Ne penser qu’à l'impact environnemental d'un produit après sa conception et son utilisation n’est plus suffisant.
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Finance durable

Dans les masters en finance, l'environnement se fait une petite place

Intégrer la dimension climatique et environnementale est devenu un incontournable dans les formations en finance à l'université, même si l'apprentissage passe aussi par des expériences en entreprise.

A la pré-rentrée de l'université Paris-Dauphine, les étudiants de la promo 2023-2024 du Master 2 gestion d'actifs sont unanimes: une bonne formation doit inclure des cours de finance verte.

La formation existe depuis 2000, mais la prise en compte de la dimension environnementale n'a commencé qu'en 2015, après des remontées faites par les étudiants et les entreprises du secteur, raconte à l'AFP Elyes Jouini, directeur de la formation finance de l'université. "En 2017, on a créé un cours dédié à la finance durable qui s'intéresse très précisément à la construction des critères de Finance verte" et qui est désormais inscrit dans le tronc commun des étudiants, explique-t-il.

"On le voit dans les entretiens de sélection, la sensibilité est beaucoup plus forte que par le passé", poursuit-il. Et pour la formation continue, dont les cours ont principalement lieu le soir, "la participation à une session de la Fresque du climat", un atelier participatif visant à sensibiliser au réchauffement climatique, "est obligatoire", explique Martin Merling, ancien étudiant. "Aujourd'hui, savoir sélectionner des fonds labellisés comme verts" parmi les nombreux existants et "expliquer pourquoi" à sa clientèle est devenu "un réel sujet en Europe" et doit donc être abordé, selon M. Merling.

Dans un autre Master de l'université, Economie et Finance, Estelle Simon a choisi de faire ses deux ans d'alternance dans le financement des énergies renouvelables.

"Il y a une forte demande des étudiants, mais pas énormément d'offres disponibles: pour les entreprises il est encore dur de trouver un étudiant qualifié" tant dans la finance que dans les enjeux climatiques. "L'offre et la demande ne se rencontrent pas forcément", observe-t-elle.

L'étudiante compte davantage sur son expérience en entreprise pour acquérir des compétences dans la finance durable que sur les cours du Master, un peu moins centrés sur ce point, même si une spécialité Finance carbone existe également au cours du cursus.

Pas que du vert 

Dans les formations davantage tournées sur l'économie, la finance verte trouve aussi sa place. A la chaire développement durable et transition climatique de Sciences Po Paris, c'est l'appétit des étudiants pour ce thème, avec "la forte participation" à un concours, qui a convaincu son responsable, Marc Ringel, d'ajouter des cours pour approfondir le sujet.

"Au fur et à mesure, on est en mesure d'entrer dans sujets complexes car les étudiants sont conscients des problématiques environnementales et déjà bien formés aux fondamentaux de la finance", explique David Vaillant, professeur de finance durable à HEC.

Le cours, six séminaires de trois heures, "évolue chaque année car la pratique change, la réglementation évolue, et l'industrie financière avance vite sur ces questions"

Pour Christophe Boucher, qui intervient comme professeur à l'université de Nanterre, "les formations universitaires sont liées à des vagues. On ne peut pas modifier drastiquement les programmes d'un coup", relève-t-il.

Mais les étudiants ne rêvent pas tous de gérer un fonds verts. Seul un tiers des étudiants en gestion d'actifs de Paris-Dauphine sont catégoriques sur leur volonté de gérer un portefeuille compatible avec les engagements pris par les accords de Paris.

Et la plupart ne comptent pas laisser de côté des possibilités de carrière dans une plus grosse structure que dans un fonds plus petits aux ambitions vertes plus affirmées.

"Aujourd'hui, un fonds d'investissement qui s'impose trop de contraintes ESG (environnemental, social et de gouvernance) peut réduire sa rentabilité" en limitant le nombre potentiel d'entreprises dans lequel il peut investir, note une étudiante.

"On ne compte pas professionnaliser nos étudiants" dans une carrière finance verte, "mais il y a la nécessité qu'on a ressentie de les sensibiliser à ces questions, pour que cela irrigue en retour l'environnement professionnel", résume Elyes Jouini de l'université Paris-Dauphine.

Avec AFP.