©SANOOK NUK/Shutterstock
Idées Pratiques

Épargne : quels placements durables pour résister à l'inflation ?

Avec un taux d’inflation de l’ordre de 5,2 % en moyenne annuelle, le portefeuille des Français a été malmené en 2022. Pour 2023, la Banque de France prévoit une tendance comparable. Dans ce contexte, comment préserver son pouvoir d’achat en privilégiant des placements responsables ?

Le phénomène est mondial. En France, l’année 2022 a été marquée par une hausse des prix à la consommation de l’ordre de 5,2 % en moyenne, d’après les chiffres de l’Insee parus début janvier. À titre de comparaison, l’inflation annuelle de 2021 avait été estimée à 1,6 %.

Qu'est-ce que l'inflation ?

Elle se caractérise par une situation d’augmentation généralisée des prix de biens et de services. "On parle d’inflation lorsque les prix augmentent globalement. (…) Quand tel est le cas, avec le temps, chaque euro permet d’acheter moins de produits. Autrement dit, l’inflation érode progressivement la valeur de la monnaie", définit la Banque centrale européenne (BCE).

Comment expliquer cette croissance des prix en 2022 ? La BCE cite trois facteurs, déjà notables en 2021 : "La réouverture rapide de notre économie, l’augmentation des prix de l’énergie qui pousse l’inflation à la hausse" et enfin, "l’effet de base" - désignant le niveau de mesure de référence d’inflation d’une année sur l’autre, particulièrement bas en 2020. À ceux-ci s’ajoutent en 2022 les effets de la guerre en Ukraine. Le contexte géopolitique a fait grimper en flèche le coût des matières premières - telles que le gaz ou le blé par exemple -, entraînant avec lui une hausse des prix à la consommation. À l’échelle européenne, les Français ont toutefois été moins impactés que leurs voisins grâce à certaines mesures mises en place par l’État pour préserver leur pouvoir d’achat. À l’image du bouclier tarifaire. 

Tandis que la BCE projette une inflation à 6 % en moyenne en 2023, quels placements choisir pour combiner des rendements potentiellement supérieurs à l’inflation et à impact positif sur l’environnement ou la société ? Retour sur quelques-uns des produits les plus plébiscités par les Français.

Livrets d'épargne réglementée, fonds en euros... Sans risque mais à faibles rendements

L’épargne réglementée, constituée des livrets A, PEL, ou encore livrets jeune, garantit des rendements sûrs à taux fixe, avec le plus souvent une disponibilité immédiate de l’argent placé. Elle est largement appréciée par les Français et sa collecte est majoritairement gérée par la Caisse des dépôts et consignation (CDC). Cette institution financière publique dirige ainsi cet argent principalement vers des projets liés à "la construction et la réhabilitation de logements sociaux, poli- tique de la ville, projets des collectivités locales". Fin 2021, quelque 834 milliards d’euros étaient déposés sur les produits d’épargne réglementée, selon le rapport annuel de la Banque de France.

  • Livret A

Selon Bercy, "83 % des Français détenaient un livret A en 2020". Sans condition d’accès, il est plafonné à 22 950 euros et, depuis le 1er février, son taux rehaussé par le gouvernement est établi à 3 %. 60 % de ses encours sont donc gérés par la CDC, le reste par les banques qui les placent sur les marchés financiers.

  • Livret de développement durable et solidaire (LDDS)

Là encore, le LDDS est accessible à tous. Si son taux a lui aussi été rehaussé à 3 %, son plafond est en revanche fixé à 12 000 euros. Sur le même principe que le livret A, ses fonds sont gérés principalement par la CDC. Il tient en revanche son nom d’une disposition spécifique, selon laquelle les sommes épargnées peuvent être utilisées pour des dons à une entreprise de l’économie sociale et solidaire. Les banques doivent ainsi présenter chaque année à l’épargnant une liste de 10 sociétés éligibles à ces dons, lesquels seront généralement utilisés pour financer des travaux de rénovation énergétique des logements.

  • Livret d’épargne populaire (LEP)

Le livret d’épargne populaire (LEP) est pour sa part réservé aux revenus les plus modestes. En 2023, une personne seule peut ouvrir ce type de compte dans la mesure où ses revenus ne dépassent pas 21 393 euros annuels. Quant à son plafond, il s’élève à 7700 euros. Le LEP présente l’avantage d’une rémunération intéressante. À hauteur de l’inflation, depuis le 1er février son taux s’élève à 6,1 %.

  • Assurance-vie fonds en euros

Avec un total d’encours de 1842 milliards d’euros fin 2022 selon France Assureurs, l’assurance-vie constitue le produit financier préféré des Français. Ces contrats peuvent être composés de deux types de supports : les fonds en euros et les unités de compte (UC). Les premiers offrent l’avantage d’être sécurisés et assurent au bénéficiaire une garantie de capital puisque ceux-ci sont investis "sur des placements peu risqués, majoritairement en obligation d’État et d’entreprises, mais aussi plus marginalement en actions et dans l’immobilier", note l’Autorité des marchés financiers (AMF). En revanche, les fonds en euros offrent des rendements assez faibles : pour 2021, leur taux s’est établi à 1,28 %, selon la Banque de France.

Investir

Pour combler l’inflation d’une part, et donner du sens à son épargne de l’autre, reste alors l’option d’investir dans des placements plus risqués.

  • Investir en actions

Placer son argent en bourse revient à acheter des actions, soit des parts d’une société cotée. Il s’agit d’une démarche à double-tranchant : l’investisseur s’expose à des gains potentiellement élevés, mais également à la perte partielle ou totale de son capital investi. Par exemple, le CAC 40 a affiché une baisse de 9,5 % en 2022 après avoir gagné près de 10 % en 2021. Outre les potentiels de rendements, investir en actions offre un autre avantage : celui de pouvoir diriger son argent uniquement vers des entreprises alignées avec ses valeurs, en fonction par exemple de leur politique en matière de développement durable ou de leur secteur d’activité. Il est possible d’investir en actions en direct en sélectionnant soi-même les sociétés, ou via des fonds d’investissement gérés par des organismes professionnels, dont de nombreux ont mis en place ces dernières années des politiques d’investissement responsable (ISR). En fonction de leur stratégie, ces derniers peuvent par exemple choisir d’exclure des sociétés évoluant dans des secteurs comme l’armement ou les énergies fossiles, quand d’autres investissent uniquement dans des entreprises dont l’activité est liée au développement durable. Attention, il est recommandé de faire appel à un conseiller avant toute décision de placement.

Qu'est-ce que l'ISR ?

L’investissement socialement responsable (ISR) désigne la prise en compte de critères "extra-financiers". Ceux-ci reposent sur les facteurs ESG, pour environnementaux, sociaux et de gouvernance. Il existe plusieurs labels en ce sens : le label ISR ou encore le label Greenfin, chapeautés respectivement par le ministère de l’Économie et de la Transition écologique.

  • Investir en obligation

Les obligations sont des emprunts émis sur les marchés par les États ou les entreprises destinés à financer divers projets. Au même titre que pour les actions, certaines d’entre elles incluent un biais ESG. À la différence des obligations classiques, les obligations vertes par exemple - ou green bond - doivent "permettre de financer des projets contribuant à la transition écologique", selon le ministère de la Transition écologique. Sur le même principe, il existe également des obligations dites sociales ou durables. Dans l’ensemble, les obligations présentent moins de risques par rapport aux actions, mais sont aussi peu rémunératrices. À noter : l’Etat français a émis l’an passé une première obligation verte indexée sur l’inflation. Avec un taux d’intérêt variable, celui-ci est ajusté selon l’indice des prix à la consommation de l’Union européenne

  • Investir dans la pierre-papier

Les SCPI ou OPCI sont des instruments financiers permettant d’investir de manière indirecte dans l’immobilier locatif. Selon l’AMF, "détenir des parts dans une Société civile de placement immobilier (SCPI) vous permet d’être co-propriétaire de commerces, d’immeubles ou encore de logements destinés à la location et dont la gestion est confiée à une société de gestion". Quant aux Organismes de placement collectif en immobilier (OPCI), ceux-ci "permettent d’acquérir, avec d’autres épargnants, des biens immobiliers destinés à la location auprès de professionnels ou de particuliers". À la différence des SCPI, les OPCI ne sont pas seulement composés d’immobilier physique mais détiennent aussi une part investie dans d’autres produits financiers : "Il s’agit ici d’un investissement à la fois immobilier et financier", distingue l’AMF. Aussi, certains fonds immobiliers incluent des critères liés au développement durable. Certaines SCPI dites "vertes" peuvent par exemple investir dans des bâtiments à haute performance énergétique, quand d’autres ciblent des projets à rénover. En 2021, le label ISR s’est notamment ouvert aux fonds immobiliers. En 2022, la performance moyenne des SCPI s’est établie aux alentours de 4,5 %.

  • Investir en private equity

Le private equity, ou "capital investissement", concerne l’achat de parts au sein de sociétés non cotées en bourse. Malgré des risques élevés, il offre aussi des potentiels de rendements alléchants. Selon l’association France Invest, le secteur a enregistré en 2021 une performance annuelle moyenne de l’ordre de 12,2 %. Au-delà de ces taux attractifs, le capital investissement permet aussi à l’épargnant d’investir en direct dans des sociétés à dimension environnementale ou sociale. Comme dans l’univers des actions cotées, le secteur prend le pas de l’ESG : d’après une étude du cabinet de conseil PwC, 56 % des sociétés du private equity avaient inclus ce sujet dans leur stratégie en 2021, contre seulement 35 % d’entre elles en 2019.

L'alternative du financement participatif

Le crowdfunding ou financement participatif permet de participer au financement de projets via des plateformes en ligne. Ce financement peut notamment "prendre la forme d’un don, d’un prêt avec ou sans intérêts ou encore d’un investissement en capital", selon le ministère de l’Économie. Certaines plateformes sont exclusivement dédiées à des secteurs spécifiques : Miimosa est par exemple axée sur l’agriculture et l’alimentation, tandis que Lendosphère est positionnée sur la transition énergétique. Selon sa directrice générale Laure Verhaeghe, la plateforme affiche un rendement moyen de 6 %.

Attention : cette liste n’est pas exhaustive. Avant de prendre toute décision d’investissement, veillez à contacter un conseiller financier.