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Finance durable

Investir en forêt, une autre manière de verdir son portefeuille

En plus d’être porteur de sens, l’investissement sylvicole présente des avantages patrimoniaux et financiers notables pour toutes les typologies d’investisseurs, expliquent dans cet échange Aymeric Plauche Gillon et Eloïse Morand, respectivement directeur de la clientèle privée et responsable RSE chez la Société Forestière.  

Pourquoi investir dans la forêt ?

La forêt est un actif qui n’est pas toujours intégré dans les stratégies d’investissement, car il est considéré comme réservé aux particuliers ayant un patrimoine important ou qui disposent d’une expertise sur le sujet. Alors qu’il présente de nombreux avantages pour toutes les typologies d’investisseurs ! En premier lieu, c’est un placement porteur de sens. À l’heure où la finance "verte" est parfois questionnée, investir en forêt est un moyen concret de participer au maintien de la biodiversité et à l’atténuation des conséquences du réchauffement climatique. En effet, la forêt rend naturellement des services vitaux : séquestration du carbone dans les arbres et dans le bois produit, purification de l’air et de l’eau, stabilisation des sols... Choisir ce type de placement permet aux investisseurs de contribuer à leur échelle à la préservation d’un écosystème indispensable au fonctionnement de notre société. Attention, il ne suffit pas d’investir dans la forêt pour que ces services dits "écosystémiques" soient préservés. Il faut s’assurer que la gestion mise en place soit durable et équilibre à la fois la production de bois et le respect des autres fonctions de l’écosystème forestier.

Évidemment, c’est également un investissement intéressant pour des raisons patrimoniales et financières :

  • C’est un patrimoine vivant, qui crée naturellement de la valeur par sa croissance biologique. En effet, il ne faut pas oublier que l’actif forestier comprend à la fois un sol, donc une valeur foncière, et un stock de bois qui croît de manière continue;
  • C’est une valeur refuge et un actif corrélé à l’inflation. Ces dernières années, le matériau bois est de plus en plus recherché, ce qui se traduit par une hausse des cours de cette matière première;
  • C’est un actif tangible, qui permet de diversifier son patrimoine ;
  • C’est un actif dont l’évolution est décorrélée des marchés financiers.

Même si l’avenir n’est jamais écrit, la forêt française offre donc des perspectives de valorisation sur le long terme.

Quels sont les différents moyens d’investir dans la forêt?

Il y a deux moyens d’investir en forêt :

  • L’investissement direct, c’est-à-dire l’acquisition d’une forêt par un investisseur. Ce type d’investissement, nécessitant des capitaux importants, peut répondre à des motivations spécifiques, comme la volonté de s’inscrire dans un territoire de manière durable, ou la volonté de maitriser la gestion appliquée sur son patrimoine.
  • L’investissement indirect, ou la "Forêt papier", c’est- à-dire l’acquisition de parts de groupement forestier structuré par des sociétés de gestion spécialisées. Cette modalité d’investissement permet de démocratiser le placement forestier, en le rendant plus accessible et en recueillant les souscriptions d’un grand nombre d’investisseurs. C’est une manière efficace de mutualiser le risque car le groupement détient toujours plusieurs forêts situées dans les différentes régions forestières françaises.

À quel rendement peut-on s’attendre en moyenne, et d’où provient-il ?

La performance du placement forestier a deux composantes : elle est constituée, d’une part, des revenus générés par la forêt, et d’autre part, de la valorisation des actifs forestiers. Les revenus sont issus des ventes de bois encaissées au cours de l’exercice considéré, ainsi que des loyers de la location de la chasse. Le rendement d’un placement forestier est très lié à l’accroissement biologique des arbres. Compte tenu des cycles longs de production, il est donc assez modéré. De plus, il dépend des caractéristiques de la forêt (qualité des sols, situation géographique et des essences dominantes -feuillues ou résineuses). En groupement forestier, le taux de distribution généralement constaté est de l’ordre de 1 % par an*.

