©Artivism Contemporary Art
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Artivism : lumière sur les artistes qui dénoncent le système

Loin des foires d'art contemporain où se jouent des millions, la plateforme Artivism Contemporary Art met en lumière les artistes plasticiens engagés et indépendants. Vidéos, débats, ateliers, revues… L'association co-organise en ce moment avec la Condition Publique, à Roubaix, une exposition de l’artiste français Nicogermain.

Rencontre avec l'agent d'artiste, commissaire d'exposition et fondateur d'Artivism Contemporary Art, Stéphane Chatry.

Comment est née l’idée d’une plateforme dédiée uniquement à l’artivisme contemporain ?

L’artivisme (néologisme fusionnant art et activisme) est présent dans tous les arts – le théâtre, le cinéma, la littérature, la musique… Mais dans les arts plastiques, les institutions, commissaires d'exposition, galeries d'art, etc. mettent très peu en lumière ce courant-là. Chaque année, on parle de la Fiac (Foire internationale d'art contemporain) comme étant LE placement financier idéal. À la biennale de Venise, qui est également un événement phare des arts plastiques, les artistes proposant des œuvres concrètes sur le consumérisme, le productivisme, l'écologie ou les droits de l'homme n'ont pas leur place.

En 2006, j'ai créé un collectif d'art urbain nommé "Objectif Bombe". Avec le temps, je suis devenu commissaire d'exposition, agent d'artiste, producteur… À la même époque, on commençait à voir des œuvres de street-art atteindre des prix records aux enchères. J'ai suivi la vague et je me suis intéressé de plus près au marché de l'art. Sauf qu'à un moment donné, j’ai trouvé ça d’un ennui pas possible. Étrangement, ce ne sont pas les artistes les plus intéressants qui obtiennent des cotes élevées – il ne s'agit que d'un marché spéculatif. C’est une énorme fumisterie !

Les arts plastiques sont une force complètement sous-exploitée.

C'est à l'issue d'une exposition collectif Human Rights, avec Andreï Molodkin, Baptiste Debombourg et Zevs, à la galerie Patricia Dorfmann en 2015, que j'ai créé l'association à but non lucratif Artivism Contemporary Art. Notre outil principal est la vidéo, que nous organisons sous forme de séries : une œuvre, en immersion, une discussion… L’objectif d’Artivism est d’agir tel un anticorps dans le système.

"Méchant loup"
©Shadi Alzaqzouq, 2018

Donc le rôle d’un artiste, selon vous, c’est d’alerter ?

Pour moi, un artiste, au sens noble du terme, est un électron libre, qui est en recherche permanente toute sa vie, et qui construit une œuvre pour éclairer l’humanité. Par exemple, Piotr Pavlenski, est selon moi le maître de l’art politique. Sur la place de la Bastille, symbole de la Révolution française, en octobre 2017 il a mis symboliquement le feu de nuit à deux fenêtres de la succursale de la Banque de France faisant face à la colonne de Juillet. Il a ensuite diffusé un communiqué, disant "Les banquiers ont pris la place des monarques." C’était aussi un message par rapport à l’élection de Macron. Qu’on aime ou qu’on n’aime pas, ses actions fortes de ces dernières années font de Pavlenski un artiste que l’histoire gardera. Il rentre dans la matrice et son objectif est de générer une implosion.

"Nature morte phytosanitaire"
©Nicogermain, 2017

Nicogermain, lui, fait plutôt de l’art sur la politique. Il a détourné le logo AB (agriculture biologique) en un logo orange AC "certifié agriculture conventionnelle". Avec ça, il labellise des publicités des produits provenant de l'agriculture intensive dans la rue. Pourquoi les produits bio auraient un logo et pas ceux-là ? Nous allons bientôt mener une campagne de street marketing avec ce travail…

Vous produisez des vidéos, organisez des expositions, des ateliers. Pourquoi avoir lancé cette année une revue papier Artiviste ?

Quand on aime le travail d'un artiste et qu'on n'a pas les moyens d'acheter une œuvre originale, on peut acheter une édition numérotée. Mais pourquoi ne pas aller plus loin ? Le concept de notre revue reprend cette idée d'édition sur papier, mais en démocratisant l’édition d’art, en approfondissant une œuvre, en invitant deux spécialistes du sujet traité à interagir et donner des clefs.

La revue Artiviste n°1 est parue en avril 2018.
©Artivism Contemporary Art

Nous avons édité le premier numéro sur l'alimentation et le poison, avec l’artiste Nicogermain et son œuvre Nature morte phytosanitaire. Nous avons invité Carlos Takam, boxeur professionnel plaçant une alimentation saine et 100% naturelle au coeur de sa préparation d'athlète, puis Rodrigue Bilard, naturopathe, spécialiste en médecine alternative naturelle par l’alimentation et les plantes.

L’objectif de notre revue est d’organiser des événements culturels et pédagogiques avec la combinaison d’une exposition, un atelier d’art plastique avec l’artiste et une table ronde avec des spécialistes. Notre premier événement se tient depuis le 20 octobre jusqu’au 2 décembre 2018 à la Condition Publique, avec qui nous allons produire 4 nouvelles revues en 2019. D’autres événements avec la même articulation vont voir le jour dans les semaines à venir. Il faut continuer à éclairer les esprits des générations à venir, à générer et amplifier les solutions durables pour le bien de l’humanité et de notre environnement…

  • Urgences #1 Nicogermain à la Condition Publique
    jusqu'au 6 décembre 2018
    14 place Faidherbe 59100 Roubaix
  • Événements au lycée d'Alembert (Paris 19e)
    le 5 novembre : table ronde, projections, revue
    le 19 novembre : atelier et exposition de pancartes réalisées par les élèves
  • Urgences #2 Nicogermain au domaine des Trois Vallées
    cet hiver à Courchevel

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