Alan Fustec, Président de l’Agence LUCIE.
©Agence Lucie
Entreprises

Label RSE : "les entreprises françaises consomment aujourd’hui trois planètes"

Labellisation RSE, formation... l'Agence LUCIE aide depuis plusieurs années les organisations à devenir des acteurs de la transition.

ID a rencontré Alan Fustec, président de LUCIE. L'occasion de revenir avec lui sur les différentes activités de l'agence, son développement à l'international ou encore le lancement de "Lucie Positive", un label RSE prenant en compte les limites planétaires. Entretien.

Votre agence a plusieurs activités : formation, délivrance de labels…quelle la cohérence entre toutes ces activités ?

L’Agence LUCIE a deux grandes activités très complémentaires : la labellisation RSE et la formation. Elle n’a pas, en revanche, d’activité de conseil parce qu’il n’est pas crédible de conseiller une entreprise puis de l’auditer pour la labelliser. On ne peut être juge et partie. Lorsque les candidats à la labellisation souhaitent un accompagnement, nous les mettons en contact avec notre réseau de consultants partenaires :  ils sont plus de 200 aujourd’hui sur tout le territoire. 

L’Agence propose à ses clients des parcours de progrès en RSE jalonnés par plusieurs labels. Les 1200 membres de sa communauté sont ainsi engagés dans des processus d’amélioration continue, ce qui crée des besoins très importants en formation. Le CFL (Centre de Formation Lucie), le seul exclusivement dédié à la RSE en France, répond à ces besoins avec plus de 50 thématiques au catalogue (RSE, gouvernance, achats, environnement, numérique responsable…). Il attire, outre les membres de la communauté, de nombreuses entreprises qui ne sont pas candidates à une labellisation. 

Le sérieux et la crédibilité d’un label reposent sur 2 éléments clés : la qualité de son référentiel et de sa démarche de labellisation.

Toutes ces activités sont en développement rapide depuis 3 ans sous l’effet d’une forte accélération de la prise en compte de la RSE partout (entreprises, collectivités, associations…)

Comment garantissez-vous un cahier des charges strict doublé d’une indépendance garantie pour vos labels, c’est souvent un sujet central dans le milieu de la certification ?

Le sérieux et la crédibilité d’un label reposent sur 2 éléments clés : la qualité de son référentiel et de sa démarche de labellisation. C’est d’autant plus vrai pour un label RSE, qui doit s’appuyer sur une démarche éthique et transparente

Nos labels sont ainsi adossés à des référentiels et standards reconnus. C’est le cas, par exemple, du label LUCIE 26000 conforme à la norme ISO 26000. Ces documents sont tenus à jour en permanence en fonction des évolutions incitatives et réglementaires. C’est le cas en ce moment. Nous sommes en train d’y intégrer les exigences de la CSRD, future norme européenne de reporting extra-financier qui s’imposera aux entreprises à partir de 2025. 

Le processus de labellisation est le second pilier de notre crédibilité. Il est fondé sur deux phases d’évaluation indépendantes : la première consiste en un audit assuré par un organisme tiers, indépendant de l’Agence, tel, par exemple, Bureau Veritas Certification. Ses auditeurs se rendent chez les candidats et procèdent à une évaluation de maturité RSE exigeante, en interrogeant notamment les parties prenantes de l’organisation. Il en résulte un rapport présentant des points forts et des points faibles. Un plan de progrès portant sur les points faibles est alors demandé à l’entreprise. Dès qu’il est prêt, l’Agence réunit un comité de labellisation composé d’experts en RSE indépendant qui décide de délivrer le label ou pas. La direction de l’Agence ne fait pas partie de ce comité. Un audit de suivi est réalisé deux ans plus tard pour vérifier la mise en œuvre du plan de progrès. 

En moyenne, les entreprises françaises consomment aujourd’hui 3 planètes quand on en n’a qu’une seule.

Certains confrères imposent seulement de répondre à un questionnaire en ligne et d’apporter des preuves documentaires. Selon nous, c’est trop léger. 

Dans un écosystème ou la multiplication des labels interroge, vous n’en délivrez pas moins de six, chacun était utile et singulier ?

Nous participons effectivement à la profusion des labels ! Mais nous avons pour nous d’avoir été le premier label RSE en France (2007) avec LUCIE 26000. La diversité est toujours forte dans les secteurs émergents (automobile au début du XXème siècle, ordinateurs dans les années 80…) et puis avec le temps, seuls quelques acteurs subsistent. 

