La forêt en France métropolitaine ne cesse de gagner du terrain depuis plus d’un siècle. Selon les tendances 2020 des indicateurs de gestion durable (IGD) de l’Institut national de l’information géographique et forestière (IGN), elle couvre aujourd’hui 16,8 millions d’hectares (un tiers du territoire), soit 20% de plus qu’il y a trente-cinq ans. Tour d’horizon de ses caractéristiques et de ses acteurs.
Quelles sont les différentes essences d’arbres présentes en forêt ?
En France métropolitaine, il en existe plusieurs types : des forêts de feuillus (63%), des forêts de résineux (27%) et des forêts mixtes (9%), selon les dernières données publiées par l’IGN en 2020. Sur l’ensemble du territoire, on dénombre par ailleurs près de 138 essences d’arbres, avec en majorité des chênes, des hêtres et des pins.
Parmi les autres espèces inventoriées : des épicéas, sapins, châtaigniers, charmes, frênes, peupliers, érables, Douglas...Certaines sont menacées (catégorie UICN vulnérable), notamment le bouleau nain, le laurier du Portugal et l’alisier de Reims.
A qui appartiennent les forêts ?
En France, les trois quarts des forêts, soit 12,6 millions d’hectare, appartiennent à des propriétaires privés qui sont plus de 3 millions, comme l'indique le CNDB, le comité national pour le développement du bois. Le quart restant représente 4,2 millions d’hectares et se répartit entre les forêts domaniales (qui appartiennent à l’Etat) pour 1,5 millions d’hectares, et les autres forêts publiques (qui appartiennent à des communes, des collectivités locales ou encore des établissements publics) pour 2,7 millions d’hectares.
Par qui sont gérées les forêts ?
Les propriétaires de forêt se font accompagner par des professionnels forestiers pour les aider dans la gestion de leur forêt. On les appelle les gestionnaires forestiers. Pour les forêts privées, il s’agit par exemple des coopératives forestières. Pour les forêts publiques, il s’agit de l’Office nationale des forêts (ONF).
Comment sont-elles entretenues ?
En France, le concept de gestion durable prédomine lorsqu’il est question d’entretien des forêts. Selon l’article L1 du code forestier, ce modèle “garantit leur diversité biologique, leur productivité, leur capacité de régénération, leur vitalité et leur capacité de satisfaire, actuellement et pour l’avenir, les fonctions économiques, écologiques et sociales pertinentes aux niveaux local, national et international, sans causer de préjudices à d’autres écosystèmes”.
Pour s’inscrire dans cette définition, il existe des certifications forestières reconnues comme FSC et PEFC (programme de reconnaissance des certifications forestières). Cette dernière, majoritaire en France peut être délivrée aux acteurs publics comme privés, en respectant un cahier des charges précis. Le PEFC publie sur son site quelques règles à suivre : “couper certains arbres pour permettre aux plus beaux de se développer, ne pas trop couper pour que la forêt ait le temps de se renouveler, planter de nouveaux arbres quand d’autres arrivent en fin de cycle, ou encore maintenir une diversité des essences et des espèces.”
Dans les forêts privées, majoritaires en France métropolitaine, les premiers contributeurs en France au système de gestion durable des forêts PEFC sont les coopératives forestières, qui, en tant qu’entité d’accès à la certification, peuvent contrôler et garantir le bon respect des règles définies dans le cahier des charges de la certification. C’est pourquoi 60% des propriétaires forestiers certifiés PEFC sont adhérents d’une coopérative forestière.
L’exemple des forêts publiques
Gérées par l’Office national des forêts, un établissement public à caractère industriel qui suit un plan d’aménagement établi sur vingt ans, elles s’appuient sur un modèle de gestion durable et multifonctionnelle, recouvrant trois missions principales : la production de bois, l’accueil du public, et la protection de la biodiversité.
Dans ces espaces, la forêt se renouvelle essentiellement par régénération naturelle, à hauteur de 80%, selon l’ONF. Plusieurs exceptions viennent toutefois à l’encontre de cette règle. Pour les peuplements de résineux, le renouvellement se fait par plantation à 50%, note l’ONF. Les pins peuvent manquer de lumière pour se développer. Il est alors nécessaire de réaliser des coupes d’éclaircies ou bien des coupes rases pour prélever les derniers peuplements arrivés à maturité.
