Alors que la France a annoncé la fin des emballages plastiques pour la plupart des fruits et légumes pour 2022, la pollution plastique reste encore un enjeu environnemental préoccupant, notamment pour la préservation des océans. Avec ses expéditions scientifiques en mer, la Fondation Tara Océan cherche à étudier l’ampleur de la pollution liée aux microplastiques. ID s'est entretenu avec Jean-François Ghiglione, directeur de recherche au CNRS à l'Observatoire océanologique de Banyuls-sur-Mer, et engagé avec Tara Océan depuis 2010. En ce moment, il participe à une expédition intitulée Microbiomes qui va durer deux ans.
Pouvez-vous rappeler ce qu'est un microplastique ?
Le premier critère de définition concerne la taille : ce sont tous les plastiques inférieurs à 5 millimètres. Il s’agit à 70% de plastiques secondaires car ils sont issus de la fragmentation des grands plastiques. Si on prend par exemple une bouteille en plastique, elle va se casser en morceaux sous l’effet des UV, des vagues et de l'abrasion, et disperser les microplastiques dans l'environnement.
On considère aujourd'hui qu'il y a près de 30 000 tonnes de microplastiques dans les océans."
Nous avons également entre 15 et 30% de microplastiques primaires, qui eux viennent directement de la fabrication. Nous avons fait remonter ce constat au gouvernement pour interdire notamment les microbilles qui sont utilisées dans les cosmétiques, et dont la majorité contient du polypropylène, un dérivé du pétrole. Tara Océan travaille actuellement sur des alternatives à base de noyaux d'abricot ou du riz, qui sont plus naturels.
Si les microplastiques primaires sont progressivement interdits, leur impact sur l'environnement est encore conséquent. On considère aujourd'hui qu'il y a près de 30 000 tonnes de microplastiques dans les océans.
Cet article est extrait de notre dossier : "Comment vivre presque sans plastique ?". A découvrir ici !
Quels risques causent-ils pour l’environnement et la santé humaine ?
Des zooplanctons aux baleines, les microplastiques se retrouvent à tous les échelons de la chaîne alimentaire en mer. En les avalant, les animaux souffrent de malnutrition et n'arrivent plus à se nourrir.
A l'intérieur de ces plastiques, on retrouve également des perturbateurs endocriniens. Ceux-ci affectent tout ce qui régule l’organisme, notamment la croissance ou le métabolisme.
Enfin, nous faisons actuellement des essais sur le caractère pathogène de ces microplastiques qui vont se balader partout dans le monde. Pour l’instant il n’y a pas d’effet constaté sur les humains, mais ils peuvent transmettre des maladies d'un animal à un autre, et donc entraîner des pandémies comment celle que nous subissons actuellement. Nous étudions donc l’impact des microplastiques sur les habitats naturels et la manière dont ils peuvent perturber durablement les écosystèmes.
Selon les dernières estimations scientifiques, la pollution plastique sera multipliée par 3 d'ici 2040 si l'ont de fait rien de plus"
Que faut-il faire pour limiter, voire empêcher la prolifération des microplastiques ? Les lois actuelles sont-elles suffisantes ?
Il y a déjà eu des directives importantes sur le plastique, notamment sur les pailles ou la vaisselle à usage unique. Pour les microplastiques, il reste encore des efforts importants à réaliser. Selon les dernières estimations scientifiques, la pollution plastique sera multipliée par trois d'ici 2040 si l'on ne fait rien de plus. Cependant, il est également possible de réduire de 80% ces déchets dans la même période en agissant sur les trois acteurs principaux de l’économie.
Le premier ce sont les industriels, qui doivent trouver des alternatives aux emballages plastiques et s’adapter aux règlementations. Ensuite, il y a les consommateurs qui doivent réduire leur consommation de plastique en limitant les achats emballés, qui représentent 40% de la production mondiale. Enfin, il y a le recyclage, qui est encore trop insuffisant : seulement 30% des déchets sont recyclés, 40% sont brûlés et dans les 30% qui restent, la moitié part dans les pays en développement pour y être amassés.
Toutefois, on constate qu’il y a une vraie prise de conscience avec les règlementations qui sont mises en place, notamment en Europe et en Amérique du Nord. Je n’ai jamais vu un tel engouement pour lutter contre cette pollution, alors que j’ai aussi travaillé sur le pétrole, les pesticides et les métaux lourds. Il y a par exemple la Convention de Bâle pour réguler l’export de déchets des pays riches vers les pays en développement. Mais dans l'ensemble, j'ai plutôt tendance à dire qu'il faut agir au niveau du consommateur, parce que c'est lui qui peut agir tout de suite par ses choix de consommation.
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