L’étau se resserre autour de l’Agence Bio. Dans un rapport publié le 1ᵉʳ juillet dernier, le Sénat affirme sa volonté de supprimer l’Agence Bio. Depuis plus de vingt ans, elle est chargée de promouvoir et financer l'agriculture biologique en France. Cela passe par un réseau de 3 000 entreprises, 7 000 fermes et 35 000 emplois investis dans des secteurs aussi variés que la cosmétique, l'alimentation ou encore la santé. Tous sont concernés par cette fermeture.
Face à ce qu’elle considère être un "non-sens stratégique et écologique", l’Agence Bio appelle par voie de communiqué les pouvoirs publics "à renoncer". Selon elle, cette décision revient à "désarmer [une] filière en plein redémarrage, à casser la dynamique collective d'un modèle agricole techniquement inspirant, plus résilient, plus sain et plus respectueux de l'environnement".
Un avenir incertain
Cette annonce fait suite à plusieurs mois de difficultés. En mai dernier, d’importantes coupes budgétaires avaient été annoncées par le ministère de l’Agriculture. L’Agence avait été privée d’environ 15 millions d’euros sur ses missions de communication et son fonds "Avenir Bio" qui vise à soutenir des projets en faveur de l’agriculture biologique. Elle déplorait alors un "abandon" de la part des pouvoirs publics.
Le Sénat et le ministère évoquaient déjà la possibilité de faire fermer l’Agence par souci d'économies. Une autre option avait également été considérée, celle d’une fusion avec un organisme similaire existant. Celle-ci n’a pas été retenue. Si l'Agence Bio venait à disparaitre, ce serait le ministère de l’Agriculture qui reprendrait ses fonctions.
Des résultats mitigés
La décision du Sénat intervient alors que l’agriculture biologique est en croissance. L’année dernière, la consommation de produits issus de l’agriculture biologique a connu une hausse de 0,8 % "en valeur des dépenses des ménages, soit 12,2 milliards d’euros", selon les chiffres de l’Agence Bio.
Cette augmentation est portée par les légumes (+ 9 %), les vins (+ 8 %) et les fruits (+ 3 %). Ils sont principalement achetés par les Français dans les commerces de proximité, les magasins spécialisés dans le bio et par la vente directe.
Mais "le bio est sorti de la feuille de route de la plupart des distributeurs ; plus aucun ne présente d’objectif chiffré en matière d’agriculture biologique", constate la Fédération pour la nature et l’homme (FNH). Cela se répercute sur le porte-monnaie des consommateurs. Les prix du "bio" sont entre 60 % et 70 % supérieurs à ceux des produits issus de l'agriculture conventionnelle.
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Autre aspect négatif, le nombre de surfaces agricoles cultivées en "bio" diminue. Ces deux dernières années, environ 110 000 hectares ont été reconvertis. La France est même "en retard sur ses propres objectifs" de développement de la filière, comme le rappelle l’Agence Bio. La loi d’orientation agricole, votée en février dernier, fixe à 21 % la part des surfaces bio d’ici 2030. Elles ne représentent actuellement que 10,1 % des surfaces totales, selon l’Agence.
Un désengagement politique
Cette situation entre dans un contexte politique défavorable au "bio". Le ministère de l’Agriculture a décidé de réaffecter une partie des crédits de la Politique agricole commune européenne (PAC) dédiée à la conversion de surfaces agricoles vers le "bio". La ministre, Annie Genevard, a précisé le 1ᵉʳ juillet dernier que cette enveloppe serait attribuée au développement d’autres modèles agricoles. Selon les estimations de la Fédération nationale d’agriculture biologique (FNAB), les exploitations biologiques pourraient représenter 1 % du budget de la PAC d’ici 2028.