Valère Corréard est Directeur d'ID, l'Info Durable
©Clémence Demesme
L'Edito de Valère Corréard

Déclaration de politique générale : la double dette de Michel Barnier

Dans sa déclaration de politique générale, le nouveau Premier Ministre a pu surprendre en associant deux sujets : la dette financière et la dette écologique. Un choix stratégique qui n’était pas forcément attendu par un responsable issu d’une formation politique (LR) traditionnellement peu audible sur les sujets environnementaux. 

Le déficit budgétaire, et les remèdes pour y faire face, était le sujet brûlant sur lequel tout le monde attendait Michel Barnier. Le nouvel hôte de Matignon n’y a pas échappé, mais il a habilement associé la dette financière à la dette écologique, n’hésitant pas à parler de deux "épées de Damoclès". 

Budget et Ecologie sont les deux thèmes que le Premier ministre a décidé d’aborder dans la première partie de son discours de politique générale, en créant un parallèle inattendu. C’est donc une parole offensive sur la question écologique qui a été prononcée, contre toute attente. Une approche (sémantique à ce stade) qui a le mérite de rassurer tant le sujet est à la fois majeur, mais aussi trop souvent une variable d’ajustement politique et financière au gré des crises. 

Un signal fort qu’il faudra traduire dans les faits 

Choisir d’associer ces deux "dettes" est un signal fort qu’il faut mettre au crédit du Premier ministre qui a rappelé son engagement politique à ce sujet, depuis le premier ministère de l’environnement, en passant par ses responsabilités gouvernementales (Environnement, Agriculture) ou européennes. 

Parmi les priorités égrenées, la décarbonation, la protection de la biodiversité, la transition énergétique ou les ressources en eau qui sont autant de sujets majeurs de la transition écologique. Reconnaitre qu’il faut regarder "la réalité de nos comptes publics" mais aussi "la réalité de l’impact de notre mode de vie, de notre économie sur l’environnement " n’est pas neutre pour un chef de gouvernement de droite qui a évoqué pêle-mêle la sobriété, l’innovation et la France des solutions. 

Un sujet incontournable 

S’il fallait une preuve que le sujet est désormais incontournable et transpartisan, c’est fait. Mais qu’est-ce que cela traduit  ? 

D’abord l’urgence. Il faut reconnaitre que mettre l’écologie au même niveau que la dette valide cette idée qu’il faut réagir sans tarder. Il est vrai que l’urgence écologique est "une épée de Damoclès", il faut agir vite, à tous les niveaux et l’échelle régionale ne peut plus s’opposer au global, chaque petit pas compte.  

Ensuite les diagnostics. Monsieur Barnier a voulu poser les grands problèmes environnementaux du moment en évoquant le climat, la biodiversité, l’énergie, l’eau. Il y a bien sûr beaucoup d’autres sujets urgents, mais les thèmes sont majeurs et ont le mérite d’être concrets. 

Enfin, va se poser la question des remèdes. Et c’est là que le discours va être confronté à l’épreuve des faits avec quelques indices déjà formulés : renforcement de la filière nucléaire, simplification des diagnostics de performance énergétique, conférence nationale sur l’eau, décarbonation des usines, développement des énergies renouvelables… Rien de nouveau à ce stade, mais c’est un discours de politique générale, pas un programme législatif. 

C’est à l’aune de la réalité des mesures qu’il faudra faire un examen de la réalité politique de ce discours ambitieux qui place l’écologie en majeure. Le Premier ministre a choisi de citer Pierre Mendès-France qui engageait à "ne jamais sacrifier l’avenir au présent", il disait aussi "l’essentiel, c’est que le pays ne soit pas dupé". 

Valère Corréard 
Directeur de la rédaction d’ID (l’Info Durable),