Le sujet mal connu des coupes rases
Les coupes rases ou coupe de régénération, sont un des actes de récolte possible, faisant partie d’un cycle de gestion durable et programmé de la forêt au moment de la plantation des arbres, il y a 40, 80 ou 120 ans auparavant, voire plus. Cela consiste à récolter les derniers arbres devenus matures présents sur la parcelle forestière. "Cette récolte intervient après plusieurs travaux et prélèvements préalables que l’on appelle des éclaircies : parfois après une, deux, trois, voire quatre éclaircies qui sont réalisées sur plusieurs décennies", précise Tammouz Eñaut Helou, secrétaire général de l’UCFF-Les Coopératives Forestières.
Sous l’effet du changement climatique, produisant des périodes à rallonge de fortes chaleurs ou de gelées, et favorisant le dépérissement et la mort des arbres (insectes ravageurs, champignons, chalarose...), les forestiers doivent adapter les forêts. Des coupes sanitaires sont alors pratiquées pour endiguer une parcelle contaminée ou tout simplement pour évacuer les bois morts. Dans tous les cas, ces coupes (rases, sanitaires) “sont suivies d’un renouvèlement de la forêt avec des essences adaptées aux nouveaux climats qui permettront de résister aux conditions plus extrêmes et de jouer pleinement leur rôle de captation de carbone”, détaille l’UCFF.
Si cette pratique est parfois décriée par des militants écologistes, dans la législation actuelle aucun seuil de surface maximal de coupes rases n’est fixé. “Pour autant, en France métropolitaine, la coupe rase telle qu’elle est imaginée dans le commun des mortels n’a absolument rien à voir avec les coupes pratiquées dans les forêts amazoniennes, indonésiennes ou subsahariennes”, ajoute le secrétaire général des coopératives forestières. Pour éviter tout amalgame et expliquer ces actes de sylviculture, certains forestiers, comme ceux de la coopérative forestière CFBL, ne parlent d’ailleurs plus de coupes rases mais de “récolte avant reboisement”. Un terme "plus pédagogique et qui reflète mieux la réalité du terrain", comme le souligne le directeur général de la coopérative Lionel Say.
Alors qu’une proposition de loi a été déposée pour faire évoluer le cadre législatif, le gouvernement avait annoncé en 2020 augmenter les récoltes de bois de 70% d’ici 2050 dans son projet de stratégie nationale bas carbone. Objectif : passer de 48 mégamètres cubes de bois récolté en 2015 à 65 en 2030, et 83 en 2050. Mais “pour répondre à ces objectifs et aux besoins des Français tout en limitant les importations de bois, il est nécessaire d’accompagner les propriétaires forestiers et leurs gestionnaires, notamment pour expliquer l’importance de la gestion des forêts et la récolte de bois”, explique Sarah Laroussi, directrice générale du CNDB.
Quels rôles jouent les écosystèmes forestiers ?
Les forêts assurent trois fonctions essentielles, à savoir :
- La production de bois, et d’autres ressources
Selon les indicateurs 2020 de l’IGD, seulement 60% du bois qui pousse (l’accroissement naturel) est récolté pour différents usages : bois d’œuvre, d’industrie ou d’énergie. D’autres produits sont issus de la forêt, comme la viande de gibier, le liège, la truffe ou le miel. De quoi alimenter l’économie nationale dans une certaine mesure. Alors que le secteur de la forêt, du bois, du papier, et de l’ameublement emploie près de 400 000 personnes, il représente 0,58% du PIB sur la période 2013-2017, soit 13 milliards d’euros.
- La protection contre les risques naturels
Crues, glissements de terrains, avalanches...les forêts peuvent servir de barrières pour limiter les effets de certains phénomènes naturels. “De nombreuses forêts ont d’ailleurs été plantées par l’Homme, notamment dans le cadre de la politique de restauration des terrains en montage (RTM) visant à stabiliser les sols et régulariser le régime des eaux”, rappelle l’IGN, dans la sixième édition des indicateurs de gestion durable. En France, 160 000 hectares de forêts sont spécialement classés pour leur rôle de protection.
- La préservation des espèces animales
Les écosystèmes forestiers français sont de véritables réservoirs de biodiversité. Selon les chiffres de l’IGN de 2020, la forêt abrite en métropole 73 espèces de mammifères et 120 espèces d’oiseaux.
Avec 8,7 millions d’hectares, les forêts d’Outre-mer jouent également un rôle non négligeable en matière de sauvegarde. A titre d’exemple : la Guyane comptabilise près de 400 000 espèces animales et végétales, ce qui en fait un “hotspot mondial de la biodiversité”, comme le souligne l’Office national des forêts (ONF).
En partenariat avec le Comité national pour le développement du bois.