Nous proposons une gamme de labels qui permet aux entreprises de s’inscrire dans des parcours de progrès. C’est le cas par exemple avec les labels :

  • LUCIE Progress (premiers pas), 
  • LUCIE 26000 puis 
  • LUCIE Positive (voir plus bas). 

Nous avons aussi des labels thématiques sur la biodiversité ou le numérique pour les entreprises qui ont à cœur de montrer leurs engagements sur ces sujets. Il n’y a donc pas de redondance. 

Le label LUCIE Positive s’adresse donc aux entreprises déjà labellisées LUCIE 26000 qui souhaitent démontrer qu’elles créent de la valeur sociale nette, tout en respectant les limites planétaires .

Vous avez récemment lancé "Lucie Positive", quelle est sa particularité et à quels besoins est-ce qu’il répond ?

Il répond à un constat. En moyenne, les entreprises françaises consomment aujourd’hui 3 planètes quand on en n’a qu’une seule… Les entreprises fortement engagées dans une démarche RSE, telles que celles labellisées Lucie 26000, en consomment encore deux. Il apparaît ainsi que l’engagement en RSE tel qu’on l’entend aujourd’hui incluant les labels RSE, les entreprises à mission, les entreprises à impact, etc, est nécessaire, mais insuffisant. 

Le label LUCIE Positive s’adresse donc aux entreprises déjà labellisées LUCIE 26000 qui souhaitent démontrer qu’elles créent de la valeur sociale nette, tout en respectant les limites planétaires. 

Il a fallu 18 mois de R&D en partenariat avec Goodwill-management pour produire le cahier des charges du label LUCIE Positive. Il se concentre sur 12 indicateurs sociaux et environnementaux : santé sécurité (accidents du travail), précarité de l’emploi (taux de CDD et intérim), écarts de rémunération injustifiés, formation professionnelle, insertion professionnelle, changement climatique (GES), consommation des ressources, artificialisation des sols, pollution de l’air, gestion des déchets, consommation d’eau, pollution de l’eau. Pour chacun de ces indicateurs, des quotas sont à respecter.  L’entreprise mesure alors ses performances sur ces sujets et constate des écarts.  Elle définit ensuite la trajectoire à suivre et les investissements à réaliser afin de respecter ces quotas à un horizon qu’elle choisit dans le futur. Si elle décide de les respecter en 2028, après audit de sa trajectoire, le label LUCIE Positive 2028 lui est délivré. Mais elle choisira peut-être d’obtenir le label LUCIE Positive 2035 ou 2042 (nous n’allons pas au-delà de 2050). Chaque année après délivrance du label, les progrès de l’entreprise sur sa trajectoire sont audités. 

Vous intervenez aussi sur le plan international, récemment avec la labellisation d’une banque en Côte d’Ivoire, dans ce cas vous vous adaptez aux standards locaux ou ce sont les mêmes cahiers des charges partout dans le monde ?

En effet, l’Agence LUCIE accélère son développement à l’international où nous avons déjà une vingtaine de clients. Aujourd’hui, nous nous concentrons en priorité sur les pays de l’Union européenne, ce qui facilite la transposition de nos référentiels, notamment sur un plan réglementaire. Notre objectif est d’avoir un tiers de nos membres à l’étranger à terme. 

Je ne dirai pas que le numérique est le parent pauvre de la transition. Au contraire, de plus en plus d’entreprises et collectivités (comme la Région Bretagne, par exemple, qui est labellisée) prennent le sujet en main.

Nous avons également un projet de développement en Afrique de l’Ouest qui semble prometteur. La question de l’adaptation aux spécificités locales va rapidement se poser dans ce cadre. Pour ce qui concerne la labellisation de NSIA Banque Cote d’Ivoire, nous avons fait le choix de conserver les mêmes exigences que pour nos clients français. Cette banque est très fière, de ce fait, d’avoir un niveau de maturité en RSE qui est atteint par seulement 1 % des entreprises en France.   

Le numérique reste le parent pauvre de la transition ?

Je ne dirai pas que le numérique est le parent pauvre de la transition. Au contraire, de plus en plus d’entreprises et collectivités (comme la Région Bretagne, par exemple, qui est labellisée) prennent le sujet en main. Fin 2021, la France a adopté une loi visant à réduire l’empreinte environnementale du numérique (REEN), une première mondiale. Pour moi le parent pauvre serait plutôt la biodiversité, qui peine à trouver sa place dans les stratégies RSE des entreprises. 

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