Le total des financements de la transition écologique doit être porté à environ 40 milliards d'euros.
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Environnement

Budget 2024 : "un bon coup de vert", "pas suffisant" pour le climat, selon ONG et experts

Jamais le gouvernement n'a prévu d'allouer autant d'argent public à la transition écologique, un "bon coup de vert", estiment experts et ONG pour qui le projet de loi de finances 2024 n'est cependant "pas à la bonne échelle" et incohérent face à la crise climatique.

Avec 7 milliards de financements supplémentaires, pour la rénovation énergétique, la biodiversité ou encore le rail, "ça va dans le bon sens" mais ça reste "un budget vert pâle, et on va le dynamiser", a estimé mardi devant la presse Anne Bringault, directrice des programmes de Réseau action climat (RAC).

Le total des financements de la transition écologique doit être porté à environ 40 milliards d'euros, "mais on n'est pas à la bonne échelle", dit-elle.

Examiné en commission à l'Assemblée à partir de mardi prochain, le budget 2024 arrivera en débat le 17 octobre et aux yeux de la quarantaine d'associations fédérées dans le Réseau, le texte est surtout riche de ses contradictions et des mesures qu'il ne contient pas.

Selon le site d'information spécialisé Contexte, l'Inspection générale des finances avait testé dans un rapport confidentiel sorti en mai dix mesures d'adaptation de la fiscalité aux exigences de la transition écologique, susceptibles de rapporter 8 milliards d'euros par an d'ici 2027 mais bien peu d'idées ont été retenues dans le PLF 2024.

Le budget, "pas suffisant", comporte encore trop de ces "financements néfastes pour l'environnement et la biodiversité, dont le montant a été estimé à 22 milliards d'euros en 2022", note Elise Naccarato d'Oxfam France.

Gros SUV trop épargnés

Voire des régressions selon Jean-François Julliard, Greenpeace, qui note "une annonce de sortie du charbon à l'horizon 2027, en recul par rapport aux engagements préalables d'Emmanuel Macron".

Seule bonne nouvelle relevée, l'obligation à partir de 2024 pour l'Etat de se livrer à un exercice de programmation pluriannuelle des financements de la transition écologique. Autrement dit, la fin de la navigation à vue, et une visibilité pour les élus et le secteur privé pour investir et recruter.

Premier angle d'attaque : l'avion. "Avec pas de taxe sur les billets et un kérosène taxé à zéro, le train est 2,6 fois plus cher que l'avion au kilomètre", critique Mme Naccarato.

Deuxième reproche : MaPrimeRenov', dont l'enveloppe est étoffée de 1,6 milliard d'euros pour la porter à 5 milliards en 2024 mais qui financera encore des centaines de milliers d'aides limitées à un changement de chauffage ou de fenêtres.

"Il faut stopper ces travaux mono-gestes, et un recentrage sur la rénovation globale et performante des logements (...) celle qui divise par trois ou quatre la facture énergétique", demande Delphine Mugnier, co-présidente de CLER Réseau pour la transition énergétique.

Troisième critique : l'absence d'incitation à la sobriété, comme pour le "malus masse" sur les voitures les plus lourdes, qui consomment le plus de carburant.

Le malus est certes étendu mais il épargnera encore trop de gros SUV, notamment électriques. "Or, un véhicule électrique de 1,9 tonne a le même impact qu'un véhicule thermique d'1 tonne", détaille Michel Dubromel, co-pilote du réseau Energie de France Nature environnement (FNE).

"Manque de volonté politique"

"Donc, nous proposons d'élargir le malus poids pour qu'il soit réellement dissuasif, par exemple à 1,3 tonne, ce qui est bien au-delà de la voiture dont monsieur tout le monde a besoin pour aller au travail, et d'inclure les véhicules électriques à partir de 1,8 tonne", dit-il.

Réseau action climat avance aussi plusieurs propositions pour mettre plus d'argent public sur la table pour réaliser le grand virage écologique dont la taxation des superprofits et la mise en place d'un ISF climatique. Cela rapporterait respectivement 8 à 12 milliards d'euros et 17,6 milliards d'euros par an. L'impôt de solidarité sur la fortune serait proportionnel à l'impact climatique du patrimoine.

"L'argent pour la transition existe, la volonté politique manque", déplore Soraya Fettih de 350.org.

Au final, aucune ONG ne nie que "le budget vient de prendre un bon coup de vert", selon les termes de Damien Demailly, directeur général adjoint de l'Institut de l'économie pour le climat (I4CE).

"Mais le plus dur, ce sera la suite" quand l'Etat ne pourra plus économiser sur le bouclier tarifaire, dit-il.

Et selon lui, le bouclage budgétaire reste flou dès 2024 : par exemple, la rallonge de l'Etat prévue pour les infrastructures ferroviaires, faible face aux besoins, interroge. De même que la "schizophrénie" envers les collectivités locales, invitées à se désendetter, à ne pas trop taxer mais en première ligne de la transition énergétique.

Au final, le bras de fer qui s'annonce à propos de la taxation des grands aéroports et des autoroutes ne doit pas faire oublier que le budget 2024 contient "un peu de fiscalité écologique mais pas tant que ça", dit-il.

Avec AFP.

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