Pour réduire l'empreinte carbone des stocks dormants, Adapta favorise le réemploi des cuirs issus du luxe.
© Solenne Jakovsky
Tendances

Stocks dormants de cuirs de luxe : comment cette start-up tente de diminuer leur impact sur la planète

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Depuis 2018, Adapta mise sur le réemploi pour sauver les tonnes de cuirs qui dorment dans les maisons de luxe françaises, et les redistribuer à des marques en quête de peaux pour leurs créations. Alors que le secteur de la mode traverse une crise sans précédent, cette solution anti-gaspi séduit de plus en plus d'acteurs. Zoom. 

C’est une pollution invisible à laquelle la start-up Adapta tente de s’attaquer depuis six ans dans le secteur de la mode. Créée en 2018, cette jeune pousse favorise le réemploi de cuirs issus de stocks dormants de fournisseurs de luxe, en les revendant à des artisans, des créateurs ou des marques. Une manière de lutter contre le gaspillage et la surproduction de matières, fréquents dans l'industrie du textile.

Virginie Ducatillon, fondatrice de la start-up Adapta.
© Virginie Ducatillon

L'idée de cette solution écologique est née dans la tête de la fondatrice Virginie Ducatillon, qui a travaillé pendant une dizaine d’années dans le développement produit en maroquinerie dans diverses maisons de haute-couture : Hermès, Chanel ou encore Céline. "J’ai pu constater de l’intérieur le problème de la gestion des stocks. Rien qu’au moment où les collections étaient développées, il y avait déjà un énorme gâchis d’articles et de coloris”, raconte l’entrepreneuse. 

L’épineux problème des stocks dormants 

Afin d'anticiper la demande, de nombreuses marques produisent très souvent plus que nécessaire. "Le problème c'est que lorsqu'il n’y a pas assez de commandes, pas mal de références sont annulés. On se retrouve alors avec des lots entiers de matières qui ne seront jamais utilisés. Dans le meilleur des cas, ils sont stockés dans des entrepôts. Autrement, ils finissent par être détruits”, complète-t-elle.  

Si la loi Agec (anti-gaspillage pour une économie circulaire) interdit depuis 2022 la destruction des invendus des marques de mode, aucune disposition spécifique n’existe pour le moment pour les stocks dormants. 

Face à ce vide juridique, la solution développée par Adapta apporte une première réponse. Spécialisée sur le marché du réemploi du cuir dans le secteur du luxe, la start-up indique par ailleurs se démarquer par rapport aux autres déstockeurs en portant une attention particulière au sourcing.  

Un marché en expansion 

"Notre spécificité, c’est que l’on va sélectionner les matières et contrôler la qualité, en revendant uniquement des peaux qui ont le moins de défauts possibles", précise Virginie Ducatillon. La question de la traçabilité est également centrale, poursuit la fondatrice. "Si on choisit de se sourcer auprès d’une maison de luxe, on ne donnera pas son nom. En revanche, on pourra donner des informations sur le nom du tanneur, le type de support (l‘animal) ou de tannage", détaille-t-elle. 

Une méthode qui semble séduire. Plus de 1 000 clients ont déjà fait appel à Adapta pour s’approvisionner en cuirs issus de maisons de luxe. Cela inclut des artisans mais aussi des marques établies, comme La Redoute, Le Printemps, Carel, Maison Patou... 

La start-up Adapta contribue à la valorisation des stocks de cuirs.
© DR/Adapta

30 tonnes de cuirs sauvées 

"Tout le monde est très enthousiaste", se réjouit l’entrepreneuse, avant d’ajouter qu’il reste aussi beaucoup à faire pour convaincre les maisons de luxe de changer leurs process. "Cela peut parfois prendre plusieurs mois voire plusieurs années pour bouger de telles machines, d’autant plus à une période où le secteur de la mode traverse une importante crise."  

Malgré ce contexte "morose", la start-up continue de tisser sa toile et part désormais à la conquête de nouveaux pays, à commencer par la Belgique. En s’implantant sur le territoire belge, Adapta affiche comme ambition de "contribuer à la réduction de l’empreinte écologique du secteur de la mode en Europe". 

En France, celle-ci révèle avoir déjà réussi à réemployer 30 tonnes de cuirs. "Cela représente plus de 90 tonnes de CO2 qui ont pu être évitées et plus d’un million de litre d’eau qui ont pu être économisées", lance Virginie Ducatillon.  

 

Pour aller plus loin : "La mode éthique dans nos dressings”