Les projets d'habitats participatifs grandissent en France.
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Entreprises

Habitat participatif : "Ô fil des voisins" veut penser l’immobilier autrement

Dans un contexte de profondes mutations sociétales et démographiques, l’habitat participatif peut être une façon d’envisager le vivre ensemble autrement et de responsabiliser le secteur de l’immobilier, explique Siham Laux, co-fondatrice et présidente d’"Ô fil des voisins".

Et si l’habitat participatif était l’une des composantes de la réponse à apporter de la part du secteur immobilier aux changements sociétaux et environnementaux importants qui animent notre époque ? C’est en tout cas avec cette conviction qu’a été créée il y a maintenant un an et demi la plateforme « Ô fil des voisins », qui met en relation des individus souhaitant embarquer ensemble dans l’aventure du participatif.

« Nous nous adressons à la fois à des professionnels -promoteurs, agents immobiliers, architectes…- proposant des biens ou des services permettant de monter ce type de projets et à des particuliers : soit des gens qui ne se connaissent pas et que nous allons ‘matcher’ grâce un algorithme en fonction de leur profil et de leurs attentes, soit des personnes ayant déjà constitué un groupe et souhaitant par exemple trouver un terrain ou une ferme à rénover », explique Siham Laux, fondatrice de la start-up. « Nous les accompagnons en les aidant par exemple à monter des dossiers financiers en collaboration avec des banques ».

Économie du partage

À l’arrivée, différents types de projets répondant aux valeurs des futurs habitants qui les portent, mais tous articulés autour d’une même conception de l’habitat, basée sur la création de lien et le principe de l’économie de partage, poursuit-elle : « L’idée n’est pas uniquement de construire les murs, mais aussi ce qui va se passer à l’intérieur, en favorisant la mutualisation des espaces et le ‘faire ensemble’ ». Pour y parvenir, la plateforme organise dès la genèse du projet des formations à la gouvernance partagée, à la prise de décision par le consentement, à la communication non violente ou encore à la gestion de conflits. « Cela signifie que la gestion du bien commun est très différente de celle d’une copropriété traditionnelle, où l’on rencontre la plupart du temps ses voisins le jour de la première assemblée générale ». 

L’aspect environnemental lui n’est pas oublié, mais dépend encore fortement des projets et surtout de leur échelle : « Lorsque qu’ils sont portés par de plus petits professionnels ou par des habitants, nous allons majoritairement retrouver de l’écoconstruction, des habitations passives, des immeubles à faible impact…, détaille Siham Laux. En revanche, ce n’est pas encore systématique chez les promoteurs, pour qui c’est parfois encore très compliqué de changer les modèles ».

Enjeux sociétaux et démographiques

Mais les choses évoluent et ces démarches intéressent de plus en plus, dans un contexte où la production d’habitations neuves est soumise à une pression réglementaire grandissante. « Nous constatons un souhait d’accélérer le mouvement chez les promoteurs, qui sont les premiers producteurs de logements, note ainsi l’entrepreneure. Beaucoup d’entre eux veulent changer leurs process et intégrer les habitants au cœur des projets et notre volonté est de les accompagner dans cette production plus vertueuse ».

D’autant que certains enjeux sociétaux et démographiques poussent également en faveur de la création de lien, à commencer par l’isolement parfois marqué de certaines catégories de population. « Nous avons par exemple beaucoup de familles monoparentales - surtout des femmes - ou des seniors pour qui le partage avec leurs voisins permet de rester le plus longtemps possible chez eux et de ne pas aller en EPHAD. Nous cherchons à reconstruire un peu l’esprit ‘village’, avec des gens qui ont choisi de vivre ensemble et de travailler sur l’entraide. Par exemple, des voisins qui mettent en place le pédibus pour emmener les enfants à l’école le matin ou qui partagent la voiture, ce qui permet des moments de rencontre et d’échange ».

D’autre part, la densification galopante des villes pour éviter l’étalement urbain demande également à ce que la notion de voisinage soit repensée, à l’heure où l’entassement au m2 est de nature à entrainer de plus en plus de conflits de voisinage, avance Siham Laux. « Être en habitat participatif c’est être avec des personnes que l’on connait et que l’on a choisies la plupart du temps. Il y a aussi une qualité de vie parce qu’on est sur des espaces qui ont des valeurs d’usage plus importantes que la cage d’escalier, le local à poussettes que personne n’utilise. Enfin, c’est aussi créer des poumons de vie au cœur des quartiers, via par exemple la mise en place jardins potagers ».

Levée de fonds début 2020

Autant d’éléments qui incitent la plateforme à présager une belle marge de progression pour l’avenir dans l’Hexagone, où l’habitat participatif représente « encore moins de 1 % des projets de co-housing en France », contre 15 à 20 % en Allemagne ou aux Pays-Bas par exemple. « Nous nous rendons compte que les professionnels veulent répondre à ces attentes et sont très en demande pour parvenir à proposer ce genre de projet ». Un succès qui se lit également dans les chiffres, alors qu’Ô fil des voisins devrait prendre en charge une centaine de projets en 2020 – soit 1700 foyers à loger- contre… six en 2019.

« En termes d’enjeux de croissance et de développement ça devient très important, et c’est pour cette raison que nous avons décidé d’organiser une levée de fonds pour atteindre 600 000 euros d’ici avril », confie Siham Laux, qui sera réalisée en partie via une plateforme de financement participatif pour permettre à la communauté de prendre part au développement d’"Ô fil des voisins". Avec pour condition toutefois de retenir des investisseurs adhérant à l’ambition de faire de l’immobilier plus responsable. « Nous choisissons des investisseurs qui veulent accompagner une entreprise en forte croissance, mais qui ont également cette sensibilité sur l’impact, qui fait partie de nos valeurs », conclut-elle.

En partenariat avec Ô fil des voisins. 

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