Quels sont les avantages en termes de fiscalité et de succession ?   

Le dispositif fiscal forestier est adapté à son cycle de production long : à titre d’exemple, un douglas arrivera à maturité entre 50 à 70 ans. Il faut donc du temps pour récolter le fruit de son travail alors qu’on récolte le blé au bout d’une année. La forêt n’est pas sur les mêmes laps de temps. 

Pour éviter de taxer la production chaque année (qui est un revenu différé en sylviculture), le législateur a adapté la fiscalité des revenus provenant des ventes de bois ainsi que la taxation des donations et transmissions de forêt ou de parts de groupement forestier : 

  • Les revenus provenant des ventes de bois sont imposés de manière forfaitaire dans la catégorie des bénéfices agricoles. Ce forfait est basé sur un revenu cadastral qui lisse dans le temps les recettes issues des ventes de bois.  
  • Les mutations à titre gratuit (donation et transmission) bénéficient d’un abattement de ¾ de la valeur pour calculer les droits à payer. Cet abattement de 75% trouve son origine dans le pourcentage que représente le stock de bois dans la valeur d’une forêt. Cela permet de ne pas taxer deux fois les récoltes à venir lors d’une mutation.  

Par ailleurs, il y a des incitations fiscales à l’investissement comme le DEFI acquisition et l’IR-PME. 

Attention ces dispositifs fiscaux ne sont pas à rechercher pour la seule réduction d’impôt et demandent une bonne maitrise du sujet par les producteurs de ces solutions d’investissement.  

Quels sont les risques financiers et extra-financiers associés à l’investissement dans la forêt ?

La spécificité de la forêt est que les risques financiers et extra-financiers se rejoignent: plus une forêt est saine et évolue dans un contexte favorable, plus elle sera productive. Les risques qui pèsent sur la forêt française aujourd’hui sont surtout liés à l’évolution du climat: le réchauffement climatique peut conduire à un ralentissement de la croissance des arbres, mais également à une multiplication des événements extrêmes comme les tempêtes et les incendies. Il peut également favoriser des attaques de parasites dangereux, comme les scolytes qui attaquent actuellement les forêts du Nord-Est de la France. Si les forestiers peuvent être démunis face à une partie de ces risques, il est possible d’en atténuer d’autres à travers une politique assurantielle rigoureuse et un suivi minutieux de l’état des massifs. C’est pour cette raison qu’il est essentiel de pouvoir se reposer sur un gestionnaire expérimenté qui assure lui-même la sylviculture: il saura mettre en place les pratiques qui permettront d’adapter progressivement la forêt à l’évolution du climat, et donc de limiter les risques autant que possible.

À quels investisseurs s'adresse ce type de placement ?  

Ce placement s’adresse aux investisseurs non professionnels au sens de la réglementation. Il n’y a pas besoin d’avoir des connaissances en finance ni même en sylviculture pour réaliser ce type d’investissement. Les sociétés de gestion spécialisées, rompues à la gestion des forêts, savent accompagner leurs clients tant d’un point de vue financier que technique. 

L’une des étapes clés d’une souscription réussie est l’adéquation du produit avec le profil de risque de l’investisseur. Ce dernier doit être conscient d’un risque de perte en capital en cas de dépréciation de la valeur des parts et capable de mobiliser son épargne sur le long terme. Aujourd’hui, le marché des forêts est bien orienté, mais qu’en sera-t-il demain ?  

À partir de quelle somme peut-on investir dans la forêt ?   

Investir en direct demande des capitaux disponibles importants. Comme nous conseillons d’intervenir dans un certain segment de marché (forêts d’une surface minimum de 25 hectares) cela représente des montants généralement supérieurs à 500 K€. 

La souscription de parts de groupements forestiers rend ce placement plus accessible. Dès 10 000€, il est possible de trouver des solutions intéressantes et très engagées sur le volet environnemental.  

*Performances passées ne présument pas des performances futures. 

 

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