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En bref

L'UE recycle ses financements pour répondre aux subventions vertes américaines

Des aides d'Etat facilitées et un redéploiement de financements existants: les chefs d'Etat et de gouvernement de l'UE doivent débattre jeudi de leur réponse aux subventions américaines qui menacent l'industrie européenne.

La visite du président ukrainien Volodymyr Zelensky et la situation de l'Ukraine face aux récentes avancées militaires russes devraient accaparer l'essentiel de l'attention médiatique lors de ce sommet à Bruxelles. Elle occupera aussi une grande partie de la réunion qui doit démarrer en milieu de matinée. Mais les dirigeants européens se pencheront en fin de journée sur deux sujets cruciaux qui les divisent: la politique industrielle européenne face à la concurrence chinoise et américaine, ainsi que la gestion des arrivées de migrants aux frontières de l'UE.

Sur l'économie, les Vingt-Sept examineront les propositions de la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen, formulées la semaine dernière. Elle souhaite donner plus de flexibilité aux Etats membres dans l'octroi d'aides aux entreprises impliquées dans les énergies renouvelables (solaire, éolien) et la décarbonation de l'industrie (hydrogène, électrification, efficacité énergétique). Certains investissements dans de nouvelles usines pourraient notamment être soutenus par des "avantages fiscaux". Mais cette mesure, controversée parmi les Vingt-Sept et au sein même de la Commission, devrait être vivement débattue.

Allemagne et France isolées

Le carcan des subventions nationales est déjà assoupli depuis le début de la pandémie en 2020. L'ouvrir encore risque de profiter aux grands pays riches, essentiellement l'Allemagne et la France, qui pourraient favoriser de façon excessive leurs entreprises au détriment de leurs concurrentes de l'UE.

L'Italie et plusieurs "petits" pays dont l'Autriche, le Danemark et la Finlande mènent une fronde pour un mécanisme le plus ciblé et limité possible, au risque de le rendre insignifiant. "Sur ce sujet, ce sera toujours 25 pays contre" la France et l'Allemagne, ironise un diplomate européen. Les consultations vont se poursuivre en vue de décisions attendues en mars. Pour atténuer le risque de fragmentation du marché unique, certains Etats membres, France et Italie en tête, réclament de nouveaux financements communs.

Mme von der Leyen a promis de proposer avant l'été un fonds de souveraineté européen qui permettrait d'investir dans la recherche ou le capital d'entreprises stratégiques. Mais l'idée est rejetée par plusieurs pays comme l'Allemagne, les Pays-Bas ou la Suède, hostiles à toute augmentation de leur contribution au budget de l'UE. Pour l'instant, la Commission table sur la mobilisation de fonds existants, notamment le plan de relance européen à 800 milliards d'euros (NextGenerationEU) dont 250 milliards pourraient être consacrés à la transition verte.

En incluant d'autres fonds déjà débloqués, l'UE n'est pas loin des 370 milliards de dollars annoncés par les Américains dans leur plan climat adopté l'été dernier, a affirmé mercredi le chancelier allemand Olaf Scholz devant les députés à Berlin. "L'Europe n'a pas à rougir", a-t-il affirmé. Plusieurs pays s'opposent à mentionner le fonds de souveraineté dans les conclusions du sommet. Mais "il sera bien présent" assure-t-on à l'Elysée. Paris entend convaincre de sa nécessité au terme d'une évaluation des besoins de financements qui sera menée par la Commission.

Murs et barbelés

Les débats ne seront pas moins vifs sur la politique migratoire, revenue en haut de l'agenda européen avec l'augmentation des demandes d'asile en 2022 qui met les systèmes d'accueil de plusieurs pays sous pression. Les dirigeants discuteront d'un contrôle renforcé des frontières extérieures et de la coopération avec les pays d'origine et de transit des migrants, dans le but de faire baisser les arrivées irrégulières et d'augmenter les expulsions.

La question des clôtures devrait être abordée, plusieurs pays dont l'Autriche réclamant qu'elles puissent être payées par le budget de l'UE. La Commission a jusqu'à présent refusé le financement de "murs et de barbelés" mais pas celui d'"infrastructures" de surveillance comme des caméras ou détecteurs de mouvement. Pour inciter les pays d'origine à reprendre leurs ressortissants en situation irrégulière, les dirigeants sont convenus d'utiliser "tous les outils" disponibles, y compris des mesures restrictives en matière de délivrance de visas. Près de sept ans après la crise des réfugiés de 2015-2016, les pays de l'UE butent toujours sur une réforme visant à assurer une meilleure répartition des responsabilités dans l'accueil des demandeurs d'asile.

Avec AFP.