Juridiquement, ce principe se traduit par l’abolition des droits acquis en matière de pollution.
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CHRONIQUE

Le principe du pollueur-payeur : un outil efficace ?

Le principe du pollueur-payeur ne date pas d’hier, il a été adopté par une recommandation de l’OCDE le 26 mai 1972. Il signifie que le pollueur devrait se voir imputer les dépenses relatives aux mesures de prévention et de lutte contre la pollution, arrêtées par les pouvoirs publics, afin que l’environnement soit dans un état acceptable.

En réalité, le coût de ces mesures devrait être répercuté dans le coût des biens et services qui sont à l’origine de la pollution du fait de leur production et de leur consommation. Le principe économique vise l’imputation des coûts associés à la lutte contre la pollution.

Ce principe est un principe essentiel sur lequel reposent les politiques environnementales dans les pays développés. Ainsi, selon cette approche, si le producteur doit supporter les coûts de dépollution, de recyclage et de valorisation liés à la fin de vie de ses produits, il sera plus enclin à prendre les bonnes décisions pour réduire ces coûts. Il sera donc incité à mieux éco-concevoir ce qu’il met sur le marché.

Faire payer l’entreprise causant trop d’externalités négatives

En Droit français, ce principe du pollueur-payeur est défini à l’Article L. 110-1, II, troisièmement du Code de l’environnement et dispose que "les frais résultant des mesures de prévention, de réduction de la pollution, et de lutte contre celle-ci doivent être supportés par le pollueur". L’idée de ce principe serait donc de faire payer l’entreprise causant trop d’externalités négatives à l’environnement. Le souci principal est de chiffrer concrètement ces externalités négatives afin de les faire diminuer efficacement.

Le problème actuel de la pollution, au-delà de la prise de conscience globale d’une nécessité de dépolluer certaines zones du globe, est qu’il manque un marché entre les entreprises et les habitants pour le droit à polluer. Aujourd’hui, la fiscalité verte représente 1,8 % du Produit Intérieur Brut (PIB), c’est inférieur aux dépenses faites pour l’environnement. Il est difficile actuellement de fixer un niveau de taxe, car on ne sait pas, ou mal, vers quel objectif l’on veut tendre.

Les dispositifs déjà mis en place, comme la taxe pigouvienne*, montrent la volonté de forcer les producteurs à internaliser le coût social de leur production. L’optimum serait donc obtenu lorsque le coût marginal lié à la pollution serait égal au dommage marginal pour le consommateur. Finalement, la grande idée de la taxe pigouvienne est de dire que les pouvoirs publics n’interviennent pas dans le fonctionnement de l’entreprise, afin que cette dernière arrive toute seule au niveau optimal.

Juridiquement, ce principe se traduit par l’abolition des droits acquis en matière de pollution. Il s’agit donc de mettre fin à des droits qui étaient acquis jusqu’à maintenant et notamment le droit de polluer.

Un outil anti-pollution réellement efficace ?

Le principe du pollueur-payeur est contestable à plus d’un titre et notamment sur le fait qu’il équivaut souvent à reconnaître le droit de polluer à celui qui paie et légitime alors ainsi les comportements écologiquement les plus discutables.

Il est certain qu’un droit de l’environnement qui ne pourrait légalement imposer des mesures anti-pollution qu’aux installations et activités nouvelles ne remplirait pas sa mission d’intérêt public.

L’économie libérale n’a donc pas pour l’instant trouvé meilleure solution pour corriger les effets néfastes du productivisme sur notre environnement. Il semblerait que d’autres logiques économiques, davantage basées sur l’incitation plutôt que la sanction pécuniaire, permettraient un meilleur respect de l’environnement par les plus gros pollueurs.

*("taxe s’appliquant à des agents dont l’activité produit des externalités négatives sur la société")

Me Arnaud TOUATI

Avocat Associé - Barreau de Paris et Luxembourg

et Sacha Gaillard

HASHTAG Avocats

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