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CHRONIQUE CONSO

Les premiers œufs produits sans tuer de poussins mâles vendus à Berlin

Une entreprise allemande a réussi à déterminer le sexe des poussins dans l’œuf. Avec cette technologie, on peut éviter le massacre industriel des poussins mâles à la naissance.  

Pour produire des œufs, on tue chaque année quelques 50 millions de poussins mâles rien qu’en France. Faire grandir ces mâles n’est pas rentable pour l’industrie. La race des poules pondeuses n’est en effet pas la même que celles des poules élevées pour leur chair (vendues sous l'appellation de "poulet"). Les premières sont sélectionnées pour la quantité d’œufs produits par les femelles. Les secondes sont choisies parce qu’elles grossissent très vite. S’il fallait nourrir les mâles de la race des poules pondeuses jusqu’à ce qu’ils atteignent un poids suffisant pour être vendus et mangés, cela prendrait trop de temps, de nourriture et donc d’argent. Ils sont ainsi tués à la naissance, broyés vivants, asphyxiés ou gazés, dans des conditions dénoncées notamment par l’association L214. Depuis plusieurs années, des recherches ont lieu dans différents pays pour trouver le moyen de détecter le sexe des poussins dans l’œuf et éviter ce massacre à leur naissance. L’entreprise allemande Seleggt vient de mettre au point une technologie aboutie. Ses premiers œufs qui ne tuent pas les poussins mâles ont été mis en vente dans des supermarchés berlinois en novembre dernier.

Un enjeu économique

Neuf jours après la fécondation, on transperce la coque des œufs avec un laser pour créer un minuscule trou. On prélève une goutte du liquide dans lequel baigne le fœtus. L’orifice n’a pas besoin d’être rebouché, car la membrane interne se referme d’elle-même. On recherche dans le prélèvement la présence d’hormones femelles. On peut ainsi séparer les œufs des futures pondeuses de ceux des mâles. Ces derniers sont transformés en nourriture pour animaux.

L’enjeu pour l’industrie est économique. "Notre technologie a, certes, un coût, souligne Martijn Haarman, chef du projet. Mais d’un autre côté, elle est source d’économies. Seulement la moitié des œufs ont besoin d’être incubés. On économise donc 50 % des capacités d’incubation : l’énergie et les équipements. Par ailleurs, il n’y a plus besoin d’effectuer un contrôle manuel des poussins, plus besoin de les tuer. Tout cela fait que notre processus est très compétitif." Les œufs qui ne tuent pas les poussins seront vendus dans toute l’Allemagne, sous la marque "Respeggt", dans les supermarchés du groupe Rewe dès cette année. Seleggt espère atteindre ensuite l’Europe.

Un progrès éthique qui ne résout pas tout

C’est aussi un progrès éthique réel. "Au neuvième jour, aucune souffrance ne peut être ressentie par l’embryon", affirme Almuth Einspanier, professeur à l’Université de Leipzig et associée de Seleggt. L’équipe souligne qu’il n’y a cependant pas de consensus scientifique sur ce point, mais que l’identification du genre dans l’œuf sera toujours mieux que l’abattage des poussins vivants.

Reste que ce progrès ne résout pas l’ensemble des problèmes éthiques de la filière. Les poules pondeuses sont systématiquement tuées à l’âge de 18 mois, y compris dans les élevages bio, quand leur productivité décline. L’entreprise française Poulehouse  propose une réponse à cela. Elle a créé un refuge pour sauver ces poules de l’abattoir. Les rescapées y finissent tranquillement leur vie, qui peut durer jusqu’à dix ans. Et leurs œufs sont désormais vendus partout en France.

 

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