La réparation des chaussures usagées permet d'allonger leur durée de vie.
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Société

Mode durable : les cordonniers, maillon fort de la récupération

Alors que de plus en plus de Français cherchent à rendre plus durable leur garde-robe, focus sur le métier de cordonnier, autant fortement demandé pour son savoir- faire, que menacé de disparition.

La conversation avec Michel Paluszezak est hachée, sans cesse interrompue par le flot des clients et curieux qui entrent et sortent de son atelier. Depuis 39 ans, il tient la cordonnerie Michel, dans le centre-ville de Le Quesnoy, petite ville de 5 000 habitants dans le Nord. En tant d’années, il a vu sa clientèle évoluer, plus jeune, consciente des enjeux écologiques, qui préfère réparer plutôt que jeter chaussures et maroquineries. "Beaucoup achètent de la marque sur Vinted, et viennent le faire réparer ici, parce qu’ils savent qu’ils vont garder leurs vêtements et chaussures pendant longtemps. C’est le système D qui reprend le dessus", nous dit le cordonnier, figure de la ville.

Un métier en manque d'attractivité

Michel Paluszezak n’est pas à plaindre, et c’est là tout son malheur. Les clients viennent de toute la région, "même de Belgique", pour raccommoder leurs cuirs chez lui, car il est l’un des rares encore ouvert dans le secteur. Seules 3002 cordonniers sont aujourd’hui en activité selon la Fédération Française des Cordonniers Multiservices (FFCM). Le nordiste craint que leurs rangs ne maigrissent encore dans les années à venir. "Avec tous les départs en retraite, dans trois, quatre ans on sera 500 de moins".

D’autant plus que le métier n’arrive plus à attirer les jeunes. La Voix du Nord n’a recensé en octobre qu’un seul alternant en cordonnerie dans toute la région. Les centres de formation se font rares, l’Onisep ne recense que neuf CAP cordonnerie multiservice en France.

Redynamiser le secteur

"Aujourd’hui, vivre de la cordonnerie pure est impossible. Il faut faire du multiservice, des clés", continue le cordonnier Quercitain. Les ateliers ont dû faire évoluer leur offre, deviennent des boutiques de gravure, d’impressions, ou des points relais. Certains ont toutefois choisi la voie inverse, et se spécialisent sur certains produits, comme les chaussures d’escalade, ou même les sneakers. "C’est d’autres matériaux, c’est plus compliqué, ce sont des niches", reconnait Michel Paluszezak.

Pour attirer une clientèle plus jeune et connectée, certains n’hésitent pas à proposer leurs services en ligne. C’est le cas de Galoche & Patin, ou de moncordonnier.com. Il suffit d’envoyer sa paire de chaussures après devis, et la recevoir chez soi après les réparations faites.

La loi AGEC, en faveur de l’économie circulaire, prévoit un "bonus réparation" de 150 millions d’euros pour les vêtements et chaussures, qui devrait être mis en œuvre au plus tard en 2028. Michel Paluszezak et ses collègues espèrent que la mesure leur profitera, dans un contexte favorable aux métiers de la réparation.

Selon un sondage Toluna pour Recommerce en mai 2019, plus d’un Français sur deux préfère la revente ou la réparation de leurs biens plutôt que de jeter. La mode éthique est de plus en plus populaire, tout comme les astuces et pratiques anti-gaspillage des générations précédentes. La cordonnerie a entièrement sa place dans cette nouvelle économie de la mode durable. "Le paradoxe est là : il y a du boulot, mais peu de monde pour le faire", conclut Michel Palusezezak.

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