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En bref

TotalEnergies sous les huées des manifestants climatiques pour l'ouverture de son assemblée générale

"Total climate criminal": l'assemblée générale de TotalEnergies a débuté mercredi à Paris sous haute tension et à huis clos, l'entrée de la salle étant bloqué par des manifestants écologistes alliés de facto à certains actionnaires déterminés à influencer le plan climatique du géant pétrolier français.

Malgré de nombreux vigiles et des policiers, environ 200 militants d'ONG environnementales - dont Greenpeace, Alternatiba, ANV Cop 21 et les Amis de la Terre- ont réussi à bloquer l'accès principal de la salle Pleyel, où se tient l'AG, se faisant interpeller voire invectiver par quelques actionnaires bloqués. A l'ouverture de la séance qui se tient par conséquent "à huis clos" et en ligne, le PDG Patrick Pouyanné s'est excusé auprès des actionnaires n'ayant pu accéder à la salle.

"La séance peut se dérouler normalement" a-t-il néanmoins affirmé. "Plus de 28.000 actionnaires sont présents, représentés ou ont voté par correspondance ce qui représente un quorum de 68,87% des actionnaires", a-t-il dit, jugeant le quorum atteint. En même temps, le groupe tweetait abondamment en réponse aux critiques. A l'extérieur, le calme est revenu mais les manifestants, encerclés par une vingtaine de policiers, ne bougent pas. Ils jugent le groupe pétrolier et gazier "totalement irresponsable" car il continue à exploiter et développer pétrole et gaz. Certains se sont assis au sol menottés entre eux, quand d'autres ont déployé une large banderole "stop projets énergies fossiles", en Angola, en Tanzanie ou au Mozambique où le groupe est implanté.

Ils dénoncent également la présence du groupe en Russie. L'ex-Total, rebaptisé l'an dernier, "finance la machine de guerre de Poutine", indique à l'AFP Svetlana, activiste de Stand with Ukraine. "Total continue de fonctionner avec un modèle économique qui est celui du monde d'hier", estime Jean-François Julliard, directeur général de Greenpeace France, présent aussi sur place. De l'intérieur aussi, la colère gronde: au moins huit petits actionnaires sont décidés à influencer l'orientation climatique du groupe, un mouvement observé dans de multiples grandes entreprises en France, aux Etats-Unis et ailleurs cette saison. L'AG de Shell, mardi, a été suspendue deux heures à cause de militants présents à l'intérieur.

Actionnaires en colère

Parmi les actionnaires rebelles, Edmond de Rothschild ou La Financière de l'Echiquier, pas spécialement connus pour leur activisme actionnarial, ainsi que le néerlandais MN. Mais aussi Meeschaert Amilton, Mandarine gestion et Sycomore AM, ou les Assurances du Crédit Mutuel. Tous ont annoncé qu'ils voteraient contre le plan climatique soumis aux actionnaires.

En cause: l'anticipation par TotalEnergies d'une "forte augmentation de la production des hydrocarbures sur 2019-2030" mais également le regret que "les excédents découlant des prix actuels élevés des hydrocarbures ne soient pas affectés prioritairement à des investissements additionnels dans le renouvelable", selon les Assurances du Crédit Mutuel. D'autant que le groupe a réalisé un bénéfice de 16 milliards de dollars l'an dernier.

"L'année 2021 s'est traduite par un fort rebond du pétrole et du gaz, entrainant les prix à des niveaux exceptionnels pour le gaz et élevés pour le pétrole (...) Nous étions rentrés prudemment dans l'année 2021, finalement nous avons bénéficié d'un environnement favorable et avons su en tirer partie", s'est félicité M. Pouyanné à l'attention des actionnaires.

Nouvelle acquisition verte

TotalEnergies dit viser à terme la neutralité carbone au milieu du siècle, et s'est engagée, parmi d'autres objectifs, à réduire de plus de 30%, par rapport à 2015, les émissions dégagées par les produits pétroliers qu'elle vend. Et elle investit dans les renouvelables, ajoutant mercredi un grand producteur américain, Clearway, à son portefeuille.

Mais la major ne cesse de dire qu'elle veut continuer à répondre à la demande en gaz et en pétrole tant qu'il y en a. M. Pouyanné a seulement dit que le pic de production de pétrole de TotalEnergies serait atteint dans la décennie 2020, estimant qu'un arrêt immédiat serait radical. Dans ce contexte, il est probable que la résolution relative au plan climat -très largement adoptée l'année dernière avec 92% des voix- soit à nouveau approuvée. "Il faut se poser la question: qui pollue, Total ou celui qui utilise sa voiture pour amener ses enfants à l'école à 100 mètres?", souligne Bernard Favre-Bonté, petit porteur interrogé par l'AFP, et soutien de TotalEnergies.

Avec AFP.