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QUESTION DE LA SEMAINE

Voici ce que vous pensez du retour de la consigne en France

L’enjeu soulevé par la question de la réintroduction de la consigne est résumé de la façon suivante par Réseau Consigne : "l’économie du jetable n’offre aucune perspective de durabilité" face à l'objectif de la transition écologique, mais "en tant qu’exemple d’économie circulaire, la consigne l'intègre parfaitement". Et vous, que pensez vous de l'idée de la généralisation de la consigne en France ? ID vous propose de découvrir les réponses que vous nous avez apportées. 

Le 31 mars vous étiez 743 à avoir répondu à notre sondage. 2 % d'entre vous ont voté "Pourquoi pas, mais ce serait trop compliqué". 97 % d'entre vous pensent que "Ce serait pas mal, il suffit de changer ses habitudes". 1 % d'entre vous considère qu'"Il ne faut pas rêver, ça ne se fera jamais". Mais il n'est pas trop tard pour voter et nous donner votre avis en commentaire !

Sondage

Que pensez-vous de la généralisation de la consigne en France ?

Choix

Le système de la consigne est présenté par l'ONG Zero Waste France comme "un système dans lequel une petite somme d’argent, la consigne, est appliquée à une bouteille qui, après usage, est ramenée par le consommateur pour être déconsignée – afin de récupérer cette somme – dans le but d’être réutilisée, remplie à nouveau".  Voici la vidéo de présentation de ce système de gestion des déchets réalisée par la Fondation Nicolas Hulot :

Ce système comprend un certain aspect contraignant – le fait de devoir ramener les contenants dans les commerces – mais il présente aussi des avantages financiers : le consommateur peut faire des économies, car le coût de l'emballage jetable représente parfois une part importante du prix de vente du produit. Mais ces avantages sont avant tout liés à l'impact environnemental de la fabrication d'emballages et de contenants : le système d'incitation financière et de valorisation des emballages sur lequel repose la consigne permet de lutter contre l'abandon des déchets dans la nature et la réutilisation des bouteilles permet d'éviter l'étape - énergivore - de fabrication de nouveaux emballages. 

De plus, la consigne peut présenter des avantages par rapport au système de gestion de déchets classique : le recyclage.  Une étude rapportée par Le Monde pose le constat suivant : "la consigne [...] permet d’économiser jusqu’à 75 % d’énergie et 33 % d’eau par rapport au recyclage". Il est également mois onéreux de laver ces bouteilles plutôt que de les casser et les faire fondre afin d’en fabriquer de nouvelles. Une enquête sur le retour de la consigne réalisée par Ecoscience et le SIVED donne des précisions sur les coûts des déchets en verre pour les collectivités : le recyclage coûte 35 euros par tonne et la consigne… zéro euro. En effet, tant qu’il est réutilisé, "le verre est extrait des filières de gestion des déchets, et n’a donc plus de coût pour la collectivité". 

Petite histoire de la consigne en France

Nombre d'entre vous ont connu l'époque où la consigne était un système répandu sur tout le territoire français. Vous semblez en garder de bons souvenirs : vous êtes majoritairement favorables à sa réintroduction. 

Quand j’étais gamin, je me rappelle qu’on ramenait les bouteilles en verre on les déposait sur un tapis roulant à l’entrée des grandes surfaces. Donc oui, je suis pour, je ne comprends même pas pourquoi ça a été enlevé, c’était très utile. commentaire Facebook.

On arrivait à le faire il y a 50 ans, on doit encore en être capables.commentaire Facebook

Dès lors, comment expliquer que cette pratique ait disparue en quelques années ? 

Je ne comprendrai jamais pourquoi on l’a enlevé pour mettre autant de plastique.commentaire Facebook

La pratique de la consigne était largement répandue en France jusque dans les années 90. Mais dès les années 60, l’apparition et la prolifération des emballages jetables tendent à "ringardiser" cette pratique. En témoigne une publicité datant de 1963 dans laquelle un fabricant d’huile en bouteille vante les mérites des bouteilles en verre à usage unique : "C’est plus sûr : non consignée, la bouteille ne sert que pour vous, elle ne sert qu‘une fois ; vide, on la jette, elle ne revient pas". 

