We Love Green 2017
©Maxime Chermat Photography
To do du week-end

We Love Green, laboratoire éphémère de solutions durables

Ce samedi 2 et dimanche 3 juin, le bois de Vincennes accueille la 7ème édition du We Love Green, pionnier des festivals de musique éco-responsables.

Interview avec Najma Souroque, chef de projets en charge des contenus, du think tank et du développement durable.

On était vu comme le festival bobo greenwashing, aujourd'hui notre engagement prend de plus en plus de sens.

C’est quoi l’esprit We Love Green ? Pourquoi y avait-il le besoin de créer un festival éco-responsable ?

Au départ c'est un festival de musique, fondé par Marie Sabot de We Love Art et Emmanuel de Buretel de Because Music. Avec le souhait de travailler différemment l'expérience public, d'apporter un aspect éco-responsable, déjà à travers tout ce que l'on retrouve dans la production logistique d’un festival. Être un laboratoire et tester des solutions éphémères, mais qui peuvent être aussi utilisées de façon plus pérenne ailleurs. Par exemple, pour l’énergie on a fait le choix d’utiliser des panneaux solaires et des générateurs à l’huile, ou d'avoir des points d’eau pour éliminer les bouteilles en plastique. Il n’y a pas de route donc on utilise du platelage en bois, fabriqué par des personnes en réinsertion, qui n’abîme pas le gazon. Ça va jusqu’à la restauration, car dans un festival, on mange, on boit, et cela représente aussi une empreinte carbone colossale, notamment du fait du transport des aliments. Cette année on a encore mis les bouchées doubles pour essayer d'améliorer ce pôle, puisqu'on aura 50 restaurants présents, la crème de la crème des restaurants vegan et végétariens. Ce n’est ni pratique ni écologique d’avoir 30 camions frigos à moitié vides qui arrivent sur le site, donc on a mutualisé pour avoir seulement 4 camions qui vont faire le tour des restaurants parisiens. 

We Love Green 2017
©Maxime Chermat Photography

Vous avez aussi mis en place un think tank, ce qui est peu commun dans un festival de musique.

Le think tank, c'est un peu le laboratoire du festival en termes d’idées et de sensibilisation. C'est un concept ambitieux au départ car pas fréquent. Au départ c'était un network lab, sous un tipi, un peu intimiste. Puis on a décidé d’ériger au cœur du festival une scène à part entière, pour interpeller davantage le public, avec des conférences où l’on va parler d’innovation environnementale, où l’on va promouvoir les échanges avec des activistes, des militants, des chercheurs, des scientifiques, des prix Nobel, des artistes engagés. On aborde des questions aussi plus sociologiques mais toujours sous l’angle environnemental, par exemple les réfugiés sous l’angle climatique. Cette année on a travaillé la programmation avec la revue Usbek & Rica, en partant du point de vue de la Terre, du postulat que c’est notre seule et unique planète, qu'on n'a pas d’autre choix que de la protéger, donc que faire et comment faire ? Il y aura notamment Ernst Zürcher, chercheur et ingénieur forestier. Yvan Bourgnon va présenter Sea Cleaners, des bateaux conçus pour nettoyer les océans. Il y aura Pablo Servigne, théoricien de l'effondrement des civilisations, avec Isabelle Delannoy, ingénieure agronome spécialiste de l'économie symbiotique. Il y aura une table-ronde sur notre rapport aux animaux. 

Sur le festival, des "brigades vertes" accompagnent les visiteurs pour sensibiliser au tri des déchets.
©DR

Sensibiliser en milieu festif, c’est toujours un challenge.

Comment réussir à rester pointu artistiquement tout en étant exigeant dans l’engagement ?

Cela passe par des choix artistiques déjà. Quand Björk choisit We Love Green pour sa seule et unique date en France, c'est un acte fort qui dit ce qu'est le festival et ce qu'il veut porter comme message. Et on s’impose dans l’espace, sur le site, avec cette autre scène think tank. Comment faire pour que cela n'ait pas l'air de tomber de nulle part, que ce soit visible, qu’il n’y ait pas de nuisance et chevauchement entre cet espace, la pépinière de start-up à côté et la grande scène ? Ça passe aussi par une volonté forte et un travail actif à l’année, au même titre que pour la musique, pour programmer ces conférences, avec plus de 50 intervenants. La pépinière de start-up, c'est le pendant concret du think tank, là où on peut découvrir des solutions, des innovations, et participer à des ateliers DIY, pour apprendre à faire son maquillage maison, sa lessive, etc. On a l'impression d’en voir tout le temps, mais il faut les faire !

Un événement d’une telle ampleur doit forcément avoir un impact important, non ?

La question des déchets forcément on ne peut pas l’ignorer, on crée plus de déchets en grandissant. Mais bizarrement avec l’expérience et le fait d'être à une échelle plus conséquente, on va travailler avec des prestataires plus gros eux-mêmes et du coup réussir à trouver des solutions qu’on n’aurait pas trouvées si on était plus petit. Là on valorise plus de 70 % de nos déchets, on fait du compost en biométhanisation avec la mairie de Paris et on valorise les urines. On n’a pas de parking donc la plupart des festivaliers viennent en transports en commun. On a aussi créé notre propre calculette pour mesurer notre empreinte carbone avec Ekodev. Et on a des assesseurs de l’ONG indépendante A Greener Festival qui viennent tester nos installations sur le festival et rencontrer tous les acteurs. Cela fait trois ans qu’ils nous remettent le prix “outstanding” !

Selon vous, un festival durable, est-ce le premier pas vers une ville et une société durables ?

Sensibiliser en milieu festif, c’est toujours un challenge, rien que de faire respecter le tri et que les gens ne jettent pas par terre, mais on essaye de trouver de nouvelles façons de faire. Si, nous-mêmes, on a un site propre pour accueillir les festivaliers, qu’on maîtrise notre production de déchets de A à Z, qu’on ne met pas de confettis partout par terre, déjà psychologiquement parlant le public aura moins envie de jeter son mégot. Mais chacun est responsable, et les pratiques ont beaucoup évolué surtout post-COP 21. Avant, c’est triste à dire mais on était vus comme le festival bobo greenwashing, aujourd’hui c’est de moins en moins le cas. Des institutions aux politiques, en passant par les acteurs du secteur, les prestataires, les artistes, notre engagement prend plus de sens, paraît moins anecdotique. Tout le monde doit être acteur, que ce soit une volonté des villes, ou de l’urbaniste, ou de l’architecte, ou d’un événement, on doit collaborer puisque l’on vit tous dans le même cadre.

We Love Green Festival
Samedi 2 et dimanche 3 juin 2018
Bois de Vincennes, 75012 Paris
Pour plus d'informations, cliquez ici.

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