Le secteur de la mode est la deuxième industrie la plus polluante du monde.
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Tribune

Slow fashion : initiatives durables "réelles" ou greenwashing ?

Slow fashion, mode durable, marques éthiques… Deuxième industrie la plus polluante au monde, le secteur de la mode a pris un virage à 180° ces dernières années.

Alors que de nouvelles marques fleurissent un peu partout en France en prônant une mode plus engagée, les grandes enseignes proposent elles aussi de nouvelles collections éco-responsables pour répondre aux attentes des consommateurs de plus en plus sensibles aux questions environnementales. Alors comment distinguer une initiative éco-responsable d'une opération marketing de greenwashing ? Zoom sur ce qui définit la mode durable aujourd'hui.

La slow fashion, un phénomène de mode 

Ces dernières années, les différentes crises environnementales ont contribué à une prise de conscience de la part des citoyens : ils souhaitent désormais privilégier une fabrication française ou Made-in-Europe, dans le respect des conditions de travail des salariés, avec une composition des produits durable et sans substances toxiques. 2 Français sur 3 affirment que l’engagement des marques et des entreprises en matière de développement durable constitue un critère de choix important au moment de leurs achats d’habillement. 60% d’entre eux sont même prêts à boycotter une marque qui ne produit pas de vêtements équitables. De plus en plus d’influenceurs s’engagent aussi pour une mode durable, en préconisant la mise en place de dressing minimaliste, en partageant des conseils pour shopper mieux et moins ou encore en proposant des ootd (Outfit of the Day) provenant de friperies. 

Alors pour répondre aux attentes des consommateurs qui sont de plus en plus exigeants quant aux processus de fabrication des articles de mode, les marques lancent de nouvelles collections plus éthiques : matières recyclées ou matériaux innovants à base de végétaux, tout est fait pour séduire cette nouvelle clientèle éco-sensible. Pour autant, les grandes enseignes proposent toujours pléthore de collections par an, avec quantité d’articles de mode. En moyenne, les géants de la fast fashion proposent pas moins de 52 collections chaque année vs un rythme historique des marques qui s’élevait à 4 collections par an (une collection par saison). 

Aujourd’hui, il existe de nouvelles alternatives à la fast fashion, qui misent sur le recyclage, l’upcycling et la seconde main, sans que ces engagements représentent forcément une démarche marketing. 

Or, si une grande enseigne de prêt-à-porter propose une nouvelle gamme durable de vêtements conçus en matière recyclée, est-ce que cela compense l’arrivée d’une nouvelle capsule toutes les deux semaines ? De même, pour les nouvelles marques qui proposent des modèles de baskets en ananas, est-ce que le choix du matériau est suffisant pour parler de marque durable ? Quid du lieu de fabrication, du choix du matériaux qui peut provenir du Costa Rica ou du Brésil, ou encore de la proportion de matière végétale et recyclée dans la chaussure ? Oui la slow fashion est un phénomène de mode actuel, mais les entreprises ne doivent pas seulement se contenter de répondre aux attentes des Français. Elles doivent aussi entamer une vraie démarche à impact positif pour que la marque ait du sens.

Recyclage, upcycling et seconde main, les nouveaux engagements des marques.

Aujourd’hui, il existe de nouvelles alternatives à la fast fashion, qui misent sur le recyclage (action de récupérer des déchets et de les réintroduire, après traitement, dans le cycle de production), l’upcycling (qui désigne le procédé par lequel on fabrique un objet de valeur à partir de matériaux de récupération initialement destinés à être recyclés ou détruits) et la seconde main (un produit d’occasion, qui n’est pas neuf), sans que ces engagements représentent forcément une démarche marketing. 

Ces nouvelles marques vertueuses proposent des produits durables et pensés sur toute la chaîne (choix des matières, conception, durabilité et traçabilité des produits) pour avoir l’impact le plus faible possible sur la planète : recyclage de chutes issus de l’industrie textile, utilisation de déchets végétaux, transformation de vieilles chaussures en semelles, mais aussi revente d’articles d’occasion à prix réduits… Elles choisissent également d’être transparentes sur la composition des produits vis-à-vis du consommateur (vendre des lacets en bouteilles plastiques recyclées ne veut pas dire que la basket est éco-responsable par exemple) et font le choix de ne pas proposer des collections à outrance, ni de lancer des programmes fidélité ou de faciliter les retours, pour ne pas encourager à la consommation et toujours dans l’objectif de réduire leur empreinte carbone. 

La budget innovation pour ces nouveaux articles éco-conçus, est plus élevé pour ces nouvelles marques que pour les grandes enseignes qui lancent un seul modèle ou capsule plus écologique pour l’environnement. Pour la plupart, elles font fabriquer leurs articles de mode en France ou en Europe, où il existe un grand savoir-faire que ce soit dans le prêt-à-porter ou dans la maroquinerie, mais aussi des lois plus strictes pour réglementer les conditions de travail des salariés. Par ailleurs, la plupart sont reconnues par les labels anti-greenwashing : GOTS, PETA, Oeko-Tex... Ces certifications visent justement à différencier les marques éco-responsables des marques qui pratiquent le greenwashing. 

Les marques doivent dorénavant penser à l’impact positif que doivent avoir la conception et la fin de vie du produit, pour pouvoir répondre aux exigences des consommateurs. Cependant, elles ne sont pas les seules responsables du fléau que représente la fast fashion aujourd’hui. C’est aussi le rôle du citoyen de s’éduquer, de se responsabiliser vis-à-vis de sa consommation, de réduire progressivement ses achats, d’acheter les produits au prix juste et de penser à l’impact que ceux-ci peuvent avoir sur la planète (fabrication, transport etc). Il est nécessaire d’éduquer les prochaines générations à réfléchir avant d’acheter. La méthode BISOU est un bon moyen mémotechnique pour se diriger vers une consommation responsable : B comme besoin (à quel besoin cet achat répond-t-il ?), I comme immédiat (puis-je attendre quelques jours avant de l’acheter ?), S comme semblable (ai-je déjà un objet de cette utilité ?), O comme origine (quel est l’origine du produit ?) et U comme utile (cet objet va-t-il m’apporter un confort primordial ?). Finalement, “Les baskets les plus écologiques sont celles que vous portez déjà”, doit devenir le nouveau mantra de tout un chacun. 

Par Marie Viard-Klein, fondatrice de Minuit sur Terre.