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La « K-economy » américaine, mythe ou réalité ?

La « K-economy » évoque une économie américaine à deux vitesses, avec l’IA qui flambe et le reste de l’économie qui souffre. La réalité de cette K-economy doit être relativisée, mais, à ce stade, elle participe plutôt à la résilience boursière en maintenant les anticipations de baisse des taux de la Fed. 

Alors que les valorisations boursières américaines flambent, la confiance des consommateurs mesurée par l’université du Michigan s’écroule (graphique 1). En contraste frappant avec l’euphorie généralisée des années 1999-2000, cette dichotomie entre Wall Street et Main Street alimente l’idée d’une « K-economy » américaine, où cohabiteraient boom des dépenses liées à l’intelligence artificielle, et signes de récession.  

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Parmi les signaux négatifs, des inquiétudes sur la consommation apparaissent. Les ventes au détail n’ont monté que de +0,2% en septembre inflation inclue, et certaines sociétés comme Chipotle ou Home Depot alertent sur l’atonie de la consommation des ménages les plus modestes. L’économie de la consommation américaine serait donc, selon une théorie en vogue, elle aussi en forme de « K ». Les ménages aisés, qui bénéficient de l’effet de richesse boursière, continuent d’augmenter leur consommation, alors celle des ménages plus pauvres décline face à un pouvoir d’achat affaibli et un marché du travail atone.   

Les outils statistiques officiels ne permettent pas de valider ou d’invalider cette théorie car les données de consommation par catégories de revenus ne sont disponibles qu’avec plusieurs trimestres de retard. Certaines sociétés privées tentent cependant de « tracer » le consommateur en temps réel. Parmi celles-ci, la société « Numerator » a calculé que la consommation des ménages qui gagnent plus de $100.000 par an avait augmenté de +4,3% au T3 2025 (vs T3 2024, inflation inclue), contre +3,8% pour ceux qui gagnent moins de $60.000. La différence est là, mais elle est assez faible. Quant au manque de confiance affiché par les ménages, il est tout aussi marqué chez les plus riches que chez les plus modestes (graphique 2). 

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Le tableau d’ensemble reste donc assez clair, et relativement stable : depuis 2022, les ménages américains affichent une faible confiance, mais la consommation reste soutenue, même si elle ralentit progressivement. Après +2,9% en 2024 hors inflation, elle devrait croitre de +2,5% en 2025, malgré le choc des droits de douane. Le consensus de prévision table sur une poursuite du ralentissement progressif en 2026, à +1,9%, mais les révisions récentes sont plutôt orientées à la hausse (graphique 3). 

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La thèse parfois entendue d’une récession américaine masquée par le boom de l’IA est donc, à ce stade, difficile à défendre, d’autant que la contribution de l’IA au PIB américain est souvent improprement calculée, et donc exagérée. Il est en revanche exact de dire que, hors IA, l’économie américaine est devenue plus vulnérable en raison de l’effet des droits de douane, qui correspondent à une hausse d’impôts, d’une moindre immigration et d’une nette baisse des offres d’emploi.  

Quant au sentiment très déprimé des ménages, il convient de le relativiser, car, depuis la crise du Covid, la différence entre les deux mesures phares de la confiance des ménages est devenue impressionnante (graphique 4). Celle de l’université du Michigan est connue pour accorder un poids très important au ressenti inflationniste et au pouvoir d’achat, alors que celle du Conference Board est plus équilibrée entre jugements sur l’inflation, les revenus et le marché du travail.  

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Cette divergence nous permet de comprendre que la question du niveau des prix, et donc du pouvoir d’achat réel et ressenti, est probablement la cause principale de la dégradation du sentiment. Le choc des prix du Covid mettra du temps à être digéré – et la hausse des droits de douane n’a fait que relancer le traumatisme.  

La situation étonnante du marché de l’immobilier pèse aussi fortement. Malgré le choc des hausses de taux d’intérêt des années 2022-2023, en effet, les prix de l’immobilier aux Etats-Unis ne se sont pas ajustés à la baisse. Résultat : une crise d’accessibilité aussi sévère que celle des années 80, quand les taux à long terme dépassaient largement 10% (graphique 5).  

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Entre indicateurs de sentiment parfois exagérément déprimé, réalités difficiles comme celle de l’immobilier, et ralentissement modéré de la consommation, le tableau d’ensemble est donc celle d’une économie américaine où les divergences et les paradoxes abondent. L’idée d’une « K-economy » n’est donc pas entièrement absurde. 

Pour les marchés financiers, ce n’est pas forcément une mauvaise nouvelle car le manque de confiance dans l’économie – en plus d’une inflation limitée malgré les droits de douane – renforce la vision des investisseurs d’une Réserve fédérale américaine réactive à tout signe de ralentissement. Il a d’ailleurs suffi d’un chiffre un peu moins bon de ventes au détail pour le mois de septembre pour relancer les anticipations de baisse de taux de la Fed le 10 décembre prochain. Dans un contexte de hausse des profits des sociétés, cette réactivité soutient la résilience des marchés financiers (graphique 6). Elle nous conforte aussi dans l’idée que les obligations d’Etat – dont les prix sont sensibles à la baisse des taux d’intérêt – gardent leur utilité comme couverture aux investissements en actions, au cas où l’économie américaine ralentirait plus que prévu.  

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Contenu rédigé par Dorval AM.