"J'ai un problème. Vous avez un problème. Nous avons un problème. (...) Ce problème, c'est celui de nos rapports aux écrans, et, plus concrètement, à internet." C’est ainsi que Najat Vallaud-Belkacem, ancienne ministre de l’Éducation du gouvernement Hollande, débute sa tribune sur le Figaro ce lundi 18 mars. La conseillère régionale des Hautes-Alpes propose de réfléchir à des solutions pour "rationner internet, par exemple en accordant un nombre limité de gigas à utiliser quotidiennement". Elle envisage des exceptions, pour les entreprises par exemple.
L'ancienne ministre propose de rationner internet, en accordant par exemple un nombre limité de gigas à utiliser quotidiennement. Face à la pollution numérique, une telle mesure serait profondément progressiste, argumente-t-elle.
→https://t.co/kSCRQVO5Mq pic.twitter.com/Ebtw4DKzQH— Le Figaro (@Le_Figaro) March 18, 2024
Dans cette réflexion, Najat Vallaud-Belkacem souligne les problèmes d’addiction liés à l’utilisation d’internet, et les dérives qui en découlent : "Tous les grands sujets, écologie, discrimination, inégalités, harcèlement, éducation, savoirs et cultures, sont liés à internet", précise-t-elle. Sur le volet écologique, l'ancienne ministre ajoute : "Il y a une urgence numérique comme il y a une urgence climatique."
L’impact connu d’internet sur le climat
En effet, outre les questions sociales, l’impact d’internet sur le climat est réel et connu depuis plusieurs années. En 2018, l’étude de The Shift Project révèle que le numérique était responsable 3,5 % des émissions mondiales de CO2. L'étude indique également qu'un Français nécessite en moyenne 2,79 planètes Terre par an pour subvenir à ses besoins. Si la fabrication et les déchets générés par les appareils électroniques sont en partie responsables, l’utilisation d’internet joue un rôle important dans cette pollution.
En effet, les données du web sont stockées dans de gigantesques data centers (centres de données). Gros ordinateurs, antennes satellites, câbles sous-marins… La fabrication de ces équipements génère elle aussi de la pollution et leur alimentation consomme de l’énergie. En outre, le stockage par ces équipements entraîne de la surchauffe, qui nécessite l’utilisation de climatisation, donc d’eau.
Plus les fichiers sont lourds et la qualité grande, plus ce matériel est sollicité. Par exemple, le streaming vidéo, qui représente 60 % des flux de données selon Greenpeace, est la pratique la plus coûteuse en énergie. L’association s’inquiète d’ailleurs du déploiement de la 5G, menant à davantage de flux. Ce sont ces derniers que Najat Vallaud-Belkacem propose de rationner, avec l'espoir d’en limiter les utilisations superflues comme "mettre des commentaires haineux ou fabriquer des fakes".
Des réactions intenses qui ouvrent le débat
Les réactions ne se sont pas fait attendre en ligne et sur les plateaux télévisés. Certains s'inquiètent que ce genre d’interdiction ne représente une atteinte à la liberté, d’autres proposent de destiner ces mesures uniquement aux enfants. Quelques internautes s'amusent de la proposition de "coder sans ordinateur, avec un crayon et un papier."
Seulement, les réactions véhémentes à caractère sexiste se sont également multipliées sur le réseau social X. "Bécasse", "dinde", "cruche", pouvait-on lire ce mardi, lendemain de la publication de la tribune. Plusieurs internautes ont appelé à "rationner les subventions de France Terre d’Asile", sur fond de raccourcis racistes. En effet, cette association d’aide aux migrants est présidée par Najat Vallaud-Belkacem.
3) nos débats politiques devraient servir à cela : poser et répondre à des situations graves plutôt que faire semblant de les ignorer...chiche?
Allez, merci à tous ceux qui répondront avec des propositions. Et bon vent à ceux qui n’ont que l’insulte à la bouche. Tristes vies.
— Najat Vallaud-Belkacem (@najatvb) March 18, 2024
À ces attaques, l’ancienne ministre a répondu, toujours sur X, s’amusant de la "créativité" des "trolls". Elle demande à ne pas se focaliser sur le nombre de gigas, qu’elle a pris en "simple illustration". Elle propose une "réflexion sur sa consommation" et estime que "se demander de combien nous avons besoin pour bien utiliser Internet est un exercice utile". La présidente de France Terre d’Asile conclut en proposant : "Nos débats politiques devraient servir à cela : poser et répondre à des situations graves plutôt que faire semblant de les ignorer...chiche?".
La réduction de l'utilisation d'internet aurait donc bien un impact positif sur le climat, mais cette prise de position ouvre plusieurs débats. Déjà, sur la possibilité d'autres solutions, via l'innovation, permettant d'éviter les restrictions. Ensuite, sur les limites à la liberté, à la consommation de masse et à la décroissance.
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