Un manifestant contre le projet d'autoroute Toulouse-Castres, lors de l'opération d'évacuation de la ZAD, à Saix, le 22 octobre 2023.
© VALENTINE CHAPUIS/AFP
Politique

A69 : les dernières semaines de mobilisation vues par les "écureuils"

Dispersion de la ZAD, commission d'enquête parlementaire, visite du rapporteur de l'ONU et de Greta Thunberg... Ces dernières semaines, les choses ont bougé pour les opposants de l'autoroute A69. Certains, appelés les "écureuils", occupent les arbres qu'ils souhaitent sauver du rasement. ID interroge l'un d'entre eux, membre du GNSA.

Les tensions montent entre les opposants au projet de l’autoroute A69 et les forces de l’ordre. Après le passage de Greta Thunberg le 10 février, c’est le rapporteur de l’ONU Michel Forst qui s’est rendu sur place la semaine dernière. Jeudi 29 février, il a demandé aux autorités françaises une meilleure protection des opposants au projet, dénonçant une criminalisation de la désobéissance civile en Europe.

Pour rappel, la construction de l’autoroute reliant Toulouse à Castres a débuté il y a un an. Depuis cet été, plusieurs associations s’y opposent, jugeant le projet inutile et écocide. La GNSA (Groupe National de Surveillance des Arbres), créée par le militant Thomas Brail, en fait partie. Le collectif se mobilise pour sauver les arbres destinés à être rasés. ID a interrogé Jean-Baptiste Laval, dit Jibon, un des "écureuils" du collectif.

Quelles actions menez-vous en ce moment ?

Je tiens tout d’abord à rappeler que les écureuils du GNSA ne font rien d’illégal. Nous siégeons sur les arbres afin qu’ils ne soient pas rasés et pour protester contre un projet qui nuit à l’environnement et à l'économie des habitants du Tarn. Aucune loi n’interdit de grimper ou d’occuper un arbre. Nous, les écureuils du collectif, mettons un point d’honneur à mener des actions non violentes à visage découvert. Nous souhaitons communiquer avec les politiques et les forces de l’ordre. Ce qui est retenu contre nous, c’est de l’obstruction de chantier d’intérêt public.

Ces derniers mois, plusieurs écureuils qui ne font pas partie du GNSA sont venus nous soutenir. Eux aussi sont défavorables à ce projet, et portent parfois d’autres revendications. Certains sont montés un temps avec nous, d’autres ont formé des ZAD (zones à défendre) au pied des arbres occupés. Malheureusement, il arrive que quelques-uns mènent des actions véhémentes, auxquelles nous ne sommes pas associés.

En parallèle, une commission d’enquête parlementaire a débuté le 15 février. Des auditions ont lieu pour trancher sur la légalité du projet d’autoroute. Le problème est qu’à cause du secret des affaires, certains documents sont grisés. Nous demandons à ce qu’ils soient révélés et sommes prêts à parier que le montage juridique et financier sera alors jugé illégal. Le problème est que ce type de procédure prend environ six mois. Entre-temps, les travaux avancent dans cette zone à fort enjeu écologique.

Qu’a changé la venue de Greta Thunberg ?

Lorsque Greta Thunberg est venue nous soutenir, ça a fait du bruit et la tension est montée d’un cran. Suite à cela, les forces de l’ordre ont dispersé la ZAD il y a deux semaines. Depuis, ils tentent de nous déloger des arbres. Ces confrontations ont alerté Michel Forst, le rapporteur des Nations Unies sur les défenseurs de l'environnement. Il est venu constater la situation sur place, puis a demandé aux autorités françaises une enquête sur les actions de la police contre nous. La LDH (Ligue des Droits de l'Homme) est également venue en observation.

En conclusion, la venue de Greta Thunberg nous a donné de la visibilité et a permis d’alerter l’ONU. D’autres figures publiques nous soutiennent, comme l’eurodéputée Marie Toussaint ou le co-auteur du sixième rapport du GIEC Christophe Cassou. Savoir que nous sommes entendus sur nos revendications et sur la question des violences policières légitime notre engagement. Ça nous donne de la force car, honnêtement, ce n’est pas facile tous les jours.

Quelles difficultés rencontrez-vous ?

Ces dernières semaines, les actions des forces de l’ordre à notre égard se sont multipliées. Avant la dispersion de la ZAD, ils jetaient déjà de l’essence sur les arbres, entre autres. Depuis, cela fait deux semaines qu’ils sont au pied des arbres. Ils essaient de grimper et nous enlèvent vivres et couchages dans le but de nous épuiser. Ils emploient des méthodes inhumaines, comme l’utilisation de stroboscopes la nuit. Les écureuils se sentent pris en otage.

Un autre problème que nous rencontrons est le non respect des engagements des policiers et des élus. Il y a quelques jours, un écureuil a dû descendre pour raisons de santé. Les forces de l’ordre s’étaient engagées à ne pas le placer en garde à vue. Mais ils l’ont amené au poste après son passage à l'hôpital. De même, la suspension temporaire des travaux qui devait avoir lieu le 10 octobre n’a pas été respectée.

Enfin, nous faisons face à des attaques de la population locale pro-A69. Personnellement, ils ont peint mon camion, mais il y a eu des menaces au couteau ou des bombes artisanales. Sur les réseaux sociaux, les pressions sont permanentes et systématiques. On nous envoie des liens vers des comptes à rebours. Chaque matin, on se réveille en se disant que pour une journée de plus, on est vivants.

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