Rencontre avec l'agent d'artiste, commissaire d'exposition et fondateur d'Artivism Contemporary Art, Stéphane Chatry.
Comment est née l’idée d’une plateforme dédiée uniquement à l’artivisme contemporain ?
En 2006, j'ai créé un collectif d'art urbain nommé "Objectif Bombe". Avec le temps, je suis devenu commissaire d'exposition, agent d'artiste, producteur… À la même époque, on commençait à voir des œuvres de street-art atteindre des prix records aux enchères. J'ai suivi la vague et je me suis intéressé de plus près au marché de l'art. Sauf qu'à un moment donné, j’ai trouvé ça d’un ennui pas possible. Étrangement, ce ne sont pas les artistes les plus intéressants qui obtiennent des cotes élevées – il ne s'agit que d'un marché spéculatif. C’est une énorme fumisterie !
Les arts plastiques sont une force complètement sous-exploitée.
C'est à l'issue d'une exposition collectif Human Rights, avec Andreï Molodkin, Baptiste Debombourg et Zevs, à la galerie Patricia Dorfmann en 2015, que j'ai créé l'association à but non lucratif Artivism Contemporary Art. Notre outil principal est la vidéo, que nous organisons sous forme de séries : une œuvre, en immersion, une discussion… L’objectif d’Artivism est d’agir tel un anticorps dans le système.
Donc le rôle d’un artiste, selon vous, c’est d’alerter ?
Pour moi, un artiste, au sens noble du terme, est un électron libre, qui est en recherche permanente toute sa vie, et qui construit une œuvre pour éclairer l’humanité. Par exemple, Piotr Pavlenski, est selon moi le maître de l’art politique. Sur la place de la Bastille, symbole de la Révolution française, en octobre 2017 il a mis symboliquement le feu de nuit à deux fenêtres de la succursale de la Banque de France faisant face à la colonne de Juillet. Il a ensuite diffusé un communiqué, disant "Les banquiers ont pris la place des monarques." C’était aussi un message par rapport à l’élection de Macron. Qu’on aime ou qu’on n’aime pas, ses actions fortes de ces dernières années font de Pavlenski un artiste que l’histoire gardera. Il rentre dans la matrice et son objectif est de générer une implosion.
Nicogermain, lui, fait plutôt de l’art sur la politique. Il a détourné le logo AB (agriculture biologique) en un logo orange AC "certifié agriculture conventionnelle". Avec ça, il labellise des publicités des produits provenant de l'agriculture intensive dans la rue. Pourquoi les produits bio auraient un logo et pas ceux-là ? Nous allons bientôt mener une campagne de street marketing avec ce travail…
Vous produisez des vidéos, organisez des expositions, des ateliers. Pourquoi avoir lancé cette année une revue papier Artiviste ?
Quand on aime le travail d'un artiste et qu'on n'a pas les moyens d'acheter une œuvre originale, on peut acheter une édition numérotée. Mais pourquoi ne pas aller plus loin ? Le concept de notre revue reprend cette idée d'édition sur papier, mais en démocratisant l’édition d’art, en approfondissant une œuvre, en invitant deux spécialistes du sujet traité à interagir et donner des clefs.
Nous avons édité le premier numéro sur l'alimentation et le poison, avec l’artiste Nicogermain et son œuvre Nature morte phytosanitaire. Nous avons invité Carlos Takam, boxeur professionnel plaçant une alimentation saine et 100% naturelle au coeur de sa préparation d'athlète, puis Rodrigue Bilard, naturopathe, spécialiste en médecine alternative naturelle par l’alimentation et les plantes.
L’objectif de notre revue est d’organiser des événements culturels et pédagogiques avec la combinaison d’une exposition, un atelier d’art plastique avec l’artiste et une table ronde avec des spécialistes. Notre premier événement se tient depuis le 20 octobre jusqu’au 2 décembre 2018 à la Condition Publique, avec qui nous allons produire 4 nouvelles revues en 2019. D’autres événements avec la même articulation vont voir le jour dans les semaines à venir. Il faut continuer à éclairer les esprits des générations à venir, à générer et amplifier les solutions durables pour le bien de l’humanité et de notre environnement…
- Urgences #1 Nicogermain à la Condition Publique
jusqu'au 6 décembre 2018
14 place Faidherbe 59100 Roubaix - Événements au lycée d'Alembert (Paris 19e)
le 5 novembre : table ronde, projections, revue
le 19 novembre : atelier et exposition de pancartes réalisées par les élèves - Urgences #2 Nicogermain au domaine des Trois Vallées
cet hiver à Courchevel
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