbanisme tactique.

Dans une note dédiée, le Cerema - Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement du territoire - s'interroge sur les "opportunités de mises en place en France de tels aménagements", concluant à son potentiel "considérable". Quoi qu'il en soit, la question de nos usages et de nos déplacements futurs rejoint celle de ce "monde d'après", actuellement sur toutes les lèvres. Si nombre d'experts de tous bords prennent la parole çà et là pour imaginer comment pourrait se dessiner la société post-pandémie, la transition de nos mobilités pourrait bien être la réponse la plus pressante à apporter. Reste à savoir si le vélo sera le gagnant de ce match.

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