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Devoir de vigilance des entreprises: la France pionnière avec la loi de 2017

En promulguant en 2017 une loi sur le "devoir de vigilance" des multinationales, la France a ouvert la voie à d'autres réglementations en Europe visant à rendre les entreprises responsables en cas d'atteintes à l'environnement et aux droits humains dans le cadre de leurs activités.

La France a été suivie par les Pays-Bas en 2019, puis l'Allemagne en 2021. Poussé par la société civile, le Parlement européen a donné son feu vert le 24 avril dernier, après de longues et âpres négociations, à une directive imposant un "devoir de vigilance" aux entreprises.

Les Vingt-Sept ont fortement restreint le champ d'application du texte: il vise les entreprises employant plus de 1.000 personnes - contre 500 salariés dans une précédente version - et réalisant un chiffre d'affaires supérieur à 450 millions d'euros - contre 150 millions d'euros. Les Etats membres auront deux ans pour transposer cette directive.

Son adoption intervient onze ans après la catastrophe du Rana Plaza, du nom de l'immeuble abritant un atelier de confection de prêt-à-porter au Bangladesh qui s'était effondré en avril 2013, faisant 1.130 morts. Le drame avait jeté une lumière crue sur la dépendance de l'industrie textile mondiale aux usines implantées dans des pays en voie de développement, où les conditions de travail sont souvent indignes, et inspiré la loi française du 27 mars 2017.

Plusieurs mesures fortes

Le texte oblige les sociétés de plus de 5.000 salariés en France, ou plus de 10.000 dans le monde, à publier et mettre en oeuvre "de manière effective" un plan de vigilance destiné à identifier et prévenir les risques liés à l'activité de l'entreprise, mais aussi de ses filiales, fournisseurs et sous-traitants, y compris à l'étranger.

Le plan doit comporter plusieurs mesures, dont une "cartographie des risques" permettant d'identifier de potentielles "atteintes graves envers les droits humains et les libertés fondamentales, la santé et la sécurité des personnes ainsi que l'environnement", "des procédures d'évaluation régulière", des mécanismes d'alerte et de suivi.

La loi adoptée par le Parlement français prévoyait à l'origine une amende pouvant atteindre 10 millions d'euros pour les sociétés ne respectant pas l'obligation d'élaborer un plan de vigilance et jusqu'à 30 millions si cette absence de plan était à l'origine d'une catastrophe.

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Mais cette disposition avait été censurée par le Conseil constitutionnel. Afin d'assurer le respect du devoir de vigilance par les entreprises, la loi française donne la possibilité à "toute personne justifiant d'un intérêt à agir" de mettre en demeure la société et, si elle n'apporte pas de réponse dans un délai de trois mois à cette mise en demeure, de l'assigner en justice.

Les détracteurs du texte anticipaient un afflux massif de procédures devant la justice française. Mais seules une vingtaine d'actions ont été lancées, dont une majorité sont restées au stade de la mise en demeure. Une mission chargée d'évaluer la mise en oeuvre de la loi avait évalué à 200 à 250 le nombre d'entreprises françaises concernées par le devoir de vigilance.

Avec AFP.