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To do du week-end

"Imaginer, créer, tester, s’amuser" : petite leçon pour un musée nouvelle génération

Dimanche 6 avril à la Maison Folie Moulins (Lille), l’association Museomix nous apprend à réinventer les musées. Interview avec Émilie Blondeau, référente dans le Nord.

Une bonne dose de nouvelles technologies, un soupçon de DIY (do it yourself), quelques louches de participation citoyenne et un brin d’inventivité : depuis 2011, l’association Museomix organise des hackathons… dans les musées. Chaque année vers la mi-novembre, près d’une quinzaine d’institutions culturelles de plusieurs villes françaises (et internationales) ouvrent leurs portes à un marathon créatif de trois jours, où citoyens et experts expérimentent de nouvelles façons de penser les musées.

Ce dimanche, un “mini-Museomix” aura lieu au Musée numérique de la Maison Folie Moulins, à Lille, pour présenter le concept aux curieux. Émilie Blondeau, référente de l’association dans le Nord, revient sur l’importance de créer un “circuit court” de la culture

Le musée est surtout un prétexte à réfléchir ensemble sur ce qui nous entoure…

Ça consiste en quoi, un Museomix ?

C’est un brainstorming géant de trois jours dans un musée. L’idée, c’est de faire participer le public pour inventer ensemble de nouveaux dispositifs de médiation numérique ou utilisant les nouvelles technologies (la réalité virtuelle, les hologrammes, les imprimantes 3D…). Ce qui est intéressant, c’est qu’on a tous les profils – des étudiants et des professionnels, des experts, etc. – mais aussi toutes les compétences : des passionnés de machines à coudre, des joueurs de flûte, des jongleurs…! Les participants sont réunis par équipes de 5, plus un coach. L’objectif étant d’avoir finalisé un prototype à la fin du week-end.

Il arrive que certaines idées soient même pérennisées ensuite : à la Manufacture de Roubaix en 2015, une équipe a réalisé une carte de la ville qui retraçait l’histoire du textile en découpe laser sur du bois, avec des miniatures d’usines qui étaient en fait des boutons poussoirs qui permettaient de lancer un hologramme racontant l’histoire de chaque usine. Le projet était assez abouti, il a été ensuite présenté à un concours et a reçu 10 000 euros en lien avec l’office du tourisme !

Nous ne voulons pas “révolutionner” mais donner un nouveau regard, remettre en scène, proposer une autre expérience du musée.

Pourquoi les musées ont-ils besoin d’être remixés ?

Museomix est né de geeks, qui travaillaient dans des start-up numériques, à l’époque où apparaissaient les premières imprimantes 3D, etc. Toutes ces nouvelles technologies que les musées ont mis plus de temps à venir chercher. Parfois, les institutions sont un peu cloisonnées dans leur train-train. Notre but, c’est de travailler avec plusieurs compétences hors du champ culturel, des graphistes, des codeurs, des fabricants… qui vont apporter une ouverture d’esprit, soit à des musées qui n’ont pas vraiment d’outils de médiation à cause d’un petit budget, soit à ceux qui ont les moyens mais à qui il manque une sensibilité ou une dimension ludique. Dans le Nord, à Arkéos il y a deux ans, ils étaient gênés de nous avouer “Le dimanche, normalement, y a deux personnes…” et finalement il y a eu une centaine de personnes lors de l’événement Museomix – dont des Douaisiens qui habitent là depuis toujours mais n’y étaient encore jamais allés.

La solution vient-elle nécessairement du numérique ?

Non, d’ailleurs les musées nous font aussi comprendre que le numérique pose beaucoup de problèmes logistiques : si une tablette bugge, on fait quoi ? Qui rappelle qui ? Ça peut aussi coûter cher, par exemple les Oculus cassés au bout de deux mois à cause des enfants qui n’ont pas la même notion de fragilité.

Chez Museomix, on insiste surtout sur le concept. Les nouvelles technologies offrent des possibilités pour voyager dans les œuvres ou dans les archives, avec de l’immersion sonore, juste de l’éclairage, une nouvelle scénographie… mais on n’est pas contre des prototypes qui n’utilisent pas de numérique, tant qu’il y a une interaction intelligente avec le public. Au Muséum d’histoire naturelle de Lille, en 2014, il y a eu un jeu réalisé simplement avec des ossements et de la peinture, pour apprendre à recréer un squelette. Nous ne voulons pas “révolutionner” mais donner un nouveau regard, remettre en scène, proposer une autre expérience du musée.

Au-delà des amateurs de nouvelles technologies, c’est une démarche et une action citoyenne.

N’est-ce pas dangereux d’essayer à tout prix de “disrupter” la culture ?

Attention, on ne dit pas que les musées sont barbants et qu’on s’y ennuie. Museomix est ancré dans cette mouvance du collaboratif, du participatif, du circuit court… En fait, le musée est surtout un prétexte à réfléchir ensemble sur ce qui nous entoure. À réfléchir ensemble au “design de services”, c’est-à-dire : je suis un habitant ou un utilisateur, comment apporter une nouvelle dynamique à des établissements que je côtoie souvent ? Ça pourrait même concerner des restaurants, des hôpitaux. D’ailleurs, l’initiative a ensuite donné naissance à des Bibliomix (dans des bibliothèques), des Gare Remix (dans des gares), des Édumix (dans les lieux d’enseignement)… Au-delà des amateurs de nouvelles technologies, c’est une démarche et une action citoyenne. Et l’énergie que ça procure !

Conférence “Imaginer, créer, tester, s’amuser”
Dimanche 6 avril 2018 de 16h à 17h
Musée numérique, Maison Folie Moulins
47 rue d'Arras 59000 Lille
Pour plus d'informations, cliquez ici.

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