73 % des Parisiens portent un regard plutôt négatif sur le nourrissage des pigeons dans les villes, a dévoilé un sondage IFOP en 2018. 78 % pensent pourtant souhaitable que les habitants des métropoles puissent cohabiter avec des animaux en liberté à leurs côtés dans les espaces publics. Ce paradoxe reflète la situation dans laquelle se trouvent ces oiseaux malaimés, souvent surnommés les "rats des villes." De nombreux citadins considèrent que pigeons riment avec nuisances, ce qui engendre une cohabitation parfois compliquée.
Pourtant, "les pigeons vivent à nos côtés depuis la nuit des temps," rappelle Jean-Luc Giner, président de l’association La Roucoulade, spécialisée dans la protection des pigeons. "Avant, les ancêtres des pigeons vivaient dans les falaises, puis ils ont été introduits par l’homme, au temps des seigneurs et des colombiers," raconte Jean-Luc Giner. À cette époque, posséder un pigeonnier était un immense privilège. Mais au moment de la Révolution française, tous ces bâtiments dédiés aux oiseaux ont été détruits. Les pigeons ont donc commencé à aller dans les champs pour se nourrir, générant la colère des paysans.
La dépendance aux humains
Désormais, le problème s’est délocalisé dans les villes, "car c’est ici qu’ils se sentent en sécurité," assure Jean-Luc Giner, qui ajoute que les immeubles leur rappellent les falaises. En dehors des villes, les pigeons sont considérés comme du gibier. Il est donc autorisé de les chasser. Autre raison de leur apparition dans les villes citadines : le besoin de nourriture. Puisqu’ils ont été habitués depuis des siècles à être nourris de la main de l’homme, les pigeons en sont désormais dépendants et peinent à trouver leur propre nourriture.
Ce n’est pas parce qu’on est élu que l’on sait comment fonctionne la gestion des pigeons.
En France, aucune loi n'interdit de nourrir les pigeons. Mais dans certains départements, comme Paris, des règlements sanitaires départementaux (RSD) interdisent le nourrissage des oiseaux, mais aussi de tous les autres animaux. Une décision contestée par Jean-Luc Giner. "Ce n’est pas parce qu’on est élu que l’on sait comment fonctionne la gestion des pigeons, lance le défenseur de la cause animale. Depuis la création de l'article 120 du RSD, dès qu’il y a un morceau de pain par terre, il y a 500 pigeons qui arrivent en même temps." Ce dernier assure que dans sa commune, près de Marseille, "tout le monde nourrit les pigeons et il n’y a pas cette concentration."
Selon le président de La Roucoulade, plutôt que d’interdire le nourrissage, il faudrait désigner des personnes attitrées à cette mission dans chaque ville. Donner à manger de façon régulière aux pigeons permettrait d’éviter les regroupements. L’association prône aussi la création de pigeonniers, pour accueillir les populations d'oiseaux. Deux mesures qui, selon Jean-Luc Giner, permettraient d’améliorer la cohabitation, actuellement difficile, entre pigeons et citadins.
