Nouvel épisode judiciaire du scandale des voitures diesel truquées: après Volkswagen, qui a versé en 2022 des dizaines de millions de livres aux automobilistes britanniques, cinq autres constructeurs, dont Renault et Peugeot-Citroën, font face à partir de lundi à la justice britannique.
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Société

Dieselgate: cinq géants de l'automobile face à la justice à Londres

Nouvel épisode judiciaire du scandale des voitures diesel truquées: après Volkswagen, qui a versé en 2022 des dizaines de millions de livres aux automobilistes britanniques, cinq autres constructeurs, dont Renault et Peugeot-Citroën, font face à partir de lundi à la justice britannique.

L'allemand Mercedes, le japonais Nissan et l'américain Ford sont également mis en cause dans cet énorme procès, prévu sur trois mois devant la Haute Cour de Londres. Tous nient avoir volontairement cherché à contourner les tests antipollution avec des logiciels de trucage.

La décision pourrait faire jurisprudence et s'imposer à de nombreux autres constructeurs, avec à la clé "des milliards de livres" de compensation, affirme à l'AFP Martyn Day, du cabinet d'avocats Leigh Day, principal représentant des plaignants.

Dans un quartier résidentiel du sud de Londres où s'alignent de coquettes maisons en brique, Adam Kamenetzky, l'un de ces automobilistes, ne décolère pas. Il estime avoir été trompé lorsqu'il a choisi en 2018, avant la naissance de ses jumeaux, un SUV Mercedes gris censé être moins polluant.

"Nous conduisons une voiture qui a perdu de la valeur" et "qui est peut-être plusieurs dizaines de fois plus polluante qu'elle ne devrait l'être", déplore auprès de l'AFP le Londonien de 45 ans, qui sera lundi à l'ouverture du procès.

 Ramifications mondiales 

Dans ce vaste scandale aux ramifications mondiales, les plus grands constructeurs sont suspectés d'avoir truqué des véhicules pour passer les contrôles antipollution, notamment en ce qui concerne les émissions d'oxydes d'azote (NOx).

A la suite d'accusations de l'agence environnementale américaine, Volkswagen, premier mis en cause, avait reconnu en 2015 avoir commercialisé plus de 11 millions de véhicules équipés d'un logiciel détectant les phases de tests pour diminuer ses émissions. L'affaire éclabousse depuis les autres constructeurs, avec des procédures dans plusieurs pays.

"Tous les grands fabricants semblent avoir été impliqués", poursuit Me Day. Ils auraient, selon lui, "conservé une grande partie de leur ancienne technologie" pour "des raisons d'économie", tout en s'assurant que les émissions seraient moindres dans les conditions de test.

D'autres constructeurs font l'objet de plaintes au Royaume-Uni, portant à 1,8 million le nombre total de conducteurs demandant compensation, précise son cabinet, qui cite, outre Volkswagen-Porsche, Vauxhall-Opel, Jaguar Land Rover, BMW, FCA-Suzuki, Volvo, Hyundai- Kia, Toyota et Mazda.

Approchés par l'AFP, Ford et Mercedes rejettent des "allégations sans fondement". Renault et Stellantis, la maison-mère de Peugeot et Citroën, assurent que les véhicules vendus étaient tous "conformes" aux réglementations. Nissan n'a pas souhaité faire de commentaire.

"Justifiables" 

Les constructeurs estiment que les fonctionnalités permettant de faire varier les émissions des véhicules s'expliquent par des raisons techniques (protéger les moteurs, économiser du carburant...) et non par une volonté de se soustraire au contrôle.

Selon Mercedes, qui a expliqué sa position à l'AFP, ces dispositifs "sont justifiables d'un point de vue technique et juridique". La marque ajoute qu'elle effectue depuis 2017 "volontairement des mises à jour logicielles (...) afin de réduire davantage les émissions" d'oxydes d'azote.

En attendant, Adam Kamenetzky voudrait bien changer de véhicule, mais ne peut se permettre à l'heure actuelle un modèle électrique. "Nos mains sont en quelque sorte liées jusqu'à ce que nous sachions si nous obtiendrons ou non une compensation de la part de ces fabricants", explique-t-il.

Cela prendra du temps: le procès se concentrera d'abord sur la responsabilité des constructeurs, avant une éventuelle seconde procédure à partir d'octobre 2026 concernant les indemnisations.

En 2020, la Haute Cour de Londres avait estimé que Volkswagen avait bien mis en place un "logiciel truqueur" en infraction des règles européennes dans des voitures vendues au Royaume-Uni.

Sans reconnaître sa responsabilité dans ce dossier, le groupe allemand avait préféré mettre fin aux procédures en 2022 en acceptant de régler à l'amiable 193 millions de livres (222 millions d'euros) à 91.000 automobilistes britanniques.

Avec AFP