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Franco-lavage : quézako?

Depuis plusieurs années, Yves Jégo, fondateur et président d’honneur d’Origine France Garantie, plaide pour une loi interdisant l’usage du drapeau bleu, blanc, rouge sur les produits qui ne sont pas fabriqués en France. Eclairage sur cette stratégie marketing trompeuse.

Le “made in France” fait vendre, et les marques l’ont bien compris. Baskets, casquettes, polos...le drapeau tricolore s’affiche de plus en plus sur les vêtements et les accessoires. Mais méfiance. Ces couleurs ne reflètent pas nécessairement l’origine du produit. Il suffit de jeter un œil du côté des étiquettes. Si certaines sont bien estampillées “made in France” ou “fabriqué en France”, d’autres peuvent révéler d’autres provenances : Belgique, Portugal ou en encore Chine.  

C'est ce que l'on appelle tout simplement du franco-lavage, une stratégie marketing qui trompe les consommateurs. “Un produit sur deux n’est pas du made in France”, estime Yves Jégo, fondateur d’Origine France Garantie et directeur du magazine Produire en France. Selon lui, les conséquences de cette forme de contrefaçon sont désastreuses pour l’économie. “Chaque année, il y a un milliard d’euros de perdu dans l’industrie du textile. De nombreux emplois sont supprimés”, ajoute-t-il. Dans une étude publiée en 2018, l’Insee rapporte que le secteur a vu disparaître en vingt ans "les deux tiers de ses effectifs et plus de la moitié de sa production”, notamment à cause des délocalisations

“Un vide juridique” 

“Le franco-lavage touche aujourd’hui tous les secteurs, aussi bien l’équipement de la personne, et de la maison, que l’agroalimentaire”, souligne Yves Jégo qui s’attaque à ce fléau depuis plus de dix ans.  

En 2014, lors de la discussion de la loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques (dite loi Macron), à l’Assemblée nationale, il avait proposé un amendement pour permettre de réserver l’utilisation du drapeau français aux produits fabriqués en France. “Cette proposition a finalement été écartée, notamment sous les lobbies du patronat. Pourtant, il y a aujourd’hui un vide juridique”, note l’ancien ministre qui souhaite que la France suive l’exemple de la Suisse. 

En 2017, le pays a adopté une législation réservant l’usage du drapeau de la confédération aux seuls produits helvétiques. En janvier dernier, Yves Jégo a remis le dossier sur la table, en interpellant les parlementaires via une pétition en ligne publiée sur Change.org. A ce jour, celle-ci a recueilli près de 4 800 signatures. 

Son message a été aussi entendu par certains députés. Le 9 février, Fabrice Brun, député LR de la 3ème circonscription de l’Ardèche, a déposé une proposition de loi pour faire évoluer le cadre législatif. 

Le marquage d’origine facultatif en France 

A l’heure actuelle, il n’existe par ailleurs aucune obligation légale ou réglementaire imposant le marquage d’origine pour les marchandises importées ou commercialisées au sein de l’UE, à l’exception des produits agricoles ou alimentaires, comme les fruits et légumes. Toutefois, si un fabricant décide d’apposer la mention “made in France” ou “fabriqué en France”, il doit respecter les règles d’origine non préférentielle du code des douanes de l’Union européenne, rappelle le ministre de l’économie.  

En cas de manquements, le contrevenant peut s’exposer à des sanctions pénales pour pratiques commerciales trompeuses. Ce délit est puni de deux ans d’emprisonnement et d'une amende de 300 000 euros.  

Dans une enquête réalisée sur des produits non-alimentaires en 2019 et 2020, et publiée le 29 juillet, la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) déclarait toutefois qu’“un faible taux d’anomalies relatives à l’indication de l’origine”, avait été relevé lors des contrôles. L'enquête a permis de noter des irrégularités chez 15% des professionnels visités. 

Certains fraudeurs utilisaient notamment des logos faisant allusion à une origine française (couleurs du drapeau français, coq illustré) sans nécessairement que les produits vendus soient français. La DGCCRF prend l’exemple d’un site de vente de couches sur lesquels figuraient "une cigogne portant dans son bec un cadeau bleu, blanc, rouge".  

Sur les emballages, la mention “Entreprise française” était apposée sans information sur le lieu de fabrication. Après avoir consulté des factures d’achat, les enquêteurs ont découvert que les produits étaient “fabriqués en République tchèque par une société belge”. Un bel exemple de franco-lavage. 

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