Les profils de financiers spécialistes de l'investissement responsable sont encore rares sur le marché du travail
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Finance durable

Sur le marché du travail, on "s'arrache" des profils finance durable encore rares

Les profils de financiers spécialistes de l'investissement responsable sont encore rares sur le marché du travail, où les recruteurs s'arrachent les jeunes dotés d'un peu d'expérience en entreprise plutôt que des diplômés frais émoulus.

Avec le développement de la finance durable et responsable, les sociétés de gestion, même les moins spécialisées, ont dû se doter d'une équipe dédiée aux considérations environnementales, sociétales et de gouvernance (ESG).

"La vague réglementaire très dure de 2022", avec l'entrée en vigueur d'un règlement européen sur les informations en matière d'investissement durable à publier, a créé par ricochet une vague massive de recrutements, relate Christophe Boucher, directeur des investissements d'ABN AMRO Investment Solutions.

Le cabinet de recrutement spécialisé dans la RSE et le développement durable Birdeo a constaté dans une étude sur les métiers de la finance durable qu'"entre 2019 et 2023", le nombre de candidats qu'il a placés "sur la thématique ESG a doublé".

Ces candidats sont principalement "des personnes avec quatre à cinq années d'expérience", qui ont acquis des compétences ESG lors de leurs précédentes fonctions, précise auprès de l'AFP, Isabelle Mouret de Lotz, directrice du recrutement des cadres dirigeants chez Birdeo.

Ce sont ces profils que les entreprises "s'arrachent", témoigne-t-elle. Lazard Frères Gestion, par exemple, a recruté cinq personnes totalement dédiées à la finance responsable ces trois dernières années, pour un effectif total qui a augmenté de 32 personnes de juin 2020 à juin 2023, pour 212 salariés.

La société explique à l'AFP avoir choisi "des profils généralistes issus d'écoles d'ingénieur et de commerce avec une formation solide en finance et passionnés par les sujets de durabilité". Mais il fallait aussi que leurs "compétences en finance durable" aient été renforcées "au cours de stages effectués au sein de sociétés de gestion, de banques d'affaires et de cabinets de conseil".

ABN AMRO IS a aussi privilégié des profils de "juniors confirmés", rapporte Christophe Boucher.

Profils qui se payent cher

Pour sa collègue analyste ESG Margot Seeley, "il est encore compliqué aujourd'hui d'avoir quelqu'un de formé en sortie d'école", dont le bagage en finance durable se limite généralement à un cours spécifique au cours du master.

"Les profils qu'on voit passer manquent de connaissances sur les indicateurs ESG et surtout de notions sur comment intégrer les données ESG dans les processus d'investissement", détaille-t-elle auprès de l'AFP.

Pour Margot Seeley, qui a commencé l'investissement responsable avec une thèse sur le sujet en 2018, avec le soutien d'ABN AMRO, le métier s'apprend pour le moment "sur le tas". "On recrute plutôt des affinités pour l'investissement responsable que des compétences", explique-t-elle.

Et pour ceux qui s'intéressent et se sont frottés à la finance durable durant leur parcours, leurs salaires sont sensiblement plus élevés.

"Les postes en finance durable sont mieux rémunérés, entre 30% à 40% de plus que sur la thématique RSE transverse", détaille Birdeo. "A partir de 5 ans d'expérience le salaire fixe est d'environ 70.000 euros par an". Pour un jeune diplômé, il est "d'environ 45.000 euros par an".

Maintenant que les équipes d'investissement sont globalement constituées, la demande pour les profils ESG généralistes se tasse, selon Mme Seeley et ce sont "plutôt des profils de contrôle, d'experts en données" qui sont activement recherchés.

Avec AFP.