Antoine DESBARRIERES est Directeur de l’Association QUALITEL
DR/© Cimay
Environnement

Les Français veulent un logement durable

Dans son dernier baromètre l'association Qualitel s'est intéressée à nos logements avec cette question : peut-on joindre l'utile à l'agréable ? ID s'est entretenu avec Antoine Desbarrieres , Directeur de l’Association QUALITEL pour en savoir plus.

Alors que d'après cette étude 75% des français affirment souhaiter vivre dans un logement durable, la question de ce que recouvre cette notion peut interroger, c'est pourquoi ID s'est entretenu avec Antoine Desbarrières, Directeur de l'association Qualitel.

Le développement durable s’installe aussi chez les Français, est-ce un phénomène nouveau que le logement soit également compris dans cette sphère (pour 75 % des sondés) ?

En effet, selon la dernière édition du Baromètre QUALITEL-Ipsos, réalisé en partenariat avec l’Anah auprès de 4 545 personnes, 75 % des Français ont à cœur de vivre dans un logement respectueux de l’environnement. Mais précisons tout de suite qu’un logement durable n’est pas seulement respectueux de l’environnement. Il doit aussi être confortable, sain et agréable à vivre : ces éléments sont essentiels et les Français l’ont bien compris. Ils ont clairement pris conscience des enjeux environnementaux et leur mode de consommation le démontre tous les jours. Ils ont aussi pris conscience que la manière de construire ou de rénover un logement, et même la façon d’y vivre, ont un rôle à jouer dans ce domaine.

Cela démontre clairement un changement de mentalité des Français

Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si les Français considèrent le logement comme un champ d’action déterminant : dans le top 6 des « écogestes » à adopter, deux concernent l’habitat :  réduire la consommation d’énergie (67 %) et limiter la consommation d’eau (42 %) chez soi.

Qu’est-ce que cela démontre selon vous ?

Cela démontre clairement un changement de mentalité des Français, notamment chez les plus jeunes. Cette envie de logement durable est effectivement d’abord portée par les jeunes générations et notamment les moins de 35 ans, dont 38 % considèrent que vivre dans un logement durable est avant tout un devoir citoyen pour préserver l’environnement (contre 28 % pour les plus de 60 ans). Les moins de 35 ans sont également davantage disposés à passer à l’action, que ce soit en déménageant (67 % d’entre eux contre 34 % pour les plus de 60 ans) ou en rénovant leur habitat (pour 64 % d’entre eux VS 47 % pour les plus de 60 ans). Enfin, 64 % déclarent vouloir privilégier la densité urbaine pour éviter l’accroissement de l’artificialisation des sols. Ils ne sont que 49 % chez les plus de 60 ans.

Il faut simplement que tous les logements deviennent respectueux de l’environnement !

Pourtant, le caractère durable d’un logement n’est pas un critère central de choix, est-ce paradoxal ?

Effectivement, le fait qu’un logement respecte l’environnement n’est un critère de choix que pour 4 % des personnes interrogées dans le cadre du Baromètre QUALITEL. Mais il ne faut pas opposer cela aux critères essentiels que sont la localisation, le prix et la superficie du logement, des critères que l’on comprend par ailleurs fort bien. Le fait qu’un logement soit durable ne doit plus être un critère de choix pour certains, mais la norme pour tous !

Il faut simplement que tous les logements deviennent respectueux de l’environnement !

Et c’est d’autant plus souhaitable de construire et rénover de façon durable quand on sait que ces logements sont bénéfiques pour la planète mais aussi et surtout pour le confort de vie des habitants ! C’est un enseignement tiré du Baromètre qui démontre en effet que les logements durables obtiennent une note de qualité globale* de 7,9/10, contre 5,6/10 pour les non durables. Les logements classés dans la catégorie durable ont d’ailleurs un meilleur score sur tous les critères de qualité essentiels dans l’habitat (confort thermique, acoustique, luminosité, qualité de l’air, niveau d’humidité, adaptabilité aux personnes à mobilité réduite…). Autre enseignement de notre Baromètre, c’est d’autant plus vrai lorsque ces logements sont certifiés par QUALITEL ou rénovés par l’ANAH, qui l’un comme l’autre valorise une qualité globale et multicritère de l’habitat.  

On voit aussi que dans les critères de durabilité, il y a un décalage entre la perception et la réalité de ce qui pèse vraiment…

Aux yeux des Français, le logement durable est d’abord et avant tout assimilé aux économies d’énergie, signe que les politiques publiques en la matière ont porté leurs fruits.

Toutefois, d’autres éléments tels que la préservation de la biodiversité ou l’accès aux transports sont jugés plus secondaires. Seuls 17 % des Français jugent que la proximité des infrastructures (transports en commun, commerces, écoles, travail) est un critère indispensable au logement durable, alors même que les transports, a fortiori individuels, sont le premier poste d’émissions de gaz à effet de serre. Signe que la notion de logement durable est encore loin de prendre en compte les éléments extrinsèques au logement

Par ailleurs, on observe un certain décalage entre l’impact environnemental réel d’un équipement et son importance aux yeux des Français. Par exemple, le bac de tri sélectif arrive en tête des équipements jugés indispensables au logement durable (pour 41 % des Français) loin devant la pompe à chaleur (14 %) ou la présence d’un panneau solaire/éolienne (17 %), qui contribuent pourtant tout autant, voire plus, à la préservation de l’environnement. 

Ces quelques décalages de perception plaident pour plus de pédagogie autour de l’ensemble des actions qui rendent un logement réellement durable mais montrent aussi que cette pédagogie paie, car le tri des déchets ne pose plus de question à personne aujourd’hui.

Cette étude démontre que les Français ont conscience que le logement va aussi devoir faire sa transition… ?

Les Français anticipent une évolution significative de la réglementation, à moyen terme.  Une large majorité de la population (61 %) pense probable que d’ici 10 ans, il y ait obligation de rénover son logement s’il ne respecte pas certains critères. 

Les plus jeunes sont les plus convaincus des changements majeurs dans les 10 ans à venir : la majorité des 18-35 ans (56 %) juge probable que d’ici 10 ans, tous les logements neufs soient autonomes en énergie (contre 43 % des plus de 60 ans). Pour faire face à l’étalement urbain, une majorité de Français plaide pour plus de densité. 56 % préfèrent qu’on construise « à la verticale, quitte à avoir des bâtiments plus hauts », alors que 44% préféreraient « construire à l’horizontale en étalant la ville, quitte à diminuer la superficie des sols naturels ou agricoles ».

Ces enseignements sont essentiels car ils démontrent que les Français sont prêts à accepter les évolutions nécessaires de notre habitat à court terme !