"Vivre ensemble, chacun chez soi", tel est le crédo de l’habitat participatif. Peu connue il y a dix ans, cette nouvelle manière d’habiter regroupe plusieurs foyers (seul, en couple ou en famille) qui choisissent de vivre dans des appartements ou maisons séparés tout en partageant des espaces communs (jardin, buanderie, atelier de bricolage...). A mi-chemin entre la colocation et la copropriété, ce mode d’habitat gagne du terrain en France. Le réseau Habitat participatif France recense notamment 1 000 projets finalisés et en cours. La moitié en ville et l’autre à la campagne.
"Il y a une accélération significative. On note une croissance moyenne de 20 % depuis 2018”, indique Paola Hartpence, responsable du programme “habitat participatif et seniors” pour Habitat participatif France. Si l’habitat participatif séduit tous les âges et les profils, il reste plus plébiscité chez les retraités ou futurs retraités. Selon Habitat participatif France, deux tiers des candidats sont des séniors. Plusieurs raisons peuvent expliquer cet intérêt grandissant, à commencer par la dimension sociale d’une telle expérience, comme en témoigne Silou.
A la retraite depuis cinq ans, cette ancienne infirmière et psychologue a choisi de rejoindre un habitat participatif à Mallemort (Bouches-du-Rhône). "Cette forme d’habitat m’intéresse depuis plus de trente ans. Quand je suis partie à la retraite, je me suis dit que c’était le bon moment pour participer à ce type de projet. J’avais envie d’expérimenter la vie en collectivité et d'essayer de créer une société qui ne se tape sur la figure", sourit cette retraitée avant d’ajouter : "je trouve aussi que c’est une richesse de pouvoir cohabiter avec des personnes venant d’horizons différents."
Rester acteur
Pour Jeanne Meunier, retraitée et future résidente des Pipistrelles de la Durance à Forcalquier (Alpes-de-Haute-Provence), le maintien de liens sociaux avec d’autres générations pèse également dans la balance. "C’est important car cela permet de rester dynamique", observe-t-elle. Même son de cloche du côté de Françoise Brière, membre du projet Kergoëlo à Binic-Etables-sur-Mer (Côtes-d’Armor). "Dès le début, je voulais que notre habitat participatif mêle plusieurs générations. Je voulais de la vie, de la joie, du dynamisme. Le contact avec des familles permet aussi de rester plus actif en organisant notamment des activités communes", détaille-t-elle.
A l’approche de la retraite, certains voient aussi dans l’habitat participatif une possibilité de rester aux manettes et de conserver une forme d’autonomie.
Quand on choisit de se lancer dans cette aventure, on est impliqué à toutes les étapes du projet, de la conception à la gestion, en passant par la construction", précise Paola Hartpence du réseau Habitat participatif France.
Parmi les autres avantages : l’entraide, le partage et la mutualisation des moyens. En dehors des habitations qui restent privatives, la plupart des habitats participatifs mettent en commun différents espaces : jardin, buanderie, débarras...qui sont autogérés. "Nous avons mis en place un système de gestion pour l’entretien des parties communes. Tous les mois, deux foyers sont par exemple de service de poubelle et deux autres de ménage”, éclaire Claire Meyer, habitante des Castors de Cret de Roc, à Saint-Etienne (Loire).
"Eviter à tout prix l’Ehpad"
Un investissement qui peut toutefois poser problème en cas de perte de mobilité. Consciente de cet aspect, cette future retraitée a décidé de créer avec un groupe d’amis un nouveau projet d’habitat participatif, cette fois monogénérationnel. "On se projette davantage dans le vieillissement avec la possibilité de mutualiser des aides à domicile. On imagine aussi des logements adaptables. L’idée est d’éviter à tout prix l’Ehpad", confie-t-elle.
Si l’habitat participatif offre de nombreux bénéfices, l’accès à ce mode d’habitat n’en demeure pas moins semé d’embûches. Pour Jeanne Meunier, la durée de montage d’un projet est l’un des principaux points noirs. "En moyenne, il faut compter entre quatre et cinq ans. Si ce temps long peut se révéler utile pour la maturation d’idées, il peut aussi engendrer du stress. On se demande si les chantiers vont aboutir ou si les gens vont rester", raconte-t-elle. Les démarches administratives constituent un autre frein, notamment lorsque les porteurs de projets choisissent l’autopromotion.
Les banques sont encore frileuses pour accorder des prêts. Cela reste aussi difficile d’avoir des liens avec les institutions et les opérateurs immobiliers”, poursuit Paola Hartpence du réseau Habitat participatif France.
Encore peu démocratisée, cette alternative apparait pourtant comme une réponse prometteuse à l'heure de la crise du logement mais aussi face aux enjeux du vieillissement de la population. Alors qu'en 2024 les plus de 65 ans seront plus nombreux que les moins de 15 ans en Europe, la question du "bien vieillir" s'impose.
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