De nombreuses mesures nationales, européennes et onusiennes encadrent la RSE depuis les années 2000.
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Entreprises

RSE : comment a-t-elle été mise en place ?

Devenue un élément indispensable des grandes entreprises, la responsabilité sociétale des entreprises commence à se faire connaître du grand public. Cette notion a toutefois une longue histoire derrière elle. Décryptage. 

C’est aujourd’hui une incontournable des grandes entreprises européennes. La responsabilité sociétale des entreprises, ou RSE, est définie par la Commission européenne comme "la responsabilité des entreprises vis-à-vis des effets qu’elles exercent sur la société". 

Assurant aux entreprises un engagement à la fois social, environnemental et de gouvernance, elle s’est peu à peu installée dans le monde de l’entreprise, plus de 70 ans après sa première théorisation. Retour sur l’histoire de la RSE. 

Des années 1950 à l’an 2000 : la prise de conscience 

La seconde moitié du XXe siècle a été marquée par une lente prise de conscience des enjeux de la crise environnementale et climatique. En 1972, le Club de Rome publie Les limites à la croissance, aussi appelé "rapport Meadows". Rédigé par 4 chercheurs du MIT, l’ouvrage alerte sur les liens qu'entretient la croissance économique avec la dégradation de l’environnement et le réchauffement climatique. 

C’est la première fois que le modèle économique promu après la Seconde Guerre mondiale est critiqué, posant la question de la responsabilité de ses acteurs. Sur le plan social, le monde de l’entreprise est toutefois questionné depuis 1953, lorsque Howard Bowen publie La responsabilité sociale du businessman

Considéré comme le père de la RSE, cet économiste américain souligne dans cet ouvrage les bienfaits qu’une stratégie sociale peut apporter à une entreprise et à la société dans son ensemble. 

En parallèle, la communauté internationale émet une série de mesures et de déclarations visant à alerter sur l’état de la biodiversité et du climat. En 1987, le Protocole de Montréal interdit les substances nocives à la couche d’ozone. L'année suivante, l’ONU crée le GIEC, chargé de fournir aux États des rapports sur l’état des connaissances scientifiques, sociales et économiques sur le changement climatique. En 1992, le sommet de Rio de Janeiro adopte la première définition du développement durable

Les années 2000 : les premières régulations  

Le Pacte mondial des Nations unies est lancé en juillet 2000. Son but : promouvoir une attitude socialement responsable auprès des entreprises du monde entier. Reposant sur le volontariat, il invite ses participants à respecter les directives de l’ONU en matière de droits humains, de droit du travail, de respect de l’environnement et de lutte contre la corruption. 

L’année suivante est votée en France la loi sur les "Nouvelles Régulations Économiques" (NRE). Celle-ci impose pour la première fois à 700 grandes entreprises françaises cotées en Bourse de citer les conséquences sociales et environnementales de leur activité dans leur rapport annuel. Elle sera suivie en 2007 et 2010 des lois Grenelle I et II, qui précisent et élargissent les obligations de reporting extra-financiers. 

À l’échelle internationale, les grandes lignes de la RSE sont établies par la création de la norme ISO 26000 en 2010. Elle permet d’offrir un cadre standardisé et donc de faciliter la mise en place de politiques globales. 

Des années 2010 à aujourd'hui : des régulations plus abouties

Les 17 objectifs de développement durable de l’ONU sont édités en 2015. Sur cette feuille de route, l’organisation cite notamment l’éradication de la pauvreté et la lutte contre le réchauffement climatique. 10 ans plus tard, ils servent encore de boussole aux politiques RSE.

En 2017, la France rend obligatoire le devoir de vigilance relatif aux activités des entreprises, mais aussi à celles de ses sous-traitants pour toutes les entreprises nationales employant plus de 5 000 personnes. Deux ans après, la loi Pacte modifie le Code civil et le Code du commerce pour y inclure l’obligation de prise en compte des "enjeux sociaux et environnementaux". Elle crée aussi une nouvelle qualité juridique, les entreprises à mission, qui s'engagent à poursuivre des objectifs sociaux et environnementaux précis.

La directive CSRD (Corporate sustainability reporting directive), qui oblige les grandes entreprises européennes à rendre public leur reporting extra-financier, est adoptée par l’Union européenne en 2022. 

Elle est complétée en 2024 par la CS3D (Corporate sustainability due diligence directive), qui requiert que les entreprises européennes de plus de 1 000 salariés réalisant un chiffre d'affaires mondial supérieur à 450 millions d’euros prennent en compte leur impact social et environnemental sur l’ensemble de leur chaîne de valeur

Le 26 février dernier, la Commission européenne s’est toutefois prononcée en faveur de la "simplification" de ces directives. Alors qu’elles devaient officiellement entrer en application cette année, celles-ci risquent d’être allégées et repoussées de plusieurs années. Face à cette décision, plusieurs entreprises ont tout de même affirmé maintenir la publication de leur rapport.