"Refuser de mettre des moyens pour aider les paysans qui sont engagés dans des changements de système agricole, c'est un choix que fait l'État de ne pas aller vers la transition agro-écologique", a estimé Franck Lebreton, éleveur dans les Côtes-d'Armor et membre du Centre d'initiatives pour valoriser l'agriculture et le milieu rural (Civam) de Bretagne.
"Mensonges", "mépris", "des discours, aucune parole": place des Invalides, ils étaient une soixantaine d'agriculteurs venus de Bretagne, de Nouvelle-Aquitaine ou d'Occitanie à l'appel de la Confédération paysanne, troisième syndicat agricole français, a constaté une journaliste de l'AFP.
Ceux-ci jugent insuffisant le financement par l'État des mesures agro-environnementales et climatiques (Maec). Ces mesures sont pourtant présentées comme "un outil-clé pour la mise en oeuvre du projet agro-écologique pour la France" par le ministère de l'Agriculture.
Favoriser les prairies, développer l'élevage...
Financées à 80 % par l'Union européenne à travers la PAC (Politique agricole commune), ces aides Maec viennent compenser les "surcoûts et manques à gagner" liés à la transition écologique des fermes : favoriser les prairies, développer l'élevage de plein air, planter des haies, utiliser moins ou pas d'engrais et de pesticides...
Dans certaines régions, comme en Bretagne, les agriculteurs ont été nombreux à engager ces transformations. "Ces aides, c'est de l'argent pour la biodiversité, pour le climat, c'est de l'argent qu'on ne mettra pas pour aller ramasser des algues vertes", a témoigné Julien Tallec, agriculteur en Bretagne.
Selon une estimation de Régions de France, qui représente les régions auprès des pouvoirs publics, "il manque entre 250 et 300 millions d'euros à l'échelle nationale", non budgétés par l'État.
Amendement caduc
La Confédération paysanne déplore que l'État n'ait pas réévalué sa contribution alors que la Maec est "un vrai succès". Il "manque au moins 100 millions pour 2023", estime Laurence Marandola, porte-parole de la Confédération.
Le syndicat alerte sur la fragilisation des paysans engagés dans cette transition et dont les dossiers seront refusés faute d'un budget suffisant. "C'est incompréhensible. Ici, le seul qui ne respecte pas ses engagements, c'est l'État", déplore Julien Tallec.
Début novembre, un amendement portant à 350 millions d'euros le financement de ces mesures, déposé par des écologistes, avait été adopté à l'Assemblée nationale. Mais il avait fait les frais du 49.3 engagé par le gouvernement.
Mardi, la députée socialiste Claudia Rouaux a interpellé l'exécutif lors de la séance de questions à l'Assemblée estimant qu'il ne remplissait pas ses engagements : "il n'est pas envisageable (...) de laisser sur le bord de la route des exploitants agricoles volontaristes en raison d'une sous-budgétisation des financements".
Auditionné au Sénat, le ministre de l'Agriculture Marc Fesneau a affirmé que les moyens budgétaires de l'État étaient "de 5 millions de plus que la période précédente", tout en indiquant poursuivre l'instruction des dossiers des nouveaux demandeurs.
Alors que les financements publics sont partagés entre État, collectivités et agences de l'eau, M. Fesneau a répété qu'il attendait un engagement de ces dernières, évoquant un montant de 70 millions d'euros.
Ce qui ne règlera rien selon la Confédération paysanne, qui estime à 1 milliard d'euros le financement annuel nécessaire pour engager une réelle transition.
Avec AFP.
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