Le terme écofascisme est "fourre-tout" d'après l'historien Stéphane François.
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Politique

Définition, origines...Qu'est-ce que le mouvement écofasciste ?

Depuis de nombreuses années l’extrême droite adopte des discours qui prônent le localisme, le respect de la nature et un retour à la terre et aux racines. Quelles sont les origines de l'écologie d'extrême droite ? Comment évolue-t-elle à l'ère des réseaux sociaux ? Décryptage avec l'historien et politologue Stéphane François, spécialiste de l'écologie à l'extrême droite.

Des théoriciens de la Nouvelle Droite dans les années 1980 au terroriste de Christchurch en Nouvelle-Zélande qui se revendiquait "écofasciste" en 2019, quelles sont les origines et l'évolution de la pensée écologique à l'extrême droite ? ID fait le point.

Un positionnement anti-moderne dès les débuts

Des mouvements naissent en France depuis les années 1980. D’après Stéphane François, c’est la Nouvelle Droite et ses théories très construites qui ouvrent la voie. “Le discours écologique apparaît à la fin des années 1970. Les théoriciens de la Nouvelle Droite vont se référer à des auteurs de la révolution conservatrice allemande, comme Ernst Jünger, Oswald Spengler et pour ce qui est de l’écologie à Martin Heidegger", détaille l’historien et politologue Stéphane François, spécialiste de l’écologie à l’extrême droite.

Ils adoptent un positionnement anti-moderne qui s’allie à la défense de la civilisation européenne et à l’éloge de l’enracinement local. Ils prônent également un retour au paganisme - ces religions polythéistes pré-christianisme comme celles des celtes ou des romains qu’ils jugent plus respectueuses de la nature. Ce mouvement est également très critique envers les Lumières et la technique. “Ce discours a des aspects écologiques de gauche comme le refus de la société de consommation”, relève l’historien Stéphane François. À la fin des années 1980, le sillon est creusé.

L'apparition d'un discours identitaire dans les années 2000

Les années 2000 voient émerger dans cette mouvance le discours identitaire qui entend préserver la race blanche et européenne à travers le monde. C’est là qu'apparaît la théorie du grand remplacement portée par l’écrivain français Renaud Camus. Certains groupuscules adoptent ces préceptes. Ils investissent les campagnes pour en faire des ZID, “zone identitaire à défendre” comme disait Clément Martin, porte-parole de Génération Identitaire, dans un article du 14 septembre 2020. Des projets naissent alors comme l’association Des racines et des Elfes, qui depuis 2009, entend “rendre leur fierté et leur dynamisme aux Européens” et effectuer un “travail de réveil et de réenracinement”. Ces partisans achètent donc des fermes dans la Nièvre pour vivre en communauté dans un cadre bucolique mais excluant.

C'est aussi à cette période qu'apparait le mot écofascisme, sous la plume de l'écrivain et polémiste finlandais Pentti Linkola. Selon lui, la surpopulation est la cause de tous les maux de la planète. Mais, pour l’historien et politologue Stéphane François, il s'agit d'"un terme fourre-tout”. "Les militants d’extrême droite, faisant référence à des auteurs de la mouvance, ne se disent jamais écofascistes. Quelques milieux mis à part, le terme fasciste est négatif", explique-t-il.

Des mouvements qui se propagent sur internet 

L’écologie d’extrême droite connaît une résurgence avec le développement d’Internet. “Autrefois pour avoir accès à des publications d’extrême droite, il fallait faire un certain nombre de démarches auprès de maisons d’édition et laisser son nom et son adresse”, indique Stéphane François. Aujourd’hui, la pensée néonazie ou identitaire est à portée de main, avec seulement quelques mots clefs et un moteur de recherche. “Il y a une démultiplication des accès à ce type de discours et la possibilité de rencontrer, via ces forums, des personnes qui partagent les mêmes idées. Internet est un excellent moyen pour s’auto-radicaliser”, poursuit le spécialiste. Des forums tels que 4chan et 8chan abritent de nouveaux partisans qui se réclament de l’écofascisme. C’est le cas de Brenton Tarrant, auteur des attentats perpétrés en 2019 dans plusieurs mosquées à Christchurch en Nouvelle-Zélande. Au total, 51 morts et un manifeste de 74 pages publié sur le 8chan avant son passage à l’acte. 

L’homme convoque diverses références comme le Lorax, célèbre ouvrage pour enfant de 1971, du dessinateur américain Dr. Seuss qui prône un activisme environnemental. Toutefois, cette référence n’a rien à voir avec le fascisme ou même l’extrême droite en général. Comme en témoigne un article de la BBC daté du 2 mars 2019, le dessinateur portait un engagement antifasciste. Il s’agit alors d’une réappropriation récente de la part de Brenton Tarrant. Le jeune homme cite également Pentti Linkola, inventeur du terme écofascisme, et Renaud Camus, théoricien du grand remplacement. On retrouve l’idée selon laquelle la “race blanche” devrait faire face à une population de couleur supérieure en nombre, responsable de tous les maux, sociaux, économiques mais aussi environnementaux. 

Internet permet également de créer des liens entre les différents courants d’extrême droite à travers le monde. “Nous avons la preuve que Brenton Tarrant a financé Génération Identitaire (mouvement d'extrême droite français), il y a donc une internationalisation des réseaux,” constate Stéphane François. 

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