Cette loi "Climat et résilience" qui doit être présentée en février en Conseil des ministres est censée reprendre près de la moitié des 149 propositions de la Convention citoyenne pour le climat (CCC) destinées à réduire de 40 % les émissions de gaz à effet de serre de la France d'ici 2030 par rapport à 1990. Comparées aux objectifs, "les nombreuses mesures du projet de loi, considérées une par une, sont en général pertinentes mais souvent limitées, souvent différées, souvent soumises à des conditions telles qu'on doute de les voir mises en oeuvre à terme rapproché", estime le Cese dans un avis publié mercredi.
Dire que ce projet de loi "s'inscrit" dans la Stratégie nationale bas-carbone (SNBC) qui vise à la neutralité carbone en 2050, est "un abus de langage", poursuit le Conseil, s'inquiétant également des moyens mis sur la table pour accompagner les mesures. Rénovation des logements, transport ferroviaire, politiques d'urbanisme ou de préservation de la biodiversité... "Faute des moyens dans les services chargés de leur application et de leur contrôle, (certaines) mesures resteront lettre morte", met-il en garde. Certes, le plan de relance prévoit des financements "dans les ordres de grandeur de ce qu'il faudrait chaque année", a noté Michel Badré, un des rapporteurs de l'avis. "Mais je ne suis pas sûr qu'on va faire tous les ans ou tous les deux ans un plan de relance de ce niveau", dit-il à l'AFP.
Le projet de loi prévoit notamment la fin de la location des logements considérés comme des passoires thermiques en 2028, la mise en place du "CO2-Score" pour afficher l'impact sur le climat des produits et services, l'interdiction des vols domestiques s'il existe une alternative en train en moins de 2h30, ou l'interdiction de la publicité pour les énergies fossiles.
Sur ce point très symbolique, les Citoyens avaient proposé une interdiction de la publicité pour les produits les plus polluants, ciblant notamment les SUV. Le Cese appelle les parlementaires à se ressaisir de la question lors de l'examen du texte.
"Demain ce sera pire"
"Depuis 20-30 ans, il y a eu des restrictions de la publicité sur le tabac et l'alcool, qui ont fait grincer, mais qui ont été acceptées par la société et qui produisent des effets", rappelle Michel Badré. Selon l'étude d'impact du gouvernement, le projet de loi permettra de "sécuriser" entre la moitié et deux tiers de la baisse des émissions prévues d'ici 2030. L'exécutif souligne que cette loi représente seulement une partie du chemin. "Les mesures du projet de loi viennent compléter un puzzle qui est en train de s'étoffer", a reconnu Claire Bordenave, autre co-rapporteur de l'avis du Cese. Mais "les changements qualitatifs de modèle, économique, social et climatique, ne sont pas au rendez-vous", a-t-elle déclaré à l'AFP.
Un avis partagé par les défenseurs du climat qui ont largement dénoncé le détricotage par le gouvernement des propositions de la Convention. Pour Laurence Tubiana, architecte de l'accord de Paris sur le climat et co-présidente du comité de gouvernance de la CCC, le compte n'y est pas non plus. Le projet de loi reprend "un peu la philosophie" de la CCC et "une bonne partie des idées", mais "on repousse dans le temps les obligations et les objectifs", a-t-elle déclaré mercredi devant la commission aménagement du territoire et développement durable du Sénat. "Même si ça nous coûte de l'argent, qu'il y a des efforts importants à faire, et bien il faut le faire parce que demain ça sera pire, il faudra faire plus, ce sera plus douloureux", a de son côté mis en garde Jean-Pierre Cabrol, co-président de l'association Les 150, qui rassemble la majorité des Citoyens. Ces derniers doivent se réunir prochainement pour répondre formellement au gouvernement.
Avec AFP.
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