La capture du CO2 par les forêts françaises a baissé de 40 % en dix ans.
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Environnement

Changement climatique : quel impact sur le puits de carbone forestier ?

Malgré leur croissance significative, les forêts françaises capturent moins de CO2 qu’il y a dix ans. Certaines en émettent même plus qu’elles n’en absorbent. Un phénomène amplifié par le changement climatique. Décryptage.

Des forêts près de 20 fois plus étendues qu’il y a dix ans. C’est le constat dressé par l’édition 2025 de l’inventaire forestier national publié le 14 octobre par l’Institut national de l’information géographique et forestière (IGN).  

Contrairement aux idées reçues, la forêt gagne du terrain en France hexagonale et en Corse : elle représentait 17,6 millions d’hectares en 2024 contre 900 000 il y a dix ans. Un phénomène lié à la baisse des surfaces agricoles ainsi qu’à des politiques de reboisement.  

Évolution de la superficie forestière des départements entre 1908 et 2024.
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Comme tous les végétaux, les arbres utilisent le CO2 de l’atmosphère pour se développer. Ce processus permet aux forêts de jouer le rôle de puits de carbone, autrement dit de capturer davantage de CO2 qu’elles n’en émettent. 

Pourtant, malgré la croissance de la surface forestière, la capture du CO2 est en baisse : elle représente aujourd'hui 39 millions de tonnes de carbone par an contre 63 millions il y a dix ans. Soit un recul de 40 %. "La forêt française reste un puits de carbone, mais la séquestration s’amenuise", précise dans les colonnes de Libération Antoine Colin, coordinateur de l’observatoire des forêts de l’IGN.  

Un puits de carbone fragilisé par le changement climatique 

Si les forêts sont plus étendues, elles sont aussi plus fragiles. En cause : le changement climatique qui contribue à accroître les pressions sur les arbres – sécheresses, tempêtes, maladies, feux de forêt – et à augmenter significativement leur mortalité. D'après l’IGN, celle-ci a plus que doublé en dix ans.  

Un phénomène qui fragilise la capacité d'absorption du carbone par les arbres, comme l'expliquent des chercheurs du Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (CIRAD) et d’AgroParisTech dans un article publié dans The Conversation : "tout facteur augmentant la mortalité – ou limitant la croissance des arbres (sécheresses, maladies, ravageurs) – va induire une réduction du stockage de carbone, voire un déstockage".  

L’article précise que certaines forêts émettent d'ores et déjà plus de carbone qu’elles n’en stockent : c’est notamment le cas des forêts boréales victimes d’importants feux de forêt, ces derniers étant "des facteurs aggravants de la dégradation du puits de carbone forestier". En Russie, les forêts sont ainsi émettrices nettes de carbone depuis les années 2010. Au Canada, elles le sont devenues entre les années 2000 et 2010.

Un phénomène qui touche également les forêts tropicales : une étude publiée le 15 octobre 2025 dans la revue Nature constate que les forêts tropicales australiennes sont devenues les premières du monde à émettre plus de carbone qu'elles n'en absorbent.

En France, certaines forêts du quart nord-est du pays sont elles aussi émettrices nettes. Une tendance qui pourrait se généraliser dans les prochaines années. 

Pour tenter de l’enrayer, les experts préconisent de s’adapter, notamment en plantant des essences d’arbres plus résistantes aux conditions climatiques extrêmes, en prévenant les risques d’incendies et en protégeant mieux les forêts existantes.