L'État "renverse la chaîne de responsabilité" au détriment des communes en matière de préservation de la ressource en eau.
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Société

Pollution de l'eau: les communes évoquent "un renversement" des responsabilités

L'État "renverse la chaîne de responsabilité" au détriment des communes en matière de préservation de la ressource en eau, a estimé mercredi une fédération de collectivités, en pleine concertation sur la protection des captages.

"Plus ça va, plus on voit l'État (...) renverser la chaîne de responsabilité", a déclaré à l'AFP Régis Taisne, chef du département cycle de l'eau à la FNCCR, une fédération de collectivités qui représente, pour la gestion de l'eau, une population totale de plus de 51 millions d'habitants, lors d'un entretien en marge d'une conférence de presse sur l'eau potable.

"La collectivité qui se retrouve responsable à la fin pour les captages" d'eau (...) "n'a aucun levier pour interdire à une entreprise un rejet, (...) "n'a aucun levier sauf à la fin, essayer d'indemniser les agriculteurs pour essayer d'améliorer les pratiques, (...) et puis traiter et assumer la responsabilité finale vis-à-vis de l'usager", a déclaré M. Taisne.

Une prise de position comme un écho aux déclarations des maires de villages des Ardennes et de la Meuse, qui se disent "abandonnés" par l'État, après la découverte l'été dernier de taux record de "polluants éternels" dans l'eau du robinet.

Parmi "les gens qui peuvent agir, on a évidemment l'industriel - c'est quand même le premier qui déverse des cochonneries - et ses sous-traitants, et on a quand même un État qui est lui le régulateur", et a la possibilité "d'interdire l'utilisation de molécules qui posent problème, et en tout cas, de surveiller", a insisté M. Taisne, pour qui la problématique des PFAS, "ça fait quand même 50 ans qu'on en parle".

Les collectivités dans l'incapacité d'avancer des financements 

En cas de problème, "la collectivité finalement se trouve responsable de trouver les solutions, de financer, de porter le poids politique d'augmentation de tarifs, peut-être demain d'aller au pénal parce qu'elle sera accusée d'empoisonnement", craint M. Taisne.

Interrogée par l'AFP, Annick Dufils, maire de Malandry, commune ardennaise dont l'eau est polluée par les PFAS, a indiqué qu'une interconnexion de sa commune à un autre réseau d'eau potable "pourrait se chiffrer à 1,2 million d'euros", selon une estimation de la communauté de communes.

"C'est infinançable par aussi peu d'habitants", a estimé M. Taisne, qui réclame à l'État "à la fois un soutien politique, un soutien réglementaire, et de toute évidence, en tout cas en milieu rural, il y aura besoin d'un soutien financier".

Nous sommes conscients des difficultés financières que cette situation entraîne pour les communes concernées.

L'agence de sécurité sanitaire Anses a publié mercredi un rapport d'ampleur, qui recommande notamment de contrôler davantage de polluants éternels dans l'eau, mais aussi dans les aliments.

"Nous sommes conscients des difficultés financières que cette situation entraîne pour les communes concernées", a assuré à propos des villages des Ardennes et de la Meuse la nouvelle ministre de la Transition écologique, Monique Barbut, interpellée lors de la séance des questions au gouvernement par la sénatrice des Ardennes Else Joseph (LR).

"Nous avons diligenté une mission d'inspection sur le financement de la dépollution des eaux destinées à la consommation humaine, qui doit nous faire des propositions dans les trois mois à venir", a-t-elle indiqué.

Avec AFP