La proposition de loi contre la fast fashion, en plein essor grâce au développement du e-commerce, devrait être votée le 10 juin par le Sénat.
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Société

Shein s’allie à Magali Berdah pour protester contre une proposition de loi sur la fast fashion

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Dans une série de vidéos publiées sur TikTok, Magali Berdah, ex-agente d’influenceurs, collabore avec Shein. La marque d’ultra fast fashion redoute l’adoption d’une proposition de loi visant à lutter contre l’impact environnemental du textile.  

"La mode est un droit, pas un privilège", déclare Magali Berdah, femme d’affaires et ex-agente de personnalités de la téléréalité, dans une vidéo postée sur son compte TikTok. Découverte par le grand public à la suite d'affaires judiciaires l'accusant de pratiques commerciales trompeuses, elle a publié la semaine dernière une série de vidéos en partenariat avec Shein

La mode polluante par excellence 

Géant de l’industrie textile, Shein est régulièrement épinglée pour ses atteintes à l’environnement et aux droits humains. Le modèle de la marque chinoise repose en effet sur l'extrême rapidité, proposant chaque jour 8 000 nouveaux modèles de vêtements, chaussures et accessoires de mode à des prix dérisoires. 

Pour soutenir cette production accélérée, Shein s’appuie sur le travail d’ouvriers et surtout d’ouvrières originaires des régions les plus pauvres du monde, travaillant "11 à 12 heures par jour, avec un seul jour de congé par mois – soit plus de 75 heures par semaine" dans des "ateliers informels sans issues de secours et aux fenêtres condamnées", rapporte l’organisme de surveillance suisse Public Eye dans un rapport publié en novembre 2021. 

Ce modèle économique permet à la marque de proposer des tee-shirts à moins de 6 euros et des robes ne dépassant pas les 12 euros sur un site continuellement alimenté en offres promotionnelles. De quoi prétendre défendre une ambition sociale, alors que l’inflation cumulée sur 3 ans a atteint 12,8 % en France. 

Une rhétorique sociale

Cette nouvelle stratégie constitue le fil rouge des opérations de communication de la marque depuis quelques mois, comme en témoignent les affiches réalisées en collaboration avec l’agence publicitaire Havas, qui ont pour slogan "Pourquoi la mode ne serait réservée qu’aux riches ?".

C’est cette même approche qui est utilisée par Magali Berdah. Micro à la main, la professionnelle de l’influence interroge des passants, tous clients de la marque chinoise, sur une proposition de loi actuellement débattue au Sénat. 

@magali.berdah *collaboration commerciale /@SHEIN France ♬ son original - Magali.Berdah

Le texte, baptisé "Proposition de loi visant à réduire l'impact environnemental de l'industrie textile", prévoit de renforcer la sensibilisation des consommateurs aux impacts de la "mode éphémère" et d’en limiter la publicité

La version retenue par l’Assemblée nationale introduirait aussi un malus écologique, taxant progressivement les produits à l’impact écologique important. Ainsi, de 5 euros en 2025, le malus s’élèvera en 2030 à 10 euros. 

Selon Magali Berdah, cette proposition aurait pour principale conséquence de limiter l’accessibilité des Français aux revenus modestes à des articles de mode bon marché. Une rhétorique très critiquée par plusieurs acteurs du secteur.

"Une honte absolue"

Yann Rivoallan, président de la Fédération Française du Prêt à Porter Féminin (FFPAPF), qualifie cet argument de "cynisme absolu" dans une interview à ID. Il explique que Shein incite surtout à la surconsommation : "À coup de rabais de quelques centimes, ils incitent les gens à acheter encore plus qu'ils n'en ont besoin", menant selon lui à un appauvrissement.

Pour aller plus loin : "La mode éthique dans nos dressings” 

Il souligne également que l’essor du commerce en ligne est un coup dur pour les boutiques physiques, notamment dans le secteur du textile, impliquant de nombreuses suppressions de postes. "Ces personnes que (Shein) cible sont les personnes directement touchées par toutes ces destructions d'emploi (...). Prétendre être le défenseur de ces classes populaires alors qu'on en est les fossoyeurs, c'est une honte absolue."

Spécialisé dans les thématiques liées à l’écologie, le journaliste Hugo Clément s’est aussi emparé du sujet et a répondu à Magali Berdah dans une vidéo postée sur ses réseaux sociaux. Il pointe avec ironie la posture journalistique adoptée par cette dernière à des fins de lobbying.