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CHRONIQUE JURIDIQUE

"Je mange bio" : qu'est-ce que cela signifie vraiment ?

"Le BIO n’est plus un phénomène de mode, mais de société", a déclaré Florent Guhl, le Président de l’Agence BIO, organisme promouvant l’agriculture biologique, lors du récent Salon de l’Agriculture. Un marché en croissance, mais dont les consommateurs reprochent un manque de clarté des règles qui encadrent la filière. 

Toute la question est de savoir quelles sont ces règles, et celles des organismes privés promouvant l’alimentation BIO. L’alimentation, qu’elle soit végétale ou issue de l’élevage, dépend directement de l’agriculture. Il faut donc s’intéresser à la règlementation de l’agriculture biologique pour déterminer le cahier des charges de l’alimentation bio. Ainsi, le Règlement "cadre" (CE) n°834/2007 du 28 juin 2007 relatif à la production biologique et à l’étiquetage des produits biologiques, complété par le Règlement (CE) n°889/2008 du 5 septembre 2008 et le Règlement (CE) n°1235/2008 pour l’application de ces règles, représentent le cahier des charges européen de l’agriculture biologique. Cet ensemble est entré en vigueur le 1er janvier 2009.

L’Institut National de l’Origine et de la Qualité (INAO) donne une définition de l’agriculture biologique, en s’inspirant de la règlementation européenne. Il s’agit "d’un mode de production qui allie les pratiques environnementales optimales, le respect de la biodiversité, la préservation des ressources naturelles et l’assurance d’un niveau élevé de bien-être animal".

-Les produits concernés par l’alimentation biologique sont notamment :

  • Les produits agricoles non-transformés, comme les céréales, les légumes, les fruits, les fleurs comestibles, le lait, les œufs, les animaux ;
  • Les produits agricoles transformés destinés à l’alimentation humaine, tels que le pain, les fromages, les plats cuisinés ;
  • Les aliments destinés aux animaux, comme le soja, les fourrages, les grains et céréales.

-Sont exclus du mode de production biologique :

  • Les produits de la chasse et de la pêche d’espèces sauvages, car ils ne permettent pas un contrôle des conditions d’élevage, de provenance et d’abattage ;
  • L’eau et le sel, car ils ne sont pas des produits agricoles.

Les obligations des acteurs de l’alimentation BIO

Les acteurs ou opérateurs ayant une activité dans le domaine de l’agriculture biologique, tels que les producteurs, les transformateurs, les grossistes, les importateurs, doivent notifier leur activité auprès de l’Agence BIO. De plus, ces acteurs devront certifier leurs produits biologiques auprès d’un organisme certificateur qui est agréé par l’INAO.

Les conditions pour qu’un aliment soit BIO

La règlementation qui encadre les aliments biologiques est vaste. Les principales règles sont les suivantes :

  • Le produit doit contenir au moins 95 % d’ingrédients agricoles certifiés biologiques
  • Il n’est pas possible d’avoir recours aux pesticides et engrais chimiques de synthèse, puisque l’agriculture biologique s’efforce de garantir une protection durable de l’environnement ;
  • Les Organismes Génétiquement Modifiés (OGM) et les produits issus d’OGM ne sont pas autorisés à la production comme à la transformation ;
  • Des conditions d’élevage ont vocation à garantir un certain respect du bien-être animal, comme des parcours en extérieur, des espaces suffisants dans les bâtiments pour chaque animal etc. ;
  • Limitation stricte des additifs et auxiliaires technologiques incorporés dans les produits transformés ;
  • Des séparations entre les productions biologiques et conventionnelles, y compris entre les différents stockages.

La diversité des certifications publiques et privées

Il existe une multitude de labels issus de personnes publiques et privées, qui ont tous des cahiers des charges différents. Voici une liste non exhaustive des principaux labels reconnus :

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  • Le logo euro feuille, obligatoire depuis le 1er juillet 2010, pour tous les produits préemballés, mais facultatif pour les produits importés. Doivent apparaitre à la fois l’origine des matières premières, ainsi que le numéro de l’organisme certificateur en charge des contrôles.
  • Le logo AB, facultatif, appartient au ministère de l’agriculture.

Les deux logos répondent au même critère, à savoir, que le produit alimentaire devra être composé à au moins 95% de matières issues de l’agriculture biologique.

 

  • Bio Cohérence, créé en 2009, il impose l’absence totale de pesticide, d’engrais de synthèse et de traitements chimiques. En outre les fermes doivent être françaises, à 100 % BIO et qu’elles garantissent un bien-être humain pour les employés.

 

  • Bio partenaire, créé en 2015, se base sur la règlementation BIO européenne et y intègre des critères humanistes et des règles qui défendent le commerce équitable.

 

  • Demeter, créé en 1928, ce label est une garantie privée qui défend l’agriculture biodynamique. Il exclut les OGM, pesticides et engrais de synthèse.

 

  • Ecocert, créé en 1991, ce label se base sur la règlementation européenne et y ajoute des critères sociaux, économiques, équitables et environnementaux.

 

  • Nature et Progrès, organisme fondé en 1964, il favorise l’agroécologie paysanne. Il n’exige pas le certificat AB, mais impose une production à 100% d’origine biologique, un respect des saisons, interdiction de mixité des cultures BIO et non-BIO, d’OGM et huile de palme.

Les organismes de contrôle

La Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) est l’organe chargée de contrôler le respecter des exigences de la règlementation des produits biologiques et d’éviter les fraudes. En outre, la règlementation européenne prévoit que les organismes certificateurs agréés par l’INAO doivent régulièrement contrôler les acteurs du monde. Il existe neuf organismes certificateurs, qui sont Ecocert, Certipaq Bio, Bureau Veritas, Certisud, Certis.com, Alpes Contrôles, Qualisud, Biotek-agriculture et Eurofins.

Nouvelle règlementation européenne en travaux

La Commission européenne a initié une remise à plat en 2014 du dispositif encadrant la production biologique. Un nouveau texte a officiellement été adopté le 22 mai 2018 pour une application le 1er janvier 2021. Il est notamment prévu :

  • D’étendre le champ d’application du règlement à la cire d’abeille, la laine, le sel etc. ;
  • D’imposer une précision de la mention de l’origine sur l’étiquetage ;
  • Un contrôle plus ciblé des acteurs, avec des contrôles inopinés ;
  • De prévoir une meilleure lisibilité des règles d’importation des produits.

 

Me Arnaud TOUATI

Avocat Associé - Barreau de Paris et Luxembourg

et Thibaut Martini

HASHTAG Avocats