Olafur Eliasson, Ice Watch, 2014. 12 ice blocks. Place du Panthéon, Paris, 2015.
©Martin Argyroglo
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L'art peut-il sauver la planète ?

L’art peut-il sauver la planète ? C’est le thème de la conférence animée ce lundi au Micro Onde. L’occasion de découvrir des projets d’artistes… durables !

Fourrure, céramique, terre crue… c’est dans les matières naturelles que les artistes Karine Bonneval et Julie C. Fortier puisent leurs recherches. L’exposition Comme un frisson assoupi, à découvrir depuis la semaine dernière au Micro Onde, à Vélizy-Villacoublay, propose une plongée dans leurs environnements respectifs, à la recherche d’émotions primaires, de réminiscences sensuelles et d’interrogations scientifiques.

Dans ce contexte, l’institution organise ce lundi 5 février une conférence qui posera justement la question du lien entre culture et nature. « L’art peut-il sauver la planète ? » Quel rôle l’artiste peut-il jouer face aux crises écologiques actuelles ? Nous avons posé la question à Nathalie Desmet, enseignante-chercheuse à l’origine du cycle de conférences du Micro Onde.

©Parti Poétique

Concrètement, de quelles façons l’art contemporain peut-il s’engager autour de la cause environnementale ?

Nathalie Desmet : L’art en lui-même est un moyen de créer de nouvelles façons d'envisager les relations entre l'humain et les autres vivants. L'émerveillement que beaucoup de jeunes artistes manifestent aujourd'hui à l'égard des phénomènes naturels est déjà fondamental. Créer une attention est un premier pas vers la prise de conscience.

En 1999, Amy Lipton et Sue Spaid ont inventé le terme « écovention », entre écologie et intervention, qui décrit la tendance de beaucoup d'artistes soucieux de l'environnement à réaliser des projets locaux, souvent dans l'idée d’avoir un impact positif et d'inverser les dommages écologiques. Parfois, l’activité de terrain est même plus importante que le résultat artistique, comme pour le groupe danois Superflex qui a développé des unités de biogaz en Afrique, permettant à des familles d’acquérir une autonomie pour cuisiner et s’éclairer.

Il existe des actions de proximité, plus subtiles, et qui peuvent être tout aussi efficaces…

Plus proche de nous, le collectif du Parti Poétique cherche des solutions de proximité et propose notamment des pollinisations urbaines. Les ruches qu’ils ont installées sur le toit de la mairie de Saint-Denis se sont multipliées. Elles produisent un miel d'une richesse inégalée en raison de la biodiversité des végétaux présents en ville. Sachant que les abeilles subissent une mortalité sans précédent, en raison de plusieurs facteurs, dont l'usage du glyphosate qui vient d'être autorisé pour 5 ans de plus en France, c'est un projet beaucoup plus politique et plus important en termes de développement durable qu'il en a l'air.

Diriez-vous que l’engagement ou la prise de conscience sont aujourd’hui des tendances phares dans le monde de l’art ?

Je n'irais pas jusque là, car l'art n'est jamais totalement dégagé de sa dimension poétique qui est, en soi, incompatible avec un militantisme pur et dur. Aussi parce que les évènements artistiques éphémères, comme les foires ou les biennales, ont un bilan carbone désastreux. Les œuvres produites pour ces événements qui seront détruites à la fin faute d'être stockables, les transports des œuvres et des collectionneurs du monde entier…

L'art contemporain n'est pas vraiment un milieu préoccupé par les questions de durabilité.

Il y a aussi des pratiques paradoxales. L’artiste Olafur Eliasson, lors de la COP21, a fait déplacer des morceaux de banquise du Groenland pour en faire une horloge géante (Watch) sur la place du Panthéon à Paris. Son objectif était de symboliser le réchauffement climatique et le rendre concret, mais le bilan carbone de cette œuvre était extrêmement lourd. Il existe des actions de proximité, plus subtiles, et qui peuvent être tout aussi efficaces…

On remarque ces temps-ci un intérêt grandissant pour les projets au croisement des arts et des sciences, deux disciplines qu’on aurait pu croire opposées.

Effectivement, les collaborations entre artistes et chercheurs sont de plus en plus nombreuses. L'artiste propose souvent un autre regard. Il crée de nouveaux imaginaires en transposant dans un domaine artistique des expérimentations qui ne sont souvent pas accessibles au public. Ces partenariats permettent de repenser la place de l'humain dans le monde et de le décentrer. La recherche est encore trop souvent cloisonnée, c'est le mal de l'université française en sciences humaines par exemple, dont les chercheurs s'affrontent sur des terrains idéologiques sans efficience. L’interdisciplinarité, c’est l'avenir !

« L'art peut-il sauver la planète ? »
Conférence par Nathalie Desmet
Lundi 5 février à 19h
Micro Onde, Centre d'art de l'Onde
8 bis avenue Louis Breguet 78140 Vélizy-Villacoublay
Pour plus d'informations, cliquez ici.

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