Laure Verhaeghe, co-fondatrice et présidente de Lendosphere.
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Investir dans les énergies renouvelables et décarboner son épargne : le double pari de Lendosphere

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Effectuer un investissement dans la transition énergétique qui permet de décarboner son épargne et de choisir des projets avec un couple rendements/risques très cohérent : voici ce que propose Lendosphere. Entretien avec sa présidente. 

Fort de deux opérations de croissance externe en 2024, Lendosphere est un acteur du financement participatif dédié à la transition énergétique et écologique. Sa plateforme permet depuis 2014 d’investir dans des projets sélectionnés avec rigueur pour "leur solidité économique, leurs bénéfices environnementaux et leur ancrage territorial". 

L’expert se positionne comme étant aujourd’hui le leader français et européen du financement participatif de la transition énergétique. Pour en savoir plus sur son mode de fonctionnement et sur sa croissance, ID s’est entretenu avec Laure Verhaeghe, co-fondatrice et présidente de Lendosphere.  

Pouvez-vous nous rappeler en quelques mots ce qu’est Lendosphere ? 

On a créé Lendosphere il y a 10 ans, au moment où le cadre réglementaire s'est mis en place pour le financement participatif, avec une double conviction d'être un outil au service de la décarbonation de l'épargne et de la démocratisation de l'investissement dans les énergies renouvelables. Ça, c’est côté investisseurs. 

Côté porteurs de projets, l’idée était de créer un nouvel outil, un nouveau levier de financement compétitif et efficace pour accélérer le développement des projets et la croissance des entreprises du secteur. 

Lendosphere aujourd'hui, ce sont 350 millions d'euros levés au service des projets de la transition énergétique. C'est une base de plus de 40 000 investisseurs et ce sont 650 projets financés via la plateforme, avec aujourd'hui un taux de 7 à 7, 5 %, en taux d'intérêt moyen. Et une absence de défauts à date sur l'ensemble des projets et des financements réalisés.  

C’est un investissement dans la transition énergétique qui permet, au quotidien, de décarboner son épargne et de pouvoir choisir des projets avec un couple rendements/risques très cohérent quand on veut agir avec sens pour ses placements." 

Comment définissez-vous votre cœur de métier ? 

C'est de proposer aux particuliers des opportunités d'investissements dans la transition énergétique pour qu'ils puissent flécher sans "greenwashing" en choisissant leur portefeuille projet par projet. Et d'être un outil au service de la décarbonation de leurs placements.  

C’est une modalité d’investissement qui se fait à travers le prêt, essentiellement ?  

C’est une plateforme de projets en prêt rémunéré. On ne fait pas de don.  

C’est bien un investissement dans la transition énergétique qui permet, au quotidien, de décarboner son épargne et de pouvoir choisir des projets avec un couple rendements/risques très cohérent quand on veut agir avec sens pour ses placements. 

Ce couple rendements/risques sur un investissement, c’est à quel horizon en général ? 

Sur des maturités moyennes, entre deux et cinq ans, mais la maturité médiane est autour de trois ans.  

Ce sont des placements assez courts, accessibles à tous, puisque le ticket d'entrée est à 50 €. Il n'y a pas de frais pour les investisseurs. Et le parcours est entièrement accessible en ligne de A à Z.  

Sur quelle valeur principale votre modèle économique est-il basé ? 

Nous facturons une commission à l'émetteur qui est sur le montant levé. On fait supporter l'ensemble des frais Lendosphere à l'émetteur.  

Vous avez donc réalisé deux opérations de croissance en externe en 2024, en juin et en novembre ? 

Oui, Lendosphere a toujours été une plateforme rentable, nous n’avons pas fait d'opération de levée de fonds, nous avons plutôt une vision et nous avons conduit l'entreprise comme une PME, plus que comme une startup. Cette solidité de Lendosphere en tant qu'entreprise nous a effectivement permis de faire deux opérations de croissance externe cette année.  

La première, c'est AkuoCoop (ndlr : producteur indépendant français d'énergie renouvelable) du groupe Akuo, qui avait fait le choix d'opérer sa propre plateforme tant que le cadre réglementaire lui permettait. On a eu une évolution dans le cadre réglementaire à la fin de l'année dernière qui entrait dans le cadre d'une harmonisation au niveau européen.  

Cette harmonisation réglementaire ne permettait plus au Groupe Akuo d’opérer sa propre plateforme. C'était notre première opération de croissance externe en récupérant avec la plateforme l'ensemble des campagnes du Groupe Akuo, qui est qui est un très bel émetteur. 

Et la deuxième, qui était plus structurante encore, c'est l'acquisition de Lendopolis à la filiale KissKissBankBank&Co de La Banque Postale. (...) Il s’agit d’une plateforme sœur en termes d'activité.  

Aujourd'hui, elle nous permet de représenter plus de 650 millions d'euros ensemble d'investissements dans la transition énergétique. Et de voir une base, une communauté d'investisseurs de plus de 100 000 personnes de façon consolidée. 

Ça nous donne les moyens d'asseoir nos ambitions de façon consolidée pour 2025 et les années suivantes. C'était une belle opération de croissance externe.  

Je rappelle que nous avons rejoint le groupe 123 IM il y a plus de trois ans, l’objectif étant de consolider la distribution. Aujourd'hui, le facteur un peu limitant de notre activité, ce ne sont pas les dossiers, il y a beaucoup de besoins de financement dans le facteur de transition énergétique sur de beaux dossiers, de belles entreprises, des projets qui sont en forte croissance notamment dans le solaire. 

Le facteur limitant était un peu de la capacité d'absorption de notre plateforme. Avec le groupe 123 IM, nous avons mis en place deux choses qui venaient compléter la base des investisseurs particuliers digitaux : des possibilités de faire appel à leur réseau de professionnels de la gestion de patrimoine, et nous avons aussi mis en place des fonds d'investissement dédiés au co-investissement avec la plateforme.  

Elles ont commencé à se déployer et permettent de venir compléter certaines opérations. Notamment un engagement du Fonds européen d'investissement à hauteur de 30 millions.

Nous allons vraiment de l'investisseur particulier à l'investisseur institutionnel via Lendosphere.  

Les trois marques vont cohabiter ?  

Les marques AkuoCoop et Lendopolis sont conservées. AkuoCoop, pour conserver le portail,  l'attachement au groupe Akuo de leurs investisseurs historiques. 

Ce qui va peut-être s'accélérer pour nous, c’est l’international, l’européanisation... "

Et Lendopolis va être conservée également puisque c'est la marque à laquelle les conseillers bancaires du groupe La Banque Postale sont habitués et sont attachés.  

On conserve ce qui fonctionne et ces deux marques fonctionnent très bien. 

Ce qu'on a aussi acheté avec Lendopolis, c'est évidemment le partenariat historique et la distribution au travers du groupe bancaire La Banque Postale. C'était le dernier levier de distribution qui nous manquait, une distribution bancaire

Un autre point vous semble important à ajouter ?  

Ce qui va peut-être s'accélérer pour nous, c’est l’international, l’européanisation qui est ouverte depuis cette évolution réglementaire.  

Nous avons déjà commencé avec Akuo à présenter les premières campagnes en Grèce et au Portugal. Nous avons en ce moment une campagne pour l'extension d'une des plus grosses centrales solaires du Portugal qui est développée par Akuo, et c'est grâce au passeport portugais qu’on a demandé dans le cadre de l’évolution réglementaire.  

Nous présentons début 2025 nos premières campagnes pour des projets espagnols. Notre plateforme est celle qui a réalisé le plus de campagnes pour des projets situés en dehors de nos frontières, mais jusqu'alors, nous avions toujours financé la société mère française pour son développement international. 

Maintenant, grâce au cadre européen, nous finançons directement les actifs ou les sociétés qui portent ces actifs dans les géographies concernées.  

C'est important parce que ça permet d'accompagner nos partenaires français, qui ont pour beaucoup des activités internationales, européennes. 

Et pour nous, de pouvoir élargir aussi notre base d'investisseurs à un horizon européen. 

Cela permet aussi à nos investisseurs français de pour diversifier leurs risques sur différentes géographies.  

Avec les interconnexions au niveau européen, avec la géopolitique, nous avons un destin énergétique commun au niveau européen et c'est bien de pouvoir le concrétiser dans nos sujets de financement participatif. 

Lendosphere précise qu’au premier semestre 2024, selon une étude de Mazars et Financement Participatif France, le "crowdfunding" pour les énergies renouvelables (EnR) a représenté 122 M€ levés – dont plus de la moitié (52 %) par Lendosphere et Lendopolis. Fin 2024, le niveau annuel des collectes sur Lendosphere et Lendopolis atteignait 160 M€ en cumulé.