84 % des valises endommagées ne sont jamais réparées. Afin d’éviter qu’elles ne finissent à la poubelle, Dot-Drops a lancé une gamme de produits de voyage durable et réparable. Pour ID, son co-fondateur Julien Ehret revient sur les objectifs de cette marque de "bagagerie positive", mais aussi sur les tendances du marché de la valise en France.
Comment se porte le marché de la valise en France ?
C’est un marché directement lié à ceux du tourisme et des déplacements professionnels, les années 2020 et 2021 ont vu les ventes de valises plonger de 70% mais depuis l’année dernière on retrouve les niveaux de vente d’avant-Covid. Il n’existe aucune statistique officielle du nombre de valises vendues chaque année en France. Cependant, en recoupant plusieurs sources, on peut l’estimer à plus de 5 millions de valises vendues chaque année.
L’enjeu des marques conventionnelles est plus de créer la nouveauté en lançant plusieurs collections par an permettant ainsi de solder les anciennes pour inciter à l’achat.
C’est un secteur dont les acteurs sont déjà engagés sur la voie de la transition ?
Pas exactement car c’est un marché de volume linéaire où ce qui est recherché avant tout c’est la baisse du coût de production. Beaucoup de marques ont référencé une collection produite à partir de matière recyclée, mais cela reste à la marge. Il s'agit plus d'un effet marketing que d'une véritable démarche de gain environnemental.
L’enjeu des marques conventionnelles est plus de créer la nouveauté en lançant plusieurs collections par an, permettant ainsi de solder les anciennes pour inciter à l’achat. Plus de 50% des ventes valises sont réalisées pendant les périodes promotionnelles, ce qui n’est pas compatible avec la transition écologique.
Même s’il paraît évident que pour moins polluer, il faut moins consommer, nous, consommateurs, avons toutes et tous perdu ce bon sens car cela fait des décennies qu’on nous pousse à remplacer au lieu de conserver et de réparer pour faire durer.
Qu’est-ce qui vous différencie des autres acteurs ?
L’ADN de Dot-Drops depuis sa création en 2008 est la sobriété, en ne proposant qu’un seul design qui d’ailleurs est toujours celui de la valise actuelle. Lorsque j’ai fait pivoter la marque en 2019, je me suis appuyé sur cet ADN de design durable pour entamer l’écoconception d’une valise réparable à l’infini. Notre conception produit n’est plus guidée par le gain de marge, mais par le gain environnemental avec pour conséquence :
- Une collection unique à notre catalogue
- Une politique du prix juste toute l’année
- Une offre circulaire où nous nous engageons à recycler 100% des valises vendues.
Notre offre est native de l’écoconception car nous sommes complètement sortis du modèle de volume linéaire, ce qui est impossible pour une marque traditionnelle ou alors sur plus d’une décennie !
La durée de vie est un argument clé de votre offre ?
Effectivement, mais je parlerai plus de "durabilité", qui prend également en compte l’usage et l’entretien de sa valise, car cela joue énormément dans la durée de vie du produit. Même s’il paraît évident que pour moins polluer, il faut moins consommer, nous, consommateurs, avons toutes et tous perdu ce bon sens car cela fait des décennies qu’on nous pousse à remplacer au lieu de conserver et de réparer pour faire durer.
Il faut que le consommateur s’habitue à repenser son rapport aux objets et à payer le juste prix s’il veut être plus responsable ?
Oui c’est certain, car un objet durable et écoconçu est plus cher à l’achat qu’un équivalent en entrée de gamme. Cependant, à l’usage, le premier peut s’avérer plus économique si on additionne le nombre de produits neufs achetés à période d’usage équivalente.
Pour moi le principal enjeu est celui de son rapport aux objets. Les marques nous poussent à remplacer pour avoir toujours la dernière nouveauté comme Apple par exemple ou encore à accumuler des vêtements dans nos placards qui pour 66% ne sont portés que quelques fois. Il faut se forcer avant chaque achat à se poser les bonnes questions :
- Ai-je vraiment besoin de cet objet ?
- Cet objet est-il de qualité pour durer dans le temps ?
- Est-il réparable ?
Sur ce point, l’indice de réparabilité mis en place au 1er janvier 2021 est une vraie avancée dans l’information fournie aux consommateurs lors de l’achat. Chez Dot-Drops on attend avec impatience la mise en application de l’indice de durabilité à horizons 2024 avec un rêve : qu’un produit à prix fixe avec un indice de 9/10 soit plus désirable qu’un produit à -50 % avec indice de 5/10 !
Le contexte actuel d’inflation vous impose de repenser votre stratégie ?
Effectivement nous réfléchissons à l’accessibilité de nos produits au plus grand nombre, c’est pour cela que nous avons mis en place la possibilité de payer en 3 ou 4 fois sans frais gratuitement. De plus, nous étudions la possibilité d’une offre de location qui permettrait de ne payer que la période d’utilisation, cela peut s’avérer très économique pour les voyageurs occasionnels.
A contrario je vois le contexte actuel comme une opportunité pour nous car plus que jamais, plus personne n’a les moyens d’acheter des produits d’entrée de gamme à prix bas, et cela pour deux raisons :
- L’environnement tout d’abord, avec la prise de conscience de sa production de déchets autre que ménagers, alors que pour de nombreux produits, la réparation n’est pas possible et le recyclage inexistant.
- Le pouvoir d’achat ensuite, car avec l’inflation actuelle, ce sont les produits d’entrée de gamme qui ont le plus augmenté et bien souvent leur qualité a baissé pour contenir cette hausse, avec pour conséquence une durée de vie encore plus courte.
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