"Coupable", selon plusieurs ministres. Alors que la mairie écologiste de Lyon impose dès ce 22 février "un menu unique sans viande" dans ses cantines scolaires, cette mesure n'est pas au goût de tous. Ce week-end, certains membres de l'exécutif se sont offusqués d'une telle décision du maire EELV Grégory Doucet. Celui-ci s'en défend en invoquant une restriction "sanitaire" et rappelle que la même décision avait déjà été prise par son prédécesseur et ex ministre de l'Intérieur Gérard Collomb quelques mois auparavant... sans que personne ne crie gare. Alors que la mesure prend effet dès cette rentrée scolaire et doit durer jusqu'aux prochaines vacances de Pâques, le ministre de l'Agriculture Julien Denormandie a annoncé avoir saisi le préfet de la région.
Indignation de la droite et de certains membres du gouvernement
L'opposition de droite a mis le feu aux poudres lors du Conseil municipal, allumant la première mèche de la polémique. "Cette manière d’asséner un choix, sans aucune alternative possible, est proprement inadmissible", s’est indigné jeudi le sénateur Etienne Blanc, candidat malheureux à la mairie l'an dernier. "Dans la ville de la gastronomie, la majorité écologiste profite de la crise sanitaire pour faire passer des mesures idéologiques sans aucune concertation", a abondé Béatrice de Montille, élue LR dans le 3e arrondissement. La polémique a pris une tournure nationale ce week-end, avec les réactions de membres du gouvernement.
"En plus de l'insulte inacceptable aux agriculteurs et aux bouchers français, on voit bien que la politique moraliste et élitiste des Verts exclut les classes populaires. De nombreux enfants n'ont souvent que la cantine pour manger de la viande", a fustigé sur Twitter le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin, dénonçant une "idéologie scandaleuse". Son collègue des Comptes publics, Olivier Dussopt, a pour sa part jugé ce "choix antisocial et doctrinaire". Quant au porte-parole du gouvernement Gabriel Attal, interrogé lors de l’émission le Grand Jury, ce dernier a déclaré : "Je suis toujours pour qu’on laisse le choix aux élèves. Il ne faut pas que ce soit une décision idéologique". Enfin, pour Julien Denormandie, il faudrait arrêter "de mettre de l’idéologie dans l’assiette de nos enfants ! Donnons-leur simplement ce dont ils ont besoin pour bien grandir. La viande en fait partie", a-t-il lancé avant de préciser avoir saisi le préfet du Rhône.
Des "contraintes sanitaires" et une mesure déjà mise en place par l'ex-maire de la ville
La mairie de Lyon s'est fermement défendue de toute idéologie et a invoqué un choix lié aux contraintes sanitaires. Dans un mail daté du 15 février adressé aux élus d'arrondissement et faisant le point sur les mesures sanitaires dans les écoles, l'adjointe chargée de l'Éducation Stéphanie Léger annonçait la mise en place d'un "menu unique sans viande pour pouvoir servir plus rapidement les élèves et fluidifier les repas". La municipalité a ainsi rappelé qu'une distance de deux mètres doit être respectée entre les élèves à la cantine, selon les recommandations de l'Éducation nationale, ce qui corse l'organisation des repas puisqu'il est impossible de faire manger tous les élèves en même temps. Le recours temporaire à ce menu unique vise à fluidifier le service pour que les 29 000 repas prévus chaque jour puissent être servis entre 11h30 et 13h45. "Le nouveau protocole sanitaire impose une distanciation de deux mètres dans la restauration scolaire. Le menu unique va nous permettre d'accélérer le service et ainsi nous permettre d'accueillir tous les enfants", a ainsi justifié Stéphanie Léger auprès de l'AFP.
Sans viande mais avec œufs et poisson, ce menu "reste équilibré" et permet "de n’exclure aucun enfant", affirme l’adjointe à l'Éducation. "C’est tout simplement du bon sens pratique", justifie le maire, Grégory Doucet rappelant, au passage, que le même choix avait été fait à la sortie du premier confinement, au printemps, par la précédente équipe de Gérard Collomb. À défaut de viande, personne n’avait alors décelé la moindre idéologie dans les assiettes. "Que la droite qui s’est alliée à mon prédécesseur au moment des municipales crie à l’idéologie aujourd’hui, me fait sourire", a-t-il ajouté sur Franceinfo.
Le préfet régional pour trancher
La saisine du préfet du Rhône par Julien Denormandie se fonde sur un arrêté de 2011 fixant les règles nutritionnelles dans la restauration scolaire, selon lequel "au moins quatre repas" sur vingt consécutifs, doivent être servis "avec, en plat protidique, des viandes non hachées de bœuf, veau, agneau ou des abats de boucherie". Interrogé sur l’absence de réaction l’an dernier, le cabinet du ministre a évoqué "une vraie différence de situation entre mai et maintenant" : "Nous ne sommes plus dans une situation d’urgence, face à une situation exceptionnelle". Dans un entretien avec l’AFP, Julien Denormandie avait appelé les élus locaux à "faire le pari" de la viande de jeune bovin dans les menus scolaires, afin de soutenir des éleveurs.
À Lyon, au-delà de la polémique, l’exécutif veut profiter de l’échéance prochaine du contrat d’Elior, groupe de restauration collective titulaire de la délégation de service public, pour consommer "plus local, plus végétal et durable" dans les cantines scolaires. Une politique qui va dans le sens du "plan protéines végétales" mené par le gouvernement, selon Grégory Doucet.
Avec AFP.
Vous avez apprécié cette information ? Abonnez-vous à notre newsletter en cliquant ici !
Pour aller plus loin et agir à votre échelle, commandez notre guide « L’écologie à la maison ».
Au sommaire : interviews, analyses, conseils et astuces… 68 pages de solutions pour une vie quotidienne placée sous le signe de l’écologie dans toutes les pièces de la maison !
Pour en savoir plus et commander votre guide, c’est par ici.
#TousActeurs