Caroline Francois Marsal, responsable Europe pour l'ONG Action Climat.
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Politique

Européennes : "c'est un mauvais signal que les Verts soient moins nombreux dans l'hémicycle"

Les Verts ont vu leur nombre de sièges diminuer au Parlement européen depuis les élections, la semaine dernière. Un constat qui inquiète les ONG qui oeuvrent pour la transition écologique. Rencontre avec Caroline Francois Marsal, responsable Europe pour Action Climat.

La récente diminution des sièges des Verts au Parlement européen suscite des inquiétudes parmi les défenseurs du climat. Caroline Francois Marsal, responsable Europe pour le Réseau Action Climat, nous éclaire sur les raisons principales de cette baisse et ses conséquences.

Pour vous, quelles sont les raisons principales de la diminution des sièges des Verts au parlement européen, et quelles seront ses conséquences ? 

On peut l'évaluer à deux niveaux, Européen et Français. Pour ce qui est de la campagne Française, les débats ont été circonscrits entre Renaissance et le Rassemblement National, deux partis qui n'ont pas fait du climat une priorité dans ces élections.

Pour le Rassemblement National, c'est même un sujet d'opposition puisqu'ils demandaient la fin du Green Deal dans leur programme.

Pour le Rassemblement National, c'est même un sujet d'opposition puisqu'ils demandaient la fin du Green Deal dans leur programme. Un sondage CEVIFOP montre que les Français ont considéré que l'enjeu climatique a été sous-traité pendant cette campagne par apport à d'autres enjeux, comme l'immigration qu'ils jugeaient sur-traités par les médias. Quota Climat montrait que le temps d'antenne sur le climat a été considérablement réduit.

Pour ce qui est dû au niveau global européen des partis comme le PPE (Parti Populaire Européen), -parti dans lequel siègent les LR et l'extrême droite-, ils diffusent des narratives depuis plusieurs mois voir plusieurs années qui expliquent que les normes environnementales européennes causent de la décroissance agricole et que ces normes sont néfastes pour la compétitivité et la résilience des états européens. Ils ont réussi à gagner ce débat alors que c'est faux. Les normes de la PAC permettent de préserver la biodiversité, de rendre les sols plus résilients face aux effets du changement climatique ce qui permet d'empêcher la baisse du rendement des climats.

En tant qu'ONG, êtes-vous inquiets de cette baisse de siège chez les Verts au Parlement ?

Cela nous inquiète effectivement dans le sens où ils auront moins de marge pour faire pression sur les majorités que va choisir le Parti Populaire Européen et sur le contenu du programme de travail que va présenter la candidate à la présidence de la commission européenne dans les prochaines semaines. On a quand même évité le pire... Le PPE, les libéraux et les socialistes ensemble obtiennent la majorité arithmétique. On aurait pu être dans un scénario ou le PPE aurait dû se tourner vers les partis d'extrême droite pour faire majorité, et là ce n'est pas le cas. Demain, cela dépendra des négociations entre ces trois partis pour savoir vers quel chemin ils se tournent : vers des partis qui s'opposent au pacte vert ou pas. On le saura dans les prochaines semaines, les tractations ont déjà débuté au Parlement.

Heureusement, il n'y a pas que les Verts qui portent ces enjeux, bien que symboliquement, ce soit un signal mauvais que de diminuer leur nombre de sièges dans l'hémicycle.

Quels sont vos leviers d'actions ?

En amont des élections nous avons décrypté les programmes des différents partis et leurs propositions sur leur climat. Heureusement, il n'y a pas que les Verts qui portent ces enjeux, bien que symboliquement, ce soit un signal mauvais que de diminuer leur nombre de sièges dans l'hémicycle. Malgré tout, nous allons continuer à porter nos priorités pour la prochaine mandature notamment sur le besoin de développer le pacte vert tout en continuant à développer des financements publics et privés.

ll faut aller sur les aspects du Green Deal manquant comme le verdissement de l'agriculture, la mise en place de mesures de sobriété énergétique et matérielle pour réduire notre consommation de matière première, chose qui n'est pas traité par le cadre législatif européen et sans laquelle on ne pourra pas décroître suffisamment les émissions de gaz à effet de serre. Ce contexte de majorité sera plus difficile pour nous puisqu'on aura moins de pression sur les majorités, notamment avec le PPE qui a fait campagne contre un certain nombre de lois du green deal et sur l'agriculture où ils ont contribué à détricoter les conditionnalités environnementales de la PAC. Ils se sont aussi largement opposés au règlement pour bannir les pesticides en 2030. On comprend également qu'en Allemagne, les libéraux poussent fortement pour annuler la vente de moteurs thermiques neufs en 2035. Cela pourrait rentrer sur la table des négociations pour la formation d'une majorité. Ce serait vraiment terrible parce que le transport est le premier secteur d'émission de gaz à effet de serre en Europe.