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En bref

Défis de l'après-pandémie: les économistes mandatés par Macron livrent leurs propositions

Changement climatique, inégalités, vieillissement : le groupe d'économistes français et internationaux missionné par Emmanuel Macron a livré mercredi ses propositions pour mettre fin à la "procrastination politique" sur ces défis majeurs, en prônant une vaste réforme des retraites et de l'impôt sur les successions.

Pilotée par le prix Nobel Jean Tirole et l'ancien chef économiste du FMI Olivier Blanchard, la commission de 26 économistes a oeuvré à "présenter des recommandations pour rendre les politiques économiques plus efficaces".

Le rapport de 500 pages remis mercredi au chef de l'Etat vise à "définir un ensemble de politiques cohérentes, en réfléchissant non seulement à l'analyse économique, mais aussi aux perceptions et à l'acceptabilité des réformes", a expliqué Jean Tirole, lors d'une visioconférence de presse. Si la mission a été lancée en pleine pandémie, le Covid-19 est absent du rapport car il s'agissait de se focaliser sur "les défis de long terme", justifie le Nobel.

Sur le changement climatique, le rapport juge "indispensable" une tarification du carbone ambitieuse au niveau européen, via une réforme du marché des quotas qui inclue les secteurs aujourd'hui exclus, associée à un mécanisme de taxe carbone aux frontières. Il recommande d'investir davantage dans la recherche en créant une instance européenne dédiée, et de développer les normes et les interdictions.

Concernant les inégalités, le rapport prône un effort important sur l'éducation pour résorber l'inégalité des chances, fléau français, ainsi que sur la formation professionnelle, pour un meilleur accès aux emplois dits de qualité. Et il défend la mise en place d'un système fiscal "plus juste", notamment via une réforme totale de l'impôt sur les successions et une taxe internationale sur les multinationales.

Le chapitre consacré au vieillissement insiste sur la nécessité d'une réforme globale du système des retraites, sur la base d'un système universel à points, comme proposé par le gouvernement en 2019, mais en améliorant certains aspects pour la rendre plus acceptable.

L'objectif n'était pas de présenter des "solutions clés en main", prévient Jean Tirole. "Nous nous sommes concentrés sur les grands principes et les grandes lignes des réformes". "On offre un bien public, on espère qu'on convaincra un certain nombre de gens", ajoute Olivier Blanchard.

Les auteurs reconnaissent qu'ils n'ont pas chiffré le coût de ces réformes, même si "certaines sont autofinancées", puisque par exemple les recettes d'une tarification carbone doivent permettre d'indemniser ceux qui vont en souffrir, a expliqué Jean Tirole.

Pour Olivier Blanchard, l'enjeu n'est pas tellement financier. Dans le contexte des taux bas, "il n'y a pas de crise de dette publique à ce stade", donc "si on fait de l'investissement qui permet d'éviter des catastrophes dans le futur ou d'améliorer la croissance, on peut se permettre d'augmenter la dette".

"Phase d'écoute"

Pas question pour l'Elysée de commenter à ce stade les propositions sur le fond, alors que le chef de l'Etat est dans une "phase d'écoute" du pays. "Ce qu'on en retient, plus que telles ou telles mesures, c'est surtout l'approche, le cadre d'analyse global. (...) C'est un rapport qui alerte contre les recettes toutes faites", affirme-t-on.

La réforme des retraites proposée? "C'est un choix autonome de la commission de consacrer une large part du chapitre sur la démographie au système des retraites", commente-t-on.

La refonte de l'impôt sur les successions, alors qu'Emmanuel Macron avait affirmé après le mouvement des gilets jaunes qu'il n'était pas question d'y toucher "tant qu'(il) serai(t) là"? Le rapport insiste sur la nécessité de "taxer mieux" en France, alors que le poids de la fiscalité y est plus important qu'ailleurs, répond l'Elysée.

Après les récents rapports de la Cour des comptes et de la commission Arthuis sur les finances publiques, les recommandations d'experts en matière de politique économique s'accumulent en tout cas sur la table de l'exécutif, à moins d'un an de la présidentielle.

Avec AFP.