Dans les années 90, un décret met en place le dispositif "responsabilité élargie du producteur" : le producteur doit désormais contribuer financièrement à la gestion de la fin de vie de ses produits. Parmi les différentes options s'offrant à lui - la consigne, les systèmes individuels de reprise ou l'adhésion à un éco-organisme - l'adhésion à un éco-organisme est la plus avantageuse en termes de coût. Le producteur doit ainsi verser une contribution financière à des éco-organismes qui la redistribuent aux collectivités. "Cela a signé l’arrêt de mort de la consigne", résume Flore Berlingen, directrice de Zero Waste France.  L'apparition du jetable a également permis aux industriels d'accélérer les cadences de production et d'éloigner les lieux de production des lieux de vente. En effet, le système de consigne impliquait jusque-là une certaine proximité entre ces deux points. 

Le Centre national d’information indépendante sur les déchets (CNIID) considère que "ce ne sont pas des considérations environnementales, mais avant tout commerciales qui ont conduit à la disparition de la consigne pour  la réutilisation, au profit des emballages à usage unique". Certaines marques ont même organisé un lobbying actif contre sa réintroduction, comme le rapporte Zero Waste France qui revient sur les fuites de documents stratégiques internes à Coca-Cola Europe en 2016.

Et aujourd'hui ? 

La pratique de la consigne a donc été abandonnée, mais n'a jamais complètement disparu. Elle est notamment restée très populaire dans le cadre de festivals ou de concerts. Depuis quelques années en France, de nombreux commerces tentent de remettre cette pratique au goût du jour :

-France Info a réalisé un reportage à Nantes, sur l'association "Bout à bout" qui a relancé la pratique de la consigne en 2017. L'association s'est fixée pour objectif de "développer une filière régionale de réemploi des bouteilles" et de promouvoir "un modèle d’économie relocalisée favorisant les producteurs de notre territoire, l’emploi local et la coopération entre les acteurs." 

-"La Consigne de Provence" construit depuis 2016 une "filière de collecte, de lavage et de distribution de bouteilles de vin". Ce projet met en relation différents acteurs du territoire - des domaines viticoles pilotes, un syndicat de traitement et de valorisation des déchets (SIVED) et une association d'entreprises fournisseurs de la filière vitivinicole (Le Cluster Provence Rosé) - et les pousse à la collaboration.

-À Lille, l'entreprise "Jean Bouteille" a été fondée en 2014 et est spécialisée dans le réemploi des bouteilles en verre. Le Monde explique que "lorsqu’un client vient dans un magasin, il donne un euro de consigne pour récupérer une bouteille propre et la remplit du liquide de son choix. Après l’avoir utilisée, il la ramène au magasin et en prend une nouvelle, propre.". Le fondateur de l'entreprise, Gérard Bellet, raconte qu'en 2015, ils ont "évité à 20 000 bouteilles de finir à la poubelle". La société équipe les magasins bio des Hauts-de-France et de Belgique et projette de développer son réseau de consignes à Paris, à Bordeaux et en Bretagne.

-Enfin, ID vous propose de découvrir son article sur la naissance d'un service de consigne dans la Drôme et dans l'Ardèche baptisé "Ma bouteille s'appelle reviens !", porté par l'association Locaverre qui rassemble des producteurs et consommateurs de la région.        

D’autres expériences sont menées en France afin de développer des retours d’expérience sur les avantages que représenterait cette pratique. Ces retours sont "consignés" au sein du Réseau Consigne qui soutient les initiatives locales.                           

Comment cela se passe ailleurs ?

Le modèle allemand a été cité à plusieurs reprises par nos lecteurs. ID vous propose de faire le point sur le fonctionnement du système de consigne en Allemagne. 

