Le coronavirus, une "catastrophe" pour les transports urbains (expert)

Le coronavirus vient bouleverser les mobilités dans des métropoles qui comme Paris dépendent des transports publics et risquent d'être submergées par un flot automobile quand sera venue l'heure du déconfinement, explique à l'AFP Joël Hazan, expert au Boston Consulting Group (BCG).

"On est dans une incertitude totale face à ce virus et avec de grands risques" dans le domaine des transports urbains, constate Joël Hazan.

"Pour les villes qui dépendent des transports en commun, c'est la catastrophe", prédit le consultant. Car la promiscuité dans les RER, métros et autres tramways n'est pas la bienvenue en période de propagation du virus.

"En Chine, on voit que la congestion routière a repris le même niveau que l'année dernière à la même époque, quand le trafic dans le métro est à un peu moins de 50%. Ça veut dire qu'il y a des gens qui se sont reportés du métro à la voiture individuelle", constate-t-il.

Il va donc falloir "trouver une manière de rétablir la confiance pour les transports en commun", selon l'expert en mobilités. "Dans une ville comme Paris, on n'arrivera pas à se passer des transports publics. On n'a pas le choix !"

"Quelles que soient les mesures qu'il faut mettre en place, s'il faut mettre du gel hydroalcoolique accroché à chaque siège, s'il faut désinfecter les barres dix fois dans la journée, s'il faut distribuer des masques à l'entrée... Tout ça vaudra toujours la peine, par rapport à une division par deux ou trois de la fréquentation des transports en commun qui serait une catastrophe."

Un report vers la voiture "renchérirait massivement le coût des transports pour le budget des ménages", pointe-t-il. "Et ce serait "une catastrophe d'embouteillages et de pollution."

"L'urgence, pour beaucoup de grandes métropoles, c'est de foncer sur un plan de communication pour rassurer et de prendre des mesures effectives sur les masques, les gants, le gel, le nettoyage... Il ne va pas falloir être radin là-dessus parce que l'enjeu est important!"

"L'urgence, c'est aussi de foncer sur le vélo en allant aussi vite que possible sur la multiplication des voies dédiées", ajoute-t-il.

- "Explosion du vélo" -

Face à l'épidémie, "de nombreuses villes dans le monde ont mis en place des pistes cyclables un peu sauvages, ou artisanales, pour reprendre du terrain rapidement sur la voiture individuelle", relève-t-il. Et plusieurs agglomérations françaises commencent à s'y mettre.

S'il pense que les nouvelles mobilités ne joueront qu'un rôle marginal, Joël Hazan se réjouit à l'avance d'une prochaine "explosion du vélo".

Son usage avait bondi à New York avant le confinement, tandis qu'"en Chine, depuis la fin du confinement, l'utilisation des systèmes de vélo en libre service a augmenté de 150%".

Le vélo est "le mode de transport le plus +sain+, c'est meilleur pour la santé, et c'est aussi une bonne nouvelle pour l'environnement." Peut-être devrait-on rendre gratuits les systèmes de vélo en libre-service de type Vélib' "et les étendre encore plus", ajoute-t-il.

"La deuxième bonne nouvelle, c'est le télétravail", qui devrait rester plus intensif qu'avant la crise du coronavirus, juge M. Hazan.

On pourrait aussi décaler les horaires de travail pour étaler les déplacements dans la journée, dit-il.

"Cela pourrait suffire à résoudre les problèmes de congestion parce qu'il n'y a pas besoin d'enlever beaucoup de voitures pour améliorer considérablement les conditions de circulation".

Quoi qu'il en soit, "il va falloir qu'on mette en place des mécanismes de régulation, y compris financiers, pour s'assurer qu'on ne dérive pas complètement" vers le tout-automobile, estime le consultant du BCG.

"Ce sera peut-être le moment d'avoir le courage de mettre en place un système de péage urbain", ose-t-il.

Des exemptions, bien sûr, seraient possibles sous conditions de ressources.

Mais, reconnaît aussitôt Joël Hazan, "dans un contexte où le pouvoir d'achat va être attaqué, des mesures qui consistent à rehausser le prix d'utilisation de la voiture vont être inaudibles".

"Historiquement (avant que le gouvernement français ne renonce à tout projet de péage urbain, NDLR), ce qui était proposé, c'était des exemptions pour les véhicules électriques (...) ou pour les gens qui covoiturent", rappelle-t-il. "Mais bon, est-ce qu'on a toujours envie d'inciter les gens à covoiturer ?"

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