Le réseau des monnaies locales complémentaires (MLC) gagne du terrain en France. Une étude de chercheurs de Sciences Po Lyon et l'Université Lyon 2 recense en 2020 82 monnaies actives sur le territoire. Ces systèmes d'échange existent parallèlement aux monnaies nationales des échanges mondiaux. Utilisées dans des communautés locales, départementales voire régionales, elles favorisent les échanges économiques au sein d'une zone géographique restreinte.
Inspirées par le modèle allemand du Chiemgauer né en 2003 en Bavière ou du Bristol Pound en Angleterre, les premières alternatives ont émergé en France au début des années 2010. Elles ont été encouragées par la loi de 2014 relative à l'économie sociale et solidaire qui leur accorde un statut légal.
Un levier pour valoriser les circuits courts et l'économie locale
Les monnaies locales sont acceptées dans un réseau de commerces de proximité, de restaurateurs et d'associations agréés, qui rémunèreront leurs collaborateurs et prestataires en monnaie complémentaire. En dépensant dans une entreprise du territoire, on lui garantit de pouvoir payer ses salariés, fournisseurs et charges. Chaque partie prenante, y compris les particuliers, devient intégralement actrice de l'économie du territoire sur laquelle elle est implantée. En changeant leurs euros contre une MLC dans des comptoirs de change (souvent 1 euro = 1 MLC), les particuliers contribuent à booster l'économie de leur commune.
À terme, les monnaies locales visent à créer un circuit économique en renforçant les liens entre les acteurs économiques du territoire où elles circulent. Les plus abouties parviennent à tisser de véritables relations entre particuliers, commerçants et fournisseurs. Au Pays-Basque, l'eusko a provoqué chez 56 % des 1300 professionnels adhérents le changement de fournisseurs pour des prestataires basques.
Les conventionnements des professionnels requièrent d'avoir leur siège social au sein du territoire. Par conséquent, les monnaies locales ne participent pas à faire prospérer des multinationales, mais des acteurs locaux aux pratiques éthiques. Juridiquement, elles possèdent le même statut qu'un titre restaurant, impossible donc pour les particuliers de mettre sa monnaie en banque. Les professionnels peuvent la reconvertir en euros moyennant une commission de 5 %. Vouée à circuler sans cesse dans la ville, elle profite aux acteurs locaux dans le financement de leurs besoins.
Une participation démocratique et citoyenne comme point de départ
Naissant d'initiatives de collectifs citoyens engagés, les monnaies locales permettent d'expérimenter une démocratie à petite échelle où les décisions sont prises au consentement. En adoptant une monnaie locale, chacun s'engage dans une démarche citoyenne, au service de la transition écologique, économique et sociale de sa collectivité. Bien qu'elle ne se substitue pas à l'euro mais la complète, elle reconfigure la gouvernance des parties prenantes. Habitants, commerçants, associations, institutions et collectivités : tous participent horizontalement aux décisions de développement de leur monnaie.
Si certaines existent déjà en numérique, un tiers restent sous forme de billets, renforçant le tissu social et encourageant les interactions entre les adhérents : Les commerces, marchés deviennent des lieux de rencontres et de partage.
Se ré-approprier son argent
Les échanges de monnaies locales élargissent dans le même temps la vision sur la circulation monétaire, obscure lors de transactions en euros puisque 3 % des opérations sont réinjectées dans l'économie réelle ; le reste sert à l'achat d'actifs et de titres financiers. Les plus fructueuses, comme au Pays-Basque où plus de 4 millions d'euskos étaient en circulation au printemps 2023, ou le monéko en Loire-Atlantique, permettraient de déjouer la spéculation financière. L'eusko s'impose d'ailleurs comme la première monnaie locale d'Europe, supplantant le Chiemgauer bavarois.
Chaque organisme de gestion de MLC possède un fonds de garantie placé dans une banque éthique et non-spéculative. Pour chaque euro échangé en MLC, un euro est placé en banque, obligée de financer des projets en faveur de la transition écologique et sociale sur la collectivité. La Nef s'est elle-même engagée à doubler le fonds de garantie. Autrement dit, pour 10 000 euros échangés en gonette, stück, florain ou épi, ce sont 20 000 euros de prêts qu'octroie la Nef pour financer des projets sur le territoire de la monnaie utilisée.
Pour connaître la monnaie locale de votre commune, ville ou département, ID a mis à jour la carte des monnaies complémentaires en France et Outre-Mer.
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