Nous avons un bel exemple pas si loin…en Allemagne la consigne est généralisée, également sous forme de bons d’achat dans des machines qui récupèrent les bouteilles en verre. Donc on sait que ça marche et que les gens sont partants, tout est réuni, il n'y a plus qu’à ! commentaire Facebook

Les allemands ramènent leurs bouteilles vides dans les commerces depuis 2003 : les bouteilles portent des mentions spéciales sur leur étiquette : Pfand (caution) ou Pfandflasche (bouteille consignée). La caution varie entre 8 et 25 centimes - selon le type de contenant, en verre, en métal, en plastique, etc. Les distributeurs envoient ensuite les bouteilles collectées aux fabricants qui les remplissent et les remettent en vente. La consigne a permis d’atteindre un taux de collecte des emballages de boisson de 90 % en Allemagne. 

À quoi peut-on s'attendre ? 

Le retour de la consigne en France est une des principales propositions déposées sur la plateforme collaborative mise en place par le gouvernement afin d'élaborer une feuille de route sur l'économie circulaire. Il s'agit d'un "plan de bataille anti-déchets et anti-gaspillage" d'après Édouard Philippe - cité par La Tribune. Elle a pour but "d'impulser l'évolution vers un modèle économique plus soucieux de la préservation des ressources et de l'environnement". Les mesures évoquées dans cette feuille de route visent à "mener des expérimentations de consigne dans les territoires ultramarins qui le souhaitent" et "déployer dans les collectivités qui le souhaitent des dispositifs de "consigne solidaire" qui créent une incitation au retour où chaque nouvelle bouteille et canette collectée contribuerait au financement d’une grande cause environnementale, de santé ou de solidarité". Pour financer ces mesures, il est précisé dans la feuille de route que "les collectivités bénéficieront d’un soutien spécifique à la tonne collectée reversé par les éco-organismes agréés de la filière des emballages". 

Interrogée à ce propos, Brune Poirson - secrétaire d’État à la transition écologique - répondait en 2018 au micro de France Info que ces mesures concerneraient avant tout "les bouteilles en plastique, les canettes et les piles", car selon elle, le taux de collecte du verre est "suffisant" et s’élève à "86 % sur le territoire". La priorité concerne donc les bouteilles en plastique : à Paris et Marseille, seulement une bouteille en plastique sur dix est recyclée. La ville de Marseille a déjà annoncé vouloir tester ce procédé et devenir la ville-pilote de la généralisation de la consigne. Ces expérimentations ont pour but de générer des retours d'expérience permettant "d'examiner la nécessité du déploiement éventuel de la consigne en France et ainsi l’atteinte de performances de collecte tendant vers 100 %".  

Quoiqu'il en soit vous êtes, pour une grande majorité d'entre vous, favorables et optimistes quant au retour de la consigne en France :

J’étais vraiment heureuse quand j’ai vu l’article (NDLR : sur "Ma bouteille s’appelle reviens !"). Si cela devient rentable pour le consommateur et/ou le producteur, cela reviendra c’est sûr. J’attends avec impatience en tout cas.commentaire Facebook

J’adore ce concept. En plus cela permet de tisser des liens avec les commerçants. commentaire Facebook

Certains d'entre vous émettent cependant des doutes quant à l'efficacité de ce système ou à propos de son application concrète :

Au lieu de trouver des solutions piochées dans l’ancien temps, l’éducation serait plutôt à revoir mais malheureusement, ça, personne n’osera s’y attaquer. Mais j'ai l'espoir qu’en cessant de tout considérer comme jetable les gens (qui feront l’éducation de demain) cesseront de tout jeter n’importe où. commentaire Facebook

C’est nécessaire selon moi. Mais cela demande d’être hyper fidèle ou d’habiter près d’un point de collecte. Difficile que cela convienne à tout le monde. commentaire Facebook

Affaire à suivre...

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