Le nombre de produits d'ameublement a augmenté de 88 % entre 2017 et 2022.
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Economie

La fast-déco, ce pendant de la fast-fashion qui bouleverse le marché de l’ameublement

Les enseignes d’ameublement doivent faire face à la concurrence du marché émergeant de la fast-déco, porté par des plateformes de vente en ligne comme Shein ou Temu. 

On connaissait déjà sa cousine, la fast-fashion, mais c’est désormais la fast-déco qui sévit en France. Les principes capitalistes jusqu’ici appliqués à la mode sont désormais utilisés dans la vente de décoration et d’ameublement. Prix cassés, renouvellement fréquent des collections et durée de vie limitée des produits… tout est utilisé pour vendre en grande quantité. 

Cependant, ce marché autrefois de niche a pris en importance, jusqu’à concurrencer les grandes enseignes. En décembre 2023, c’est le groupe Habitat qui a ouvert le bal des liquidations judiciaires. Puis, en juin 2025, la chaine de magasins Casa faisait face à la même décision de justice.

Dans un communiqué transmis à l'AFP, celle-ci justifiait à l’époque sa fermeture définitive par "des difficultés structurelles déjà présentes sur un marché national fragilisé". 

"Ce choc exogène […] s’est ajouté à un marché déjà en crise pour le secteur de l’ameublement et de la décoration", ajoutait l'enseigne. 

Crise de l’immobilier 

L’enseigne ajoute également que ce secteur est "fortement impacté par la conjoncture du secteur immobilier". En effet, depuis plusieurs années, ce marché est en crise. Selon les données de l’organisme Notaires du Grand Paris, les ventes de logements anciens ont chuté de 40 % en 2024 par rapport à 2022 en région parisienne et le nombre de transactions a atteint son niveau le plus bas depuis 2009. 

Cette crise affecte directement les enseignes puisque "1/3 des achats de meubles est lié aux déménagements", rappelle l’IPEA. 

Ajouté à cela la baisse du pouvoir d’achat, les Français investissent moins dans l’apparat de maison. De plus, même si le niveau de l’inflation a baissé, "les hausses de prix des années précédentes ne sont toutefois pas effacées et pèsent toujours sur le budget des ménages", note l’Institut de la Maison (IPEA). 

Conséquence : le secteur du meuble connait une chute de 5,1 % de son chiffre d’affaires, après une année 2023 déjà victime d’une baisse de 2 %, selon les données de l’IPEA. 

L’enseigne Maisons du Monde, en grande difficulté, incarne ce déclin. Fin janvier, le groupe annonçait la suppression de 91 postes dans ses sièges sociaux de Paris et de Nantes. Depuis, elle a pris plusieurs mesures pour tenter de redynamiser sa marque, notamment en baissant les prix de 3 000 produits, en réduisant l’offre et en rénovant ses magasins. 

Concurrence de la vente en ligne

Mais là où autrefois elles étaient l’incarnation de l’ameublement à bas prix, les grandes enseignes se sont fait prendre à leur propre jeu. "Depuis plusieurs années, les entreprises de la filière sont confrontées à une situation inédite : le développement massif de la 'fast déco', pendant de la 'fast fashion', qui bouleverse les règles", résume l’Union nationale des industries de l'Ameublement français

Depuis que des plateformes comme Temu ou encore Shein ont autorisé la vente d’ameublement et de décoration, les clients se sont détournés des enseignes traditionnelles. "On est sur des objets pour lesquels les consommateurs avaient l’habitude d’aller en magasins, de tester… Ces étapes n’existent plus, tout va très vite", décrit Laëtitia Lamari, analyste e-commerce au média Novethic

Le secteur de l’ameublement français "a perdu la moitié de ses effectifs et de sa capacité de production au cours des 25 dernières années tandis que les importations [en provenance de Chine] ont été multipliées par 21", précise l'Union nationale des industries de l'Ameublement français.

Laëtitia Lamari, dans son entretien avec Novethic, estime aujourd’hui que ce marché doit "tirer les leçons de ce qui s’est passé dans le prêt-